“Si le projet de loi de réconciliation économique et financière doit se fixer un objectif en termes de résultats, il devra cibler au moins 1,8% du PIB, ou près de 1,5 milliard de dinars (entre revenus directs d’amnistie et de réconciliation, et indirects liés aux effets multiplicateurs sur l’investissement privé et au climat des affaires en général), soit la même proportion du PIB perdue par la guerre contre le terrorisme”. C’est en tout ce qu’estime, mercredi 17 septembre, le Centre tunisien de veille et d’intelligence économique (CTVIE) relevant de l’IACE, en réaction au débat sur cette loi controversée.
L’Institut affirme que “seule une enveloppe de cette nature pourrait dissiper les différends et convaincre les réticents, quant à l’utilité d’affecter les ressources récupérées à des fonds de développement régional”.
Cependant, l’IACE juge impératif que les autorités monétaires, comme ce fut le cas au Maroc, puissent accompagner le projet présidentiel par un programme d’ordonnancement de mesures de libéralisation de change car en la matière la réglementation actuelle risque de se poser comme obstacle majeur à toute forme de réconciliation.
Une vraie amnistie fiscale et douanière doit aussi se joindre à ce projet de projet de loi tout en préparant un programme de mesures dans le cadre de la future réforme fiscale et douanière, recommande l’Institut.
Il rappelle, par ailleurs, que les prérogatives techniques du projet de ladite loi semblent totalement calquées sur le dernier épisode d’amnistie de change datant de 2007.
Toutefois, “l’amnistie de change et fiscale de 2007, assortie du paiement d’une taxe libératoire fixée à 5% de la valeur des avoirs déclarés, n’a permis de récupérer, pendant une période de douze mois d’amnistie, que 12 millions d’euros pour, seulement, 80 déclarations”.
Cette dernière n’a que très faiblement contribué au renflouement des réserves en devises de l’époque, d’après la note de l’IACE, et n’a pas alimenté des économies budgétaires, en raison de dispositifs contraignants divers, liés à la réglementation de change en vigueur dans notre pays.
Il faudrait aussi estimer l’apport de la partie amnistie fiscale sur le budget de l’Etat et sa séquentialité (fixation des priorités et procédés par composantes successives en concordance avec le projet de réforme) avec le projet de réforme fiscale et douanière. “Nous citons à titre d’exemple, le standard de l’OCDE d’échange automatique d’informations relatives aux comptes financiers en matière fiscale”, lit-on dans la note du Centre de veille de l’IACE.
Sur le plan technique, l’Institut arabe des chefs d’entreprise indique qu’il faudrait cependant ajouter l’apport de la partie réhabilitation des fonctionnaires de l’Etat et son impact sur la performance de l’administration et son engagement dans le processus de réformes.
Il s’agit également d’englober les impacts attendus sur l’environnement des affaires, les effets multiplicateurs sur l’investissement privé et les élasticités potentiellement attendues sur l’emploi et la valeur ajoutée.
A cela, il faudrait aussi estimer les revenus potentiels des réconciliations hors amnistie de change qui concernent soit des opérations de détournement ou de régularisations des fonds liés au secteur informel.
Le projet de cette loi mérite une étude approfondie de ses impacts dans cette situation, sans précédent et de récession exceptionnelle de l’économie tunisienne, expliquent les auteurs de la note.
Ceci implique, d’après eux, une réflexion sur le volume potentiel des fonds à récupérer, le sort des fonds récupérés (est-ce qu’ils seront alloués à des fonds de développement régionaux et de cohésion sociale, et par quels mécanismes?) ainsi que sur les effets attendus sur les fondamentaux de l’économie nationale et sur les indicateurs des finances publiques.
L’IACE estime également qu’il faudrait évaluer l’impact de l’amnistie fiscale de la loi en question, et ce en tenant compte des résultats déjà obtenus avec le même dispositif introduit auparavant dans la loi de finances de 2014.