Conquérir le
marché africain : Oui, mais comment ?
L’Afrique, voilà un continent plein de richesses que les Européens se disputaient le
siècle dernier. Et les disputes ne se sont pas arrêtées avec les
indépendances puisque le marché africain, fort riche en opportunités, est
fortement « courtisé » par les multinationales Américaines, Européennes et
Asiatiques.
N’entendant pas rater des éventuelles opportunités, plusieurs entreprises
Tunisiennes ont cherché à gagner quelques parts de marché dans divers pays
Africains. Tunisie Télécom a même gagné une licence d’opérateur GSM en
Mauritanie voilà quelques années.
Seulement, plusieurs problèmes persistent pour pénétrer ce marché et
différents chefs d’entreprises n’ont pas manqué de les remonter aux autorités
de tutelle pour essayer de trouver des solutions. Le premier problème est,
assurément, celui du transport aérien. Pour aller à Bamako, Nairobi,
Addis-Abeba ou Lomé, il faut obligatoirement transiter par une ville
Européenne, généralement, ou nord-africaine (Le Caire ou Casablanca).
Ce problème commence à trouver une solution avec la programmation par
Tunisair de quelques destinations africaines avec le lancement récent (et
grâce notamment à l’implantation à Tunis de la Banque africaine de
développement) de vols réguliers vers Abidjan.
Deuxième problème, les prix de ces vols. On ne peut aller nulle part en
Afrique subsaharienne avec un prix inférieur à 1 000 dinars. Alors qu’en
basse saison, presque toutes les villes Européennes sont accessibles à moins
de 500 dinars, bien que la distance (à vol d’oiseau) soit parfois
supérieure.
Troisième problème, les conditions climatiques et sanitaires de certaines
villes Africaines : altitude, pollution, chaleur, nécessité de vaccination,
etc…
Autre contrainte : la langue et la culture du pays où l’on va. Si au
Cameroun, au Sénégal, au Congo ou en Côte d’Ivoire, la langue française est
de mise, il n’en est pas de même au Nigeria, en Ethiopie ou au Kenya où on
doit obligatoirement maîtriser l’anglais et avoir des interlocuteurs qui la
maîtrisent également. Car, il va sans dire que ces interlocuteurs ne sont
pas des officiels de l’Etat, mais des entreprises, des commerçants, des
industriels, etc… Tout le monde ne parle pas l’anglais dans ces pays et
même dans les autres pays francophones, tout le monde ne parle pas français
!
Autre problème, la législation en vigueur dans certains pays où
l’importation de produits est fort restreinte et reste encore limitée à
certains produits. Il n’est pas facile, en un ou deux voyages, de gagner un
marché pour écouler des ordinateurs, des logiciels, des produits sanitaires,
des produits alimentaires ou encore des produits d’hygiène et de cosmétique
(serviettes, couches bébé, parfums, etc…).
Reste que ces handicaps peuvent tous être remontés tant qu’il y a une
volonté de réussite de la part du chef d’entreprise désirant vendre ses
produits. Avec l’expérience, la persévérance, les contacts sur place
et le suivi sérieux, il y a toujours une solution entre les chefs
d’entreprise Tunisiens et leurs homologues Africains.
Ce qui est plus difficilement surmontable est la question des visas.
Beaucoup de pays exigent ce document aux ressortissants Tunisiens. Si
certains, comme l’Ethiopie où l’on est conscient de l’importance de l’entrée
des étrangers hommes d’affaires et responsables, on délivre des visas sur
place, il n’en est pas de même pour beaucoup d’autres. Faute de
représentations diplomatique à Tunis, l’obtention d’un visa pour un chef
d’entreprise Tunisien ou son directeur commercial relève d’un véritable
parcours du combattant.
Un directeur commercial d’une société informatique Tunisienne, qui a déjà
quelques expériences heureuses au Sénégal et au Cameroun, témoigne. Il faut
généralement aller au préalable à Tripoli ou à Alger pour obtenir le visa de
certains pays. On imagine les coûts d’un tel «avant-voyage» puisqu’il faut
y rester au minimum 48 heures le temps que l’ambassade du pays de
destination fasse son enquête et prépare le sésame. Si ce n’est que ce
voyage, cela passe, mais les visas délivrés généralement ne durent qu’un
mois. Parfois, pour quelques pays, ces visas ne durent que quelques jours et
pour des dates fixes.
Donc, pour finaliser son affaire, il faudrait un autre déplacement vers
l’une de ces capitales où il y a une ambassade pour obtenir un deuxième visa
pour pouvoir aller au pays Africain désiré ! Inévitablement, cela se
répercute sur les prix de la marchandise qui la rend, du coup, non
concurrentielle avec d’autres issues de pays où les visas ne sont pas exigés
(le cas du Maroc par exemple dont les ressortissants voyagent comme ils
veulent dans beaucoup de pays Africains) ou encore ceux qui ont une
ambassade du pays Africain en question.
Autre conséquence, les vitesses de réaction face à un appel d’offres ou à
une démonstration exigée par un appel d’offres. Aucune possibilité pour le
Tunisien de prendre le premier avion puisqu’il n’a pas de visa et qu’il doit
perdre des jours pour en obtenir.
Que faut-il faire face à tout cela ? Les autorités de tutelle dans le
secteur de l’informatique ont promis, face aux doléances de certains chefs
d’entreprises, de remonter le problème aux ministères concernés pour qu’une
solution soit trouvée aux exportateurs désirant conquérir des marchés
Africains.
En effet, plusieurs solutions sont envisageables, notamment lors des
commissions mixtes, lors de la visite de ministres ou Chefs d’Etat Africains
à Tunis ou encore lors des sommets et rencontres de l’Union Africaine et
autres instances continentales. Parmi ces solutions, la mise en place de
représentations diplomatiques ou encore la suppression du visa pure et
simple pour les ressortissants Tunisiens quand cela est possible.
Une solution à trouver est urgente si l’on désire trouver d’autres marchés
ailleurs qu’en Europe (où la concurrence est de plus en plus rude). Les
autorités en sont conscientes et on pourrait s’attendre bientôt à ce que nos
chefs d’entreprise et responsables commerciaux puissent voyager plus
facilement en Afrique.