La bourse de Tunis s’est légèrement relevée au cours de la seconde moitié de
l’année 2003. Peut-on pour autant dire que la bourse de Tunis n’est plus «
malade » ?
Quelques semaines, en effet, avant la fin de l’année dernière tout le monde
cherchait une solution à la crise que personne n’essaie d’ignorer ou de
cacher et il a fallu lui désigner un médecin à son chevet, en la personne de
M. Mohamed JERI.
La commission, agissant par consultation des différentes parties de la place
financière, était donc présidée par l’ancien ministre des finances et ancien
conseiller présidentiel. Elle vient de sortir un rapport de 21 pages. Il en
ressort que les
« bons » résultats ne doivent pas nous faire oublier la maladie latente.
Partant des chiffres 2002, ledit rapport fait les constats suivants :
– Un taux de rotation négatif de 10%.
– 45 entreprises cotées se caractérisant par un manque de mobilité.
– Un volume d’émissions qui ne dépasse pas les 233 MDT, soit 5%
de l’investissement privé (très en dessous de l’objectif des 20%
du dixième plan).
Les symptômes de la maladie
Le rapport évoque ensuite les différents symptômes de l’état de santé de la
bourse de Tunis. En premier lieu l’offre où le rapport identifie 9 handicaps
à son développement. Y passe le refus de l’entreprise, à caractère familial,
à se financer en bourse, pour fuir l’obligation d’information et de
communication, ainsi que le refus des banques à pousser ces entreprises vers
la bourse, car elles constituent le cœur de sa clientèle.
On y retrouve, également, la non exploitation de l’option bourse dans
les les programmes de privatisations, la
lenteur qui caractérise l’octroi du visa pour l’accès à la cote, les
conditions de distribution des bénéfices ainsi que l’insuffisance des
incitations fiscales.
Analysant la demande, le rapport met surtout en cause la faiblesse de
l’épargne longue durée, de la part notamment des assurances, des caisses de sécurité sociale, « dont la présence sur la bourse ne semble pas inscrite dans la stratégie
d’investissement et qui plus est obéit à une autorisation de la Carep »,
précise ledit rapport.
Le rapport n’épargne pas non plus les autres
outils du marché financier, que sont les CEA (ancienne version) et les
Sicav. Pour les mixtes, il met en cause l’absence de conditions
d’entrée et de sortie qui n’a pas aidé à allonger le temps de l’épargne.
Pour les obligataires, il met en cause le mode d’évaluation des obligations.
Le troisième et plus important symptôme de l’état de santé de la bourse de
Tunis, réside
dans la marche même de la bourse. Là, la tirade est tout autant vrai que
douloureuse. « Les principales problématiques, sont la communication
financière, le peu de rendement des sanctions, l’absence d’une culture
financière, l’absence de capacités professionnelles et de respect de la
déontologie du marché financier ».
Les 4 vérités
du marché
Le rapport confirme en effet, le peu d’intérêt que prêtent les entreprises
cotées, à l’évolution du cours de leurs actions; en ne se prêtant que très
rarement, d’une manière volontaire, à l’exercice de la communication
financière; sans compter le peu d’intérêt qu’ils portent à la conformité de leurs prévisions
avec les réalisations.
Les sociétés cotées, et c’est le rapport qui le dit, ne
se conforment pas toujours aux délais réglementaires de publication de leurs
états financiers semestriels et annuels et lorsqu’elles le font, ces états
ne comportent en général pas les informations et les explications qui sont
susceptibles de permettre à l’investisseur de se faire une idée juste sur
l‘état de l’entreprise.
Et le rapport de faire état des affaires Batam, Stip,
UIB, Tunisair et BTEI en tant qu’exemples de « l’influence négative sur la
confiance de l’investisseur et sur la transparence du marché ». Les
personnes consultées, indique le rapport, ont en majorité insisté sur
l’impératif de plus de sévérité, pour le CMF, avec les différents
intervenants, dont les intermédiaires, les sociétés cotées et les
investisseurs lorsqu’ils ne respectent pas les règles de fonctionnement de
la bourse. Le rapport évoque aussi la nécessité de clarifier la nature de la
relation CMF-banques.
Ledit rapport parle aussi des «spéculations excessives qui ont fortement
ébranlé la confiance des investisseurs et ont influencé le marché qui a vu
les prix de certaines actions dépasser la valeur exacte de l’entreprise et
d’autres tomber bien en dessous de cette valeur »
L’entreprise,
entre crédit et transparence
Conclusion : la bourse de Tunis souffre de deux maux.
– Le premier, selon le rapport, est l’absence de transparence à tous les
niveaux.
– Le second est le manque d’épargne longue durée. Mais si les choses
semblent plus ou moins claires pour ce second mal, elles sont moins
évidentes pour ce qui concerne la transparence. Les parties consultées
confirment en effet que « ce que gagne l’entreprise de la non
transparence dépasse de loin la différence entre le coût du crédit bancaire
et le coût du recours au marché financier ».
Mais
pas uniquement cela, puisque le rapport évoque une conjoncture nationale,
qui n’encouragerait pas les entreprises à
adhérer à la transparence. Mais plus grave encore, le rapport évoque la
production par certaines entreprises de bilans différents, selon
l’institution ou la structure à laquelle ils sont destinés et de s’exclamer
qu’il est anormal que ces pratiques continuent d’exister !
Pour les solutions proposées, certaines ont déjà été mises en exécution,
comme les mesures concernant les CEA, d’autres sont en gestation comme
celles qui concernent l’information financière. On y reviendra.