La mesure ne date certes pas
de plus de deux mois et les décrets d’application aussi. Mais elle était
attendue, sinon demandée, par les intermédiaires en Bourse. Il était donc
temps qu’il bougent et communiquent sur le « compte épargne action » (CEA) ;
mesure phare en 2004 dont ils attendent un sérieux coup d’accélérateur pour
la Bourse.
La conférence de presse du 6 mars 2004 en présence des journalistes et des
représentants du ministère des Finances et de la Bourse des valeurs
mobilières était la première de ces actions. Une rencontre qui a porté sur
le fonctionnement du CEA et les incitations fiscales relatives à ce produit
financier relooké.
Etes-vous cigale ou fourmi ?
Avec les nouvelles incitations fiscales introduites dans le compte épargne
actions (CEA), la question peut être posée à toute personne physique,
qu’elle soit salariée ou de profession libérale, industriel ou commerçant !
Avec les développements attendus des deux systèmes de retraite, public et
privé, il vous reste en effet peu de choix entre consommer frénétiquement
tout ce que vous rapporte votre travail et économiser pour garantir une
épargne pour vos vieux jours ! Et même là, il vous reste aussi peu de choix
entre empocher net ou brut, entre payer le fisc ou le « sucrer » en toute
légalité !
Le CEA a été créé en 1999 par les pouvoirs publics dans le but d’assurer le
renforcement des fonds propres des entreprises et de promouvoir le
développement de I’actionnariat populaire. A cause de diverses «
imperfections », il n’a pu attirer jusqu’à fin 2003, que 1250 épargnants
totalisant un montant de 8,5 MDT, selon les chiffres du ministère des
Finances. Un chiffre où la moyenne d’investissement par compte ne dépasse
pas les 6700 DT. Trop peu pour un pays qui veut relever son taux d’épargne
au-dessus des 23% du PIB enregistrés actuellement.
Il est accessible à toute personne physique et non aux personnes morales
(sociétés ou entreprises). Dans la limite de 20 mille DT et au rythme, si
elle le souhaite, d’un compte par exercice fiscal, celle-ci peut ouvrir un
compte d’épargne actions auprès d’une banque ou d’un intermédiaire en
Bourse.
Pourquoi le faire ? D’abord, parce que cela vous permettra de déduire de
votre revenu imposable et dans la limite de 20.000 DT, les sommes consacrées
à l’acquisition des valeurs mobilières éligibles au CEA. Vous payerez ainsi
moins d’impôt. Voici des exemples en dinars tunisiens, calculez :
Assiette
imposable en DT
8000
15000
20000
30 000
45 000
58780
75000
100 000
IR sans CEA
1.125
2.775
4.025
7.025
11.525
16.098
21.775
30.525
Impôt minimum
675
1.665
2.415
4.215
6.915
9.0658
13.065
18.315
Investissement
CEA
2.250
4.440
6.440
9.366
15.366
20.000
20.000
20.000
IR avec CEA
675
1.665
2.415
4.215
6.915
9.659
14.775
23.525
Gain fiscal
450
1.110
1.610
2.809
4.609
6.439
7.000
7.000
Taux du gain
fisc
20%
25%
25%
30%
30%
32.19%
35%
35%
De l’avis de tous les
spécialistes, aucun autre produit financier ne permet plus grande « évasion
légale » de la fiscalité. Cela, d’autant plus que le CEA est le plus
rentable de toutes les épargnes jusqu’ici proposées. Un représentant de la
Bourse assure que, pour un salarié, « …le rendement annuel moyen d’un
placement de 5000 DT dans le CEA, sur 5 ans et avec un revenu imposable de
21000 DT, varie entre 11,1% et 11,4%, alors qu’un placement simple hors CEA
rapporterait 5% en BTA et 6,4% en Bourse.
Pour un épargnant de profession
libérale, le représentant officiel de la BVMT affirme que « …le rendement
annuel moyen d’un placement de 20.000 DT, dans une CEA de 5 ans avec un
revenu imposable de 70.000 DT, varie entre 12,6% et 13% alors qu’un
placement simple, hors CEA, n’aurait rapporté que 5% en BTA et 6,4% en
Bourse.»
Le titulaire du CEA bénéficie d’une déduction de son revenu imposable
équivalente à la somme investie et pour un montant déductible ne dépassant
pas 20.000 Dinars par an. Cette déduction ne peut en aucun cas aboutir au
paiement, au titre de l’impôt sur le revenu (IR), d’un montant inférieur au
minimum d’impôt, soit 60% du montant de l’IR global dû.
Epargnez à votre rythme
C’est aussi une épargne qui peut se faire à petits montants (après une
première mise dont le seuil diffère selon les intermédiaires), sans
bousculer ses finances. Les organismes habilités à ouvrir et gérer les CEA
sont les banques et les intermédiaires en Bourse. Une convention doit être
obligatoirement signée entre I’organisme auprès duquel le CEA est ouvert et
le titulaire du compte. Le client peut gérer lui-même, d’une manière directe
ou assisté par l’intermédiaire qui attendra toujours ses ordres d’achat. Le
titulaire gère lui-même les sommes versées sur le CEA dans les mêmes
conditions que dans la première forme. Toutefois, le gestionnaire est
habilité, durant les 5 derniers jours du délai de 30 jours, à procéder pour
le compte du titulaire à des opérations d’acquisitions d’office des titres
lorsque le montant non utilisé pour l’achat des titres dépasse les 100
dinars.
Il pourra aussi donner pouvoir à son intermédiaire ou à sa banque pour une
gestion totale, sans avoir à les consulter au préalable dans ses achats et
ventes de titres. En aucun cas, alors, le taux des BTA dans la composition
du portefeuille ne doit dépasser les 20%. Les sommes déposées dans le CEA
sont affectées, dans la limite de 20% au plus, à 1’acquisition des BTA et,
dans la limite de 80% au moins, à l’acquisition de toute action admise à la
cote de la Bourse, y compris les actions à dividendes prioritaires (ADP) et
les certificats d’investissement. Les sommes peuvent être affectées dans les
OPCVM dédiés aux CEA.
Dans tous les cas, le client recevra du gestionnaire du compte un état
trimestriel du compte et un état mensuel du portefeuille. Et si
l’intermédiaire ou la banque ne lui conviennent pas, il peut toujours leur
ordonner de transférer son compte chez un autre intermédiaire ou chez une
autre banque. Il est bien entendu l’intermédiaire se fera payer et,
attention, c’est à chacun à commission. Négociez bien donc. N’oubliez pas
que vous payerez aussi la Bourse qui payera elle-même le CMF et la
Sticodevam. Il s’agit de très petites sommes, mais cela fera le bonheur de
tous ces organismes qui font fonctionner le marché.
Les personnes concernées par ce régime peuvent ouvrir chaque année un CEA
par exercice fiscal. L’ouverture n’est pas limitée par des délais.
Cependant, les montants et les titres qui y sont déposés ne doivent en aucun
cas être retirés par le déposant avant 5 ans à compter du l’ouverture du
compte.
On terminera avec cette déclaration d’un intermédiaire boursier présent à
cette manifestation qui assure que « …toutes les simulations faites
démontrent qu’au bout des 5 années d’épargne, même si la valeur des actions
achetées atteint zéro, on ne perd jamais le capital » !
Cette réunion avec les journalistes sera suivie de plusieurs autres avec les
« Dafeurs » des administrations publiques pour leur apprendre comment
déduire directement les montants investis, avec les représentants des
banques et des assureurs et même à l’intérieur du pays. L’AIB penserait même
à la mise au point d’un module informatique, pour gérer ces déductions des
sommes investies de la fiscalité de chaque épargnant, qu’elle compterait
offrir aux entreprises publiques.