Dans
une opération d’exportation, il y a toujours des risque aussi bien pour
l’exportateur que pour l’assureur. En Tunisie, c’est la Cotunace. Unique «
risqueur » en la matière, ce dernier connaît les impayés et ceux par qui ils
arrivent et parvient à en cerner les causes. Dans une lecture par les
chiffres, on découvre que des entreprises de l’une des plus solides
économies d’Europe sont de mauvais payeurs et que certaines entreprises
tunisiennes ne savent pas encore choisir le meilleur mode de paiement pour
éviter ces couacs !
Le dernier séminaire sur les risques pays, organisé par la Cotunace
(compagnie tunisienne d’assurance des exportations) pour présenter les
résultats du «Guide risque pays 2004» de la Coface (Compagnie française
similaire), a été l’occasion de quelques petites nouvelles, qu’on aurait pu
trouver improbables et peut-être incroyables. La plus importante concerne
les impayés qu’enregistre annuellement l’assureur national du commerce
extérieur et, plus précisément, la liste des mauvais payeurs qui sont la
cause de ces impayés.
Les chiffres datent de 2002 et la lecture que nous en faisons est plutôt
sèche, mais les résultats sont éloquents. En 2002, en effet, la Cotunace a
enregistré 11,6 MDT d’impayés. Ce volume était, jusqu’en 2000, stable.
Depuis 2001 (5,7 MDT), ces impayés ont progressés de 100%. Au «
palmarès » des mauvais payeurs, les pays d’Europe de l’Ouest occupent la
première place avec un total de 9,3 MDT ; soit 80% de l’ensemble de ces
impayés et en progression de 157% d’une année (2001) à l’autre (2002).
L’Afrique occupe, selon la Cotunace, la seconde place au titre des impayés.
Le total des impayés sur l’Afrique (1,2 MDT) est cependant, de loin (place de
l’Union européenne dans le commerce extérieur tunisien oblige) de moindre
importance, même s’il représente 11% de l’ensemble des impayés.
Le cas français !
La France représente, à elle seule, 42,6% de l’ensemble des exportations
Tunisiennes vers l’Europe et 26% des exportations couvertes ou exportations
assurées. «A tout seigneur tout honneur», la France occupe aussi la
première place des impayés. Avec 6,9 MDT sur les 11,6 MDT (Total) et
sur les 9,3 MDT d’impayés européens, elle est donc placée à
la première place des mauvais payeurs pour l’année 2002.
L’étude de la Cotunace a aussi cherché (et trouvé) à savoir pourquoi les
acheteurs français ont été de si mauvais payeurs. Selon cette étude de cas,
85% des impayés sur la France, avaient pour origine une insolvabilité de
droit. Et cela est même à la hausse, puisque ce taux n’était que de 76% une
année auparavant. Et si l’année 2001 a été celle des litiges commerciaux,
2002 a été fortement marquée par l’insolvabilité de droit. La carence n’a
représenté que 11% des impayés et le refus de paiement, par suite d’un
litige commercial, ne représentait que 4% en 2002, contre 24% en 2001.
Une lecture de ces impayés, selon le mode de paiement, nous révèle que 93%
de ces montants résultent d’opérations réalisées par virement. La traite n’a
laissé que 7% d’impayés en 2002, alors que la lettre de crédit semble avoir
été la parade absolue contre le non paiement.
Il faut dire que les opérations, toutes régions confondues, qui ont été
réalisées par simple virements bancaires ont été les plus exposées au
phénomène des impayés. Le taux a été de 91%, contre seulement 83% en 2001.
La traite a laissé 7,9% d’impayés alors que la lettre de crédit n’était qu’à
l’origine d’uniquement 1% d’impayés. Tirez-en donc les conclusions, mais exportez toujours «couverts» ou assurés et choisissez bien
votre mode de paiement !
Votre bon assureur national, vous donne en tout cas la «recette» pour se
prémunir contre l’insolvabilité de droit. «Il n’y a qu’une seule manière
de droit, c’est l’insertion aux conditions générales de vente, une clause de
propriété par laquelle le vendeur se réserve la propriété de la chose vendue
jusqu’au paiement intégral du prix», indique la Cotunace. Analysant
ensuite la «sinistralité» et le recouvrement, le document de la Cotunace,
tire la conclusion que « le risque majeur sur ce pays, c’est le dépôt de
bilan ou l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire».
Les cas
italien et espagnol
Le document de la Cotunace étudie, également,
les cas de l’Italie et de l’Espagne. Avec 41%, le premier est le second
destinataire des exportations tunisiennes vers l’Europe. Les impayés sur ce
pays ne représentent que 0,5% des capitaux assurés sur ce pays, «mais la
situation des impayés y reste préoccupante », conclut le rapport. Et la
Cotunace d’ajouter que la totalité des impayés, sur l’Italie, a été réalisée
via le mode de paiement par virement bancaire. Le litige commercial y est à
l’origine de 94% des impayés déclarés en 2001 et 54% des impayés déclarés en
2002. «Il semble que nos voisins italiens trouvent dans le litige
commercial un moyen plus facile, soit pour ne pas payer soit pour arracher un
avoir ou même repousser au maximum l’échéance de paiement», note le
conférencier de la compagnie d’assurance.
L’état des impayés inquiète d’autant plus l’assureur que le taux de
recouvrement ou de récupération ne dépasse pas les 13,7% des sinistres
indemnisé, et pour cause : Il existerait en Italie un phénomène
d’entreprises nomades. Des sociétés pas forcément liquidées, mais qui
changeraient continuellement d’adresse !
Pour l’Espagne, les impayés dépassent 1,5 MDT avec un taux de récupération
inférieur à 1%. Et malgré le fait que le virement soit le mode de paiement
le plus «dangereux» en général dans les transactions commerciales, ce mode
semble être le plus usité entre entreprises tunisiennes et espagnoles. La
Cotunace attire l’attention sur la lenteur des procédures et le coût élevé
des procédures judiciaires et conseille d’ailleurs de toujours conserver les
documents contractuels, les bons de commandee et les bons de livraisone signés
par les acheteurs ! A bons entendeurs Salut, c’est la Cotunace qui vous le
dit, Messieurs les exportateurs.