Ce devoir
légal souffre de tant d’exceptions, qu’il faut se méfier de la protection
que vous offre votre banquier.
MOTUS
ET BOUCHE COUSUE : cette règle de bonne conduite pour tout banquier est
devenue un devoir légal depuis la loi bancaire du 24 juin 1984. Votre
banquier est un confident nécessaire, comme votre médecin ou votre avocat.
En contre-partie, il est tenu de garder le silence sur tous les faits qui
lui sont confiés dans l’exercice de sa profession. C’est le principe du
secret bancaire. Mais c’est un principe bien mal en point si l’on considère
les larges exceptions que la loi lui accorde.
LES PRINCIPES
Quels sont les
faits couverts par le secret ? Le banquier (ainsi que les cadres et employés
de l’établissement) doit garder le silence sur toutes les informations
livrées par le client volontairement, ou connues de par son activité
professionnelle. La position d’un compte, les opérations qui y sont
effectuées, les financements consentis, les cautions fournies ne doivent pas
être divulguées.
En revanche, il
est d’usage constant que le banquier donne à ses clients des renseignements
sur le risque financier inhérent à telle personne ou société. Sans fournir
d’indications chiffrées, il peut se faire l’écho de “l’opinion commune de la
place”, selon l’expression consacrée. Et recourt souvent à des formules
stéréotypées : “situation bancaire solide” ou “irrémédiablement obérée”,
incidents de paiements” ou bien “paiements réguliers” … En Suisse, rient
de tel. Même l’ouverture d’un compte doit, en vertu de la loi, rester
confidentielle.
Le secret
bancaire à la française peut être partagé par plusieurs personnes ayant
vocation à entrer dans la sphère de confidentialité. C’est ainsi que les
représentants du titulaire du compte (mandataire, titulaire d’une
procuration sur le compte, tuteur … ) ont le droit d’entrer dans la
confidence. Mais la famille du titulaire du compte n’a pas vocation à
partager le secret. Pas plus que le conjoint. Chacun des époux a droit à son
autonomie bancaire. Sauf en cas de divorce, où le juge peut demander
communication des situations bancaires de chaque époux dans le but de fixer
les pensions alimentaires et de liquider le régime matrimonial. Pour les
sociétés, le secret se trouve partagé entre le banquier et leurs dirigeants.
En revanche, les simples associés se retrouvent tenus dans l’ignorance (sauf
dans les sociétés en nom collectif).
La violation du
secret bancaire fait encourir à l’auteur de la fuite des peines d’un à six
mois d’emprisonnement et de 500 à 15 000 francs d’amende (art. 378 du Code
pénal), sans compter la condamnation à des dommages et intérêts.
LES EXCEPTIONS
Elles sont
dûment répertoriées par la loi. Voici les plus importantes :
– Le banquier a
l’obligation de témoigner dans un procès pénal et de fournir au juge
d’instruction l’ensemble des documents qu’il détient. En revanche, il
doit garder le silence devant la justice civile ;
– Le Code
général des impôts permet aux agents du fisc de contrôler les déclarations
des contribuables, grâce aux informations bancaires. Les banques doivent
d’abord déclarer spontanément au fisc l’ouverture, la clôture et tout
changement de nature des comptes. Même chose pour la location d’un
coffre-fort. En outre, l’administration fiscale peut se faire communiquer
tous les impôts directs ou indirects (art. 2002 CGI) ;
– Les Douanes
ont, à peu de choses près, le même pouvoir que l’administration fiscale ;
– Les enquêteurs
de la COB (Commission des opérations de Bourse) peuvent se faire communiquer
tous les documents et peuvent également recueillir toutes informations
utiles auprès des personnes qui ont accompli des opérations pour le compte
de la société contrôlée ;
– Le secret
bancaire ne peut être opposé à des autorités comme la Commission bancaire ou
la Banque de France. En outre, la banque doit déclarer au fichier central
des chèques impayés le non-paiement des chèques susceptibles d’entraîner une
interdiction bancaire ou judiciaire ;
– Enfin, la loi
Neiertz du 31 décembre 1989 ayant institué des commissions départementales
d’examen des situations du surendettement des ménages, celles-ci ont le
pouvoir d’obtenir auprès des établissements de crédit des informations sur
la situation financière du débiteur malheureux.
(Source :
Science & Vie – Economie – N°76 – octobre 1991)