Climat d’affaires : La Tunisie dans la moyenne
Par Khaled BOUMIZA
Sous le titre de «La Pratique des Affaires en 2005», la Banque Mondiale
vient de sortir son nouveau rapport sur le climat des affaires dans le
monde. Le projet «La Pratique Des Affaires : Eliminer les obstacles de la
croissance» est le fruit de la collaboration de plus de 3000 experts locaux
, avocats, comptables et fonctionnaires publics- et des chercheurs
universitaires renommés qui ont contribué à l’élaboration et à l’examen de
la méthodologie. Signalons que les données, la méthodologie et les noms des
collaborateurs sont disponibles en ligne.
La Pratique des Affaires en 2005 remet à jour les données relatives aux cinq
grands indicateurs de mesure du climat d’investissement, et que le dernier
rapport sur «La Pratique des Affaires en 2004» avait répertoriés :
création d’entreprises, licenciement et recrutement du personnel, exécution
des contrats, accès au crédit et dissolution d’entreprises.
Le nouveau rapport innove en élargissant le champ de recherche pour inclure
145 pays et en créant deux nouveaux indicateurs comme l’enregistrement de la
propriété et la protection des investisseurs.
Depuis l’année dernière, 13 gouvernements ont demandé que leurs pays soient
inclus dans l’étude.
«Cette année, La Pratique des Affaires» fournit des indicateurs encore
plus robustes pour mesurer l’efficacité de l’environnement réglementaire par
référence à celui d’autres pays, surtout pour s’informer et s’initier à des
pratiques inspirées de modèles universels et pour classer en terme de
priorité les réformes», affirme Simeon Djankov, un des auteurs du rapport.
La Slovaquie et la Colombie sont en tête des pays qui, au cours de l’année
dernière , ont réussi à instaurer des réformes pour un meilleur climat
d’investissement. Selon le nouveau rapport du Groupe de la Banque Mondiale,
le succès des réformes dans ces deux pays repose sur la création d’un
guichet Internet unique pour les nouvelles entreprises, la réduction
importante des délais dans les dispositifs réglementaires, l’amélioration
des registres de crédit et l’introduction de nouvelles mesures pour une plus
grande flexibilité dans les lois du travail
Plus cher la faillite, plus difficile le crédit
En comparant la performance et les réformes de la réglementation dans 145
pays, l’étude constate qu’il est deux fois plus difficile pour un
entrepreneur d’un pays en développement de créer, de dynamiser une
entreprise ou de la fermer que dans un pays riche à cause des procédures
administratives. De plus, comparés aux pays riches, les pays pauvres offrent
à peine la moitié des protections en matière de droits à la propriété
privée.
Par exemple, cette année, le rapport enregistre de grandes variations au
niveau des coûts de recrutement et de licenciement entre les pays et
démontre comment les coûts élevés de licenciement peuvent réduire la
création d’emplois. Il dévoile aussi qu’une réglementation inadéquate pour
le traitement des entreprises en faillite peut conduire à une réduction
importante de prêts aux entreprises. Dans cinquante pays, les créanciers ne
peuvent espérer recouvrir que 20 pour cent de leurs prêts (mesurés en
centimes par dollar) lors d’une mise en faillite de l’entreprise.
D’une manière générale, comparés à l’année passée, les pays riches ont
instauré trois fois plus de réformes pour améliorer leur climat
d’investissement que les pays en développement. « Les pays en développement,
qui ont vraiment besoin de nouvelles entreprises et de nouveaux emplois,
vont accuser un retard encore plus aigu comparé aux pays riches qui
simplifient la réglementation et instaurent un climat d’affaires plus
favorable aux entreprises », affirme Michael Klein, Vice-Président de la
division, Développement du Secteur Privé de La Banque Mondiale/ SFI et
économiste en chef de la SFI. Parmi les nations européennes qui ont fait
preuve d’un effort particulier pour promulguer les réformes, on trouve des
pays désormais concurrents de la Tunisie en matière d’IDE (Investissements
directs étrangers) comme la Slovaquie, ou la Lituanie, ou encore l’Espagne.
Régler le climat des affaires = 2,2% de croissance
Dans un pays riche, 6 procédures, 8 pour cent du revenu par habitant et 27
jours sont requis, en moyenne, pour la création d’une entreprise ; dans un
pays pauvre ou à revenu moyen inférieur, le démarrage d’une entreprise
nouvelle requiert 11 procédures, 122 pour cent du revenu par habitant et 59
jours. L’immatriculation d’une nouvelle entreprise prend plus de 100 jours
dans plus d’une douzaine de pays. A eux seuls, les coûts administratifs dans
les pays pauvres sont trois plus élevés que dans les pays riches. Il y a
aussi deux fois plus de procédures administratives et de délais dans les
pays pauvres. Les entreprises dans les pays pauvres font face à un appareil
de réglementation bien plus lourd que dans les pays riches.
Les pays en développement imposent des coûts élevés aux entreprises
lorsqu’il s’agit de licencier un employé, d’exécuter un contrat, ou de faire
une demande d’enregistrement d’une nouvelle société; ils imposent plus de
délais lors de la dissolution des entreprises en état d’insolvabilité, de
l’enregistrement des propriétés, et de la création de nouvelles entreprises.
De plus, ils procurent moins de protection légale aux débiteurs et aux
créanciers, moins de protection aussi pour assurer l’exécution des contrats
commerciaux et finalement, ils imposent moins d’exigences en terme de
divulgation d’informations sur l’état financier de même que sur les
principaux dirigeants et actionnaires des entreprises.
Les bénéfices des réformes sont conséquents. En effet, le passage d’un pays
du dernier quartile au premier quartile dans le classement des pays tel que
mesuré par l’indice de ‘la réglementation des affaires’ est associé à un
gain de 2.2 pour cent de plus en croissance économique annuelle.
La Pratique Des Affaires souligne que les pays qui ont des règles plus
simples, peuvent procurer une meilleure protection sociale et un climat
d’investissement porteur d’opportunités pour la communauté des
entrepreneurs, investisseurs et le public en général. Les 20 pays les mieux
classés sur l’indice de « la réglementation des affaires » sont la Nouvelle
Zélande, les Etats Unis, le Singapour, Hong -Kong , La Chine, l’Australie,
la Norvège, le Royaume Uni, le Canada, la Suède, le Japon, la Suisse, le
Danemark , les Pays Bas, la Finlande, l’Irlande, la Belgique, la Lituanie,
la Slovaquie, le Botswana et la Thaïlande.
Et la Tunisie ?
Pour la Tunisie, Il ressort des différents critères et ratios pris en
compte, qu’elle se situe dans la moyenne et généralement, ni trop loin ni
trop près, aussi bien de la moyenne régionale que de la moyenne des pays de
l’OCDE. Il en est ainsi du nombre des procédures, du temps et du coût du
temps nécessaire pour lancer une affaire. Cela requiert en Tunisie 9
procédures (contre 10 en moyenne régionale et 6 en moyenne de l’OCDE) et 14
jours. Cela coûte moins que la moyenne régionale. Là où la Tunisie est
meilleure, c’est dans la mise en vigueur des contrats.
Cela demande en Tunisie seulement 14 procédures, contre 38 en moyenne
régionale et 27 jours (contre 437 en moyenne régionale et 229 en moyenne
OCDE) et cela coûte aussi moins cher que chez les voisins. Du côté de la
protection des investisseurs, qui se mesure par le degré de divulgation et
d’accès aux informations concernant les finances des entreprises surtout, la
Tunisie réalise aussi un bon score de (6 car plus il est élevé mieux c’est),
surtout par rapport à la moyenne de la région et même par rapport à l’OCDE.
La Tunisie reste aussi dans les moyennes pour les indicateurs relatifs à
l’accès et à l’information du crédit. Elle réalise un score de 4 contre 3,9
pour la région et 6,3 pour l’OCDE.
Dans d’autres facteurs, le pouvoir concurrentiel de la Tunisie, peut sembler
quelque peu effrité. Il s’agit des ratios qui déterminent de plus en plus le
choix des investisseurs d’un pays au détriment de l’autre. Il serait
peut-être important de lire (plus haut) les commentaires des experts de la
Banque Mondiale relatifs à ce volet. Ils n’ont peut-être pas toujours eu le
souci du social, mais le raisonnement n’est pas tout à fait hors de propos !