SOS entreprises : Acharnement thérapeutique ?
Par Khaled BOUMIZA
Le vendredi 24 décembre 2004, l’Institut Tunisien des Experts Comptables (ITEC)
organise un séminaire de formation, destiné aux experts comptables,
auditeurs et responsables financiers des entreprises, sur un thème d’une
actualité brûlante : “les entreprises en difficultés économiques”. Un sujet d’autant plus sous les feux de l’actualité, avec des cas tels que Batam,
Electrokallel et d’autres qu’on ignore.
Une nouvelle réflexion, non seulement sur la loi en elle-même et les
amendements qu’elle a subi, mais aussi et surtout sur le concept même de
difficulté et de sauvetage des entreprises.
Une analyse récente des chiffres de la création et de la cessation
d’activité des entreprises (Sur une période de 50 ans 1950-2000), faite par
l’UTICA et distribuée à l’occasion de l’un de ses séminaires, a enregistré
un total de 693.844 création d’entreprises. Sur la même période et toutes activités
confondues, près de 300.000 entreprises ont été déclarés en cessation
d’activité. Cela représente un taux de mortalité ou taux de cessation de
42,73%. Finalement, 397.351 entreprises sont actives à fin 2001. Les
entreprises en activité sont ainsi supérieures aux entreprises en cessation.
Cela renseigne sans aucun doute, sur la tendance positive de la dynamique
créations /cessations.
Périodes
|
1950
|
51-80
|
81-85
|
86-90
|
91-95
|
96-2000
|
2000
|
Totaux |
Créations
|
5 313
|
88 898
|
82 980
|
113 581
|
170 762
|
192 625
|
39 685
|
693 844 |
Cessations
|
960
|
7 968
|
26 110
|
48 659
|
103 749
|
98 623
|
10 424
|
296 493 |
Additionnel
|
4 353
|
80 930
|
56 870
|
64 922
|
67 013
|
94 002
|
29 261
|
397 351 |
cumul Création
|
5 313
|
94 211
|
177 191
|
290 772
|
461 534
|
654 159
|
693 844
|
693 844 |
Cumul cessation
|
960
|
8 928
|
35 038
|
83 697
|
187 446
|
286 069
|
296 493
|
296 493 |
NET
|
4 353
|
85 283
|
142 153
|
207 075
|
274 088
|
368 090
|
397 351
|
397 351 |
L’analyse par période des créations et des cessations des entreprises met en
relief l’étroite liaison entre la dynamique entrepreunariales et le
développement économique en général. En effet, pendant les périodes de
récession économique, il y a baisse ou stagnation des créations
d’entreprises. C’est à partir des années 86, qu’on constate une augmentation
soutenue des créations d’entreprises et ce, de par la stabilité économique
établie, l’ouverture du marché, la privatisation, la mise à niveau des
administrations et l’amélioration de l’environnement entrepreunariale en
général.
La dynamique des création d’emplois par la création d’entreprises est
quelque part liée à la disparition d’autres entreprises. Il n’y avait, en
ces temps là, aucun interventionnisme de l’Etat. Les entreprises se créaient
et cessaient leurs activités , dans l’ordre normal des choses.
C’est à partir de 1995, que l’appréhension de l’ouverture des frontières
économiques et le souci du social, certainement pour équilibrer les effets
de la libéralisation, que les autorités ont commencé à mettre en place des
outils de restructuration et de mise à niveau de l’entreprise tunisienne,
pour lui donner les mêmes moyens de concurrence, que ceux des entreprises
qui allaient entrer sur son propre marché. On verra ainsi le lancement,
presque simultané, du programme national de mise à niveau des entreprises et
de la structure “SOS entreprises” par la loi 95-34, amendé ensuite en 1999
et en 2003.
Cette loi a certes sauvé un grand nombre d’entreprises et des centaines de
postes d’emplois. Mais, depuis, cette loi a aussi été détournée et a été maintes
fois dénoncée par le secteur bancaire. Des entreprises en ont bénéficié, sans pour
autant réellement arriver à se remettre à flot. A-t-elle plus profité aux
entreprises et à l’économie, qu’aux entrepreneurs et leurs économies ? Les
différentes enquêtes et lectures des chiffres générés par l’action de la
cellule de sauvetage des entreprises en difficulté ont-elles quantifié le coût du sauvetage d’une
entreprise pour l’économie tunisienne ? L’ a-t-on jamais aussi comparé avec
le coût réel d’une première création d’un poste d’emploi ?
Ne serait-il pas enfin temps que tout le monde, professionnels et autorités
économiques, acceptent le fait que l’entreprise a les mêmes caractéristiques
que l’être humain. Pour les deux, le cycle de la vie est le même. Comme lui
, elle naît dans la douleur. Comme lui, elle passe par des moments
d’épanouissement et des difficultés. En somme, comme lui, elle vit et elle
meurt.
Lorsqu’elle est malade, on la soigne. Lorsqu’elle est sérieusement malade,
son état peut nécessiter soins, médication, amputation, perfusion, opération
chirurgicale ou toute autre intervention. Il arrive aussi un moment où
l’acharnement thérapeutique ne mène à rien et l’euthanasie devienne alors
nécessaire.
L’idée ne plaira certainement pas ! Mais un gouvernement n’est-il pas comme
un «père de famille» à qui il arrive aussi de faire des choses qu’on peut
à priori ne pas aimer ?
24 – 12 – 2004 ::
07:00
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