Il y a quelques semaines, La Société « Tunisie-Lait » publiait un communiqué de
presse sur les médias, aussi laconique que déroutant. Elle y informe ses
actionnaires et le public, qu’«en raison du niveau des pertes cumulées,
enregistrées à la date du 30 juin 2004 et qui représentent plus de 50% de
ses fonds propres, il est prévu de réunir le conseil d’administration en vue
de convoquer une Assemblée Générale Extraordinaire devant statuer sur la
réduction du capital social pour absorber la totalité des pertes cumulées
qui s’élèvent à 11.787.561 DT ». Sans l’ombre d’une explication, le
management de cette entreprise à privatiser et qui n’arrive pas à se faire
vendre, annonce que « l’Assemblée Générale Extraordinaire pourrait
également être appelée à statuer sur une éventuelle augmentation de capital
par conversion de créances des banques ».
Laconique, le communiqué l’était par le peu d’informations qu’il véhiculait
sur les « quand », « comment » et « pourquoi » de la chose.
Déroutant, le communiqué l’était aussi dans la mesure où il n’obéit pas,
selon des sources du conseil d’administration de Tunisie Lait, aux règles en
cours.
Selon l’article 277 du code des sociétés commerciales, c’est au conseil
d’administration de convoquer les assemblées générales. L’article 307 du
même code précise que c’est à l’assemblée générale extraordinaire et à elle
seule, de décider de la réduction du capital et de la manière dont il
pourrait l’ être. En aucun cas, selon l’article 197, le conseil
d’administration ne peut empiéter sur les pouvoirs des AGO et AGE.
Il est clair que le management de l’entreprise a transmis cette
communication financière, d’une manière surprenante, dans la mesure où les
intermédiaires la découvraient sur les journaux de la place et que
Tunisie-Lait aurait dû le faire en la présence des intermédiaires. Le CMF
avait-il été mis au parfum et n’aurait-il pas dû essayer de faire rectifier
le tir en orientant l’entreprise vers de meilleures formes de communication
? Au contraire, le CMF s’est contenté de ressortir son éternel commentaire
de fin de communiqué, indiquant qu’il « n’entend donner aucune opinion ni
émettre un quelconque avis quant au contenu des informations diffusées dans
cette rubrique par la société qui en assume l’entière responsabilité » !
Il est tout aussi clair que le management n’a pas attendu la réunion du
conseil d’administration pour transmettre ce communiqué. N’aurait-il pas dû
le faire ? Voila plus d’un mois que cette annonce a fait perdre à l’action
Tunisie-Lait le peu de crédit que lui a laissé la privatisation manquée du
début de l’année. Rien n’a été fait, ni pour le conseil d’administration, ni
pour l’AGE, tout au moins, rien n’a été publié indiquant une action dans ce
sens.
Pourquoi l’entreprise s’est-elle précipitée vers la seule solution d’une
réduction du capital social pour absorber la totalité des pertes cumulées ?
N’est-ce pas là une manière de forcer la main à l’AGE ? Pourquoi ne pas
avoir opéré une réduction par réévaluation du patrimoine au prorata, comme
le proposent certains intermédiaires ? Pourquoi pas une réduction
des pertes cumulées après une première opération d’augmentation de capital
par incorporation des dettes ? Pourquoi pas aussi, une absorption des pertes
par diminution de la valeur nominale ? Autant de solutions possibles, selon
les professionnels, qui auraient pu épargner au petit actionnaire les affres
d’une seconde affaire « Batam », une opération de « coup d’accordéon » qui
réduirait le coût de leurs actions presque à néant ?
Autant de questions qui demandent réponse. Des réponses que tout le conseil
d’administration devrait donner aux opérateurs.