Exportations
Les grandes enseignes internationales qui délocalisent vers la Tunisie se
multiplient
Entretien
avec M. Férid Tounsi (PDG du CEPEX)
Quelles sont les voies de la
croissance pour les exportations tunisiennes ? Pragmatique, Férid Tounsi, le
PDG du CEPEX, plaide pour un renforcement du secteur des services et en
parallèle d’une mise à niveau accélérée du secteur de l’industrie
La révolution post industrielle est-elle synonyme de pertes d’emplois ?
Férid Tounsi : Je ne le
pense pas et ce pour les raisons suivantes : Si nous essayons de procéder à
une évaluation de la situation au plan international, nous nous rendrons
compte qu’il existe de par le monde trois catégories de pays. Le premier
groupe est formé par les pays ayant atteint un degré élevé de développement,
au sein desquels l’industrie des services génère jusqu’à 75% du PIB, c’est
notamment l’exemple des Etats-Unis et du Canada. A l’autre bout de la chaîne
existe le groupe de pays dans lesquels la part des services dans le PIB
n’excède pas 35%, et à mi-chemin se situe le groupe de pays qui, à l’instar
de la Tunisie, aspirent à l’augmentation accélérée des activités appartenant
au secteur des services, voire à faire de ce dernier la locomotive ou le
moteur de l’économie. Nous sommes sur la bonne voie pour réaliser cet
objectif, puisque le secteur contribue actuellement pour 55% du PIB et
occupe plus de 50% de la population active. Toutefois, cette orientation
économique pour un secteur des services compétitif ne signifie pas que nous
omettons de donner un élan à notre industrie. Bien au contraire, rendre
l’industrie compétitive est d’une impérieuse urgence.
Pouvez-vous
nous en donner une quelconque illustration ?
Il n’existe pas de meilleur exemple que celui de la loi 72-38 qui a créé en
1972 en Tunisie un régime particulier au profit des industries
exportatrices. Ce cadre juridique et organisationnel aura permis de créer
quelques 2.650 entreprises industrielles étrangères et à faire de la Tunisie
un site régional capable d’abriter des délocalisations massives et à forte
valeur ajoutée. Aujourd’hui, l’industrie tunisienne est engagée dans un
vaste programme de mise à niveau. Ce qui, au final, permettra non seulement
à l’appareil de production de se mettre à niveau pour faire face aux
exigences de l’environnement international, mais aussi d’accélérer la mise à
niveau des compétences des ressources humaines. Les dividendes qui en
résultent donnent naturellement lieu à un cadre favorable à la préservation
de l’emploi.
Quels sont les
mécanismes mis en place pour accompagner cette orientation?
La politique économique tunisienne s’appuie sur de nombreux mécanismes
d’aide aux entreprises exportatrices et d’accompagnement de ces dernières.
S’agissant de l’export, qui reste notre principale préoccupation, nous
disposons de programmes et de mécanismes alliant la souplesse à
l’efficacité. Il faut bien sûr inscrire dans le contexte de cette démarche
l’exemplarité de l’expérience du FAMEX, mais il faut aussi tenir compte de
la valeur ajoutée des services traditionnels que le CEPEX fournit aux
exportateurs tunisiens, telle que l’organisation de leur participation aux
actions promotionnelles tenues à l’étranger (foires, expositions, missions
commerciales…), la communication d’informations commerciales rapides et
pointues obtenues largement grâce aux supports informatisés dont nous sommes
désormais équipés, l’éclairage que nous leur donnons sur les marchés
extérieurs à travers les études que nous élaborons ou les périodiques que
nous diffusons, les conseils individualisés que nous leur fournissons, les
cycles de formation et de séminaires que nous leur offrons à La Maison de
l’Exportateur, ce nouveau local ultramoderne que nous mettons à leur
disposition.
Il faut également mettre en relief un outil fondamental auquel les
opérateurs économiques ont largement recours et qui n’est autre que le
FOPRODEX, un fonds dont le champ d’intervention est en perpétuelle évolution
compte tenu des exigences de plus en plus complexes de l’accès de nos
produits et services aux marchés extérieurs. Etant entendu qu’au-delà des
différences au niveau des mécanismes de fonctionnement, le FAMEX et le
FOPRODEX procèdent de la même philosophie car, au fond, ces deux programmes
se rejoignent et se complètent.
Le FAMEX II, dont la mise en œuvre est intervenue récemment, ne manquera
d’ailleurs pas de contribuer à asseoir la culture de l’export chez
l’entrepreneur tunisien et bien entendu de renforcer la capacité de nos
entreprises à se positionner de façon adéquate sur le marché international.
Le bilan largement positif du FAMEX I nous stimule et nous incite à
redoubler d’efforts en vue d’augmenter nos parts de marché à l’export. Ceci
est particulièrement vrai pour le secteur des services qui a commencé à
dévoiler ses formidables potentialités.
L’ingénieur tunisien est en effet à même aujourd’hui d’être, sur le plan de
l’expertise, un compétiteur sérieux pour ses concurrents étrangers et un
atout précieux pour son pays. Toutefois, nous devrions continuer à optimiser
l’exploitation de nos avantages compétitifs en général. De ce point de vue,
il apparaît essentiel pour la Tunisie de poursuivre sa vocation de site
idoine pour les délocalisations à valeur ajoutée.
Nous sommes parvenus à optimiser nos moyens pour atteindre l’objectif
poursuivi et les grandes enseignes internationales sont maintenant de plus
en plus nombreuses à entamer des opérations de délocalisations vers la
Tunisie, en se multipliant et en se développant dans les domaines clé liés
aux activités des services, tels ceux de la santé, des nouvelles
technologies, les centres d’appel, etc.
Nous encourageons en outre de regroupement des entreprises -dans le cadre de
Consortia par exemple- à titre de démarche stratégique, susceptible de doper
notre commerce extérieur et d’amoindrir les effets pervers des divers
handicaps qui entravent notre progression dans le cadre de l’entreprise en
profitant de la synergie de groupe aussi bien au niveau de la maîtrise des
coûts des actions promotionnelles qu’au niveau de la démarche
professionnelle qui peut être plus approfondie et plus ciblée.
Il est également nécessaire de mettre en place les mécanismes nécessaires au
développement d’une culture de marketing international et du réseautage ou
de ce qui peut être placidement qualifié de Networking, et notamment dans le
secteur des services qui constitue, pour la Tunisie, un important gisement
de richesse et de croissance.