Les opérateurs économiques utilisent plus et mieux le Conseil de la
Concurrence
Le nombre d’entreprises et
d’organismes ayant porté plainte devant le Conseil de la Concurrence a
sensiblement augmenté en 2004.
«La prise de conscience de la loi de la concurrence et la compréhension du
rôle du Conseil (de la Concurrence) sont plus grands». C’est là l’une des
principales conclusions du rapport annuel 2004 du Conseil de la Concurrence,
récemment remis au chef de l’Etat par M. Ghazi Jeribi, président de cette
instance. La preuve en est que les décisions d’inculpation ont dépassé en
2004 les 50% des affaires examinées, contre seulement 17% au cours de la
décennie 1992-2001, la première dans la vie du conseil.
De même, le taux d’affaires rejetées pour non compétence a baissé de 60% au
cours de cette première décennie à 10% en 2004, et les opérateurs
économiques utilisent le Conseil de la Concurrence plus que par le passé. En
effet, le nombre d’affaires enregistrées en 2004 s’est élevé à 19, «alors
que la moyenne ne dépassait pas les quatre par an » entre 1992 et 2001.
Les principaux plaignants sont les organisations professionnelles et
chambres syndicales (47%), suivies des entreprises (42%) et du ministère du
Commerce et de l’Artisanat (11%). 89% des plaintes sont le fait des
entreprises et des organismes professionnels les représentant.
47% des affaires concernent le secteur des services, «ce qui prouve le
dynamisme de ce secteur et le fait qu’il connaît actuellement des
difficultés et fait face à une concurrence illégale d’entreprises étrangères
et d’autres nationales».
En 2004, le Conseil de la Concurrence a poursuivi son effort d’adaptation
«des principaux concepts de la loi de la concurrence» au niveau du domaine
de compétence, des procédures et de l’objet.
Au niveau de la compétence, le Conseil établi que la sienne s’étend «à
toutes les pratiques portant atteinte à la concurrence et ayant des
répercussions sur le bon fonctionnement du marché, et ce quelle qu’en soit
la nature et la source».
Et l’une des affaires (n°3149) examinée en 2004, a apporté du nouveau à ce
propos dans la mesure où la partie faisant l’objet de la plainte est une
société étrangère –en l’occurrence espagnole- du secteur de la céramique non
établie en Tunisie.
A l’occasion de cette affaire, qui a vu l’entreprise incriminée se rendre
coupable de dumping afin d’exclure du marché son seul concurrent tunisien,
le Conseil de la Concurrence a jugé que «sa compétence s’étend aux pratiques
portant atteinte à la libre concurrence quelle qu’en soit la source, sans
distinction entre les entreprises installées sur le sol national et celles
qui se trouvent à l’étranger».
Au niveau des procédures, le Conseil a estimé, à l’occasion de l’une des 19
affaires examinées en 2004, que lorsqu’une affaire lui est soumise il prend
en considération le marché objet du litige dans sa totalité, ce qui lui
permet de l’examiner sous tous les angles, sans être limité «par les
parties, les causes et les demandes».
De même, le Conseil a considéré que l’abandon ou la demande de retrait de la
plainte par le plaignant ne l’oblige pas et qu’il «peut, à l’instar du juge
pénal, poursuivre l’examen de l’affaire en raison de son rapport à l’ordre
public économique».
Enfin, concernant l’objet, le Conseil de la Concurrence a pu préciser et
consacrer les notions de «prix excessivement bas», «d’entente portant
atteinte à la concurrence» et «d’utilisation excessive d’une position
dominante».
D’abord, concernant les ententes, le Conseil a établi l’existence d’une
«alliance» entre des entreprises dans le but de «porter atteinte au Fonds
National de l’Emploi 21-21», et a –dans une autre affaire- condamné à des
amendes un groupe de banques qui ont passé un accord portant atteinte à la
concurrence et imposant une commission sur des opérations de compensation
électronique.
Ensuite, à propos de l’utilisation «excessive de position dominante», le
Conseil a épinglé une entreprise de produits laitiers qui a «donné
l’illusion au consommateur d’avoir baissé ses prix, alors que la baisse
était la conséquence d’une diminution du contenu indécelable à l’œil nu».
Enfin, le Conseil est arrivé à la conclusion, en examinant l’une des
affaires concernant une entreprise publique, qu’un comportement normalement
considéré comme portant atteinte à la concurrence n’est pas rangé dans cette
catégorie «lorsqu’il prend source dans des textes législatifs et
réglementaires en vigueur».