Pacte
national de croissance économique et sociale ou pacte de croissance
économique pour l’emploi ? La nuance est certes minime, mais elle est
significative selon que l’on se trouve du côté des syndicalistes ou du
gouvernement algérien.
En effet, lors de la douzième tripartite –gouvernement, syndicat et
patronat- la volonté du gouvernement de mettre en place «un pacte de
stabilité économique et social» a débouché sur la nécessité d’aller vers un
pacte national de croissance économique et sociale, voulu et défendu par la
central patronale, rapporte le quotidien algérien d’information «La
Nouvelle République».
Notre confrère souligne que l’UGTA (la Centrale syndicale) adhère aux
réformes du gouvernement, tout en indiquant que «la cause des blocages des
réformes n’est pas… une résistance des travailleurs mais le fruit des
situations de monopole, de l’esprit rentier et bureaucratique et de
l’élargissement du champ de l’activité informelle».
Peut-on comprendre par là que la Centrale syndicale est un acteur résolu des
réformes. Mais selon le quotidien algérien, le document du «pacte de
croissance économique pour l’emploi» qu’elle a présenté «appel à un retour à
la planification stratégique comme outil efficient dans la répartition des
ressources».
Et ce n’est pas tout. Puisque l’UGTA propose «la réhabilitation de la
Commission générale de planification et de prospection en la dotant des
moyens matériels et humains pour la réussite de ses missions». Il est
également préconisé «de moderniser l’outil statistique national ainsi que la
recherche scientifique, la formation et la valorisation des qualifications,
particulièrement dans le domaine des nouvelles technologies de l’information
et de la communication, la valorisation des cadres».
En outre, le document soumis par les experts de la Centrale syndicale au
secrétariat national trace les contours pour une redéfinition d’un pacte
national de stabilité économique et social : rôle de l’Etat et la bonne
gouvernance, la place de l’entreprise et du service public, la place des
secteurs stratégiques, le rôle du secteur privé productif et de la PMI, la
promotion de la production nationale, la révision de la politique des
revenus par une revalorisation des salaires, un pacte de croissance pour
l’emploi, la lutte contre l’emploi précaire, la réorganisation du marché de
l’emploi, la promotion de la formation professionnelle, la protection de la
sécurité sociale, le retour au week-end universel, la création d’un comité
de suivi de l’application du pacte national économique et social… La liste
est longue.
Diagnostic ou mua culpa ?
Le confrère algérien souligne, par ailleurs, que le pacte national
économique et social constitue «une étape décisive dans le dialogue
économique et social entamé par les partenaires sociaux de la sphère
productive» ; étape marquée, selon les rédacteurs du document, par la
nécessité de défis pour l’Algérie tels que la globalisation économique qui
induit un bouleversement technologique de toutes les activités humaines,
l’entrée en vigueur de l’accord d’association avec l’Union européenne,
l’adhésion à l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Ces défis entraînent la concrétisation à un niveau élevé de développement
dont les racines sont indissociables à la réussite des réformes et à une
relance économique qui endigue le chômage, la pauvreté et la misère et ceux
par la mobilisation de toutes les énergies productives publique ou privées.
Il s’agit, en l’occurrence, de la concrétisation d’une relance qui
garantisse un niveau de croissance pour un développement économique et
social, global et durable. La réduction du chômage. La mise en place d’une
politique de l’emploi permettant la création d’emploi et un revenu stable
qui éradique l’exclusion sociale et la précarité. La garantie d’une
répartition juste des résultats de la croissance et l’amélioration de vie
des populations et la satisfaction essentielle de leurs besoins, en
particulier l’éducation, la formation, la santé, l’eau , l’énergie… Une
amélioration des conditions de travail et une évolution des rémunérations
qui garantit une incitation à la productivité, rapporte le journal algérien.
Une économie de marché à visage humain ou économie sociale de marché
Pour les experts de la Centrale syndicale qui considèrent qu’il existe «un
consensus» pour une économie de marché à visage humain, la fondation d’un
pacte national économique et social passe à travers un bilan objectif et
rationnel des réformes et des politiques économiques mises en application,
il y a plus d’une vingtaine d’années, mais aussi par un diagnostic rigoureux
et transparent de la situation économique de l’Algérie d’autant que
l’élaboration d’une politique économique et sociale transparente constitue
un passage obligatoire pour une stratégie de développement à long terme, et
ce, par la délimitation des secteurs et branches d’activités économiques
prioritaires du point de vue des avantages comparatifs qu’elles recèlent et
de leur capacité à créer des emplois.
La formulation d’un pacte national économique et social nécessite, selon les
experts de l’UGTA, une série de questionnements, notamment sur le rôle de
l’Etat et des mécanismes institutionnels, leviers nécessaires pour
l’économie et la place consacrée à la question sociale, la place du service
et du secteur public dans cette économie, la délimitation des secteurs
stratégiques, la place du secteur productif privé et la place des PMI et les
mesures à renforcer pour leur promotion…
Ces interrogations, estiment les auteurs du rapport, prennent en compte
l’expérience historique du développement positif de certaines expériences
comme celles de la Chine, du Japon et de la Corée du Sud mais également
l’expérience des pays développés sans omettre de s’appuyer sur la réalité
économique et sociale algérienne, loin de tout dogmatisme et toute attitude
idéologique, indique également le confrère algérien.
Dans ce type d’orientation, qu’on peut qualifier d’économie de marché mixte,
l’UGTA privilégie le secteur économique public et le privé national
productif, le développement de l’agriculture, du tourisme et les PMI,
l’objectif étant d’enrayer le chômage, l’exclusion sociale, la précarité et
assurer un pouvoir d’achat décent, l’éducation pour tous, la santé et la
juste répartition du revenu national.
La Nouvelle République note cependant que cette vision est à l’inverse de la
position gouvernementale qui justifie le blocage des salaires par l’absence
de productivité. Une réponse classique des syndicats qui estiment que seule
l’échelle mobile des salaires est à même de juguler l’augmentation des prix
et une juste répartition des richesses nationales. Il est évident que cette
contribution, qui se veut historique, ne s’éloigne pas trop de la ligne de
feu que constitue la remise en cause des réformes économiques libérales du
gouvernement même si elle écorche l’exécutif gouvernemental sur la question
des salaires et de la planification.
Enfin, concernant, le retour au week-end universel, il semble que cette
question, déjà suggérée par Ouyahia, soit un gage pour une ouverture sur les
autres questions épineuses, conclut le journal.