Afrique : le développement passe par l’intégration régionale !
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Par
Tallel BAHOURI
Certes, les pays africains sont de plus en plus conscients de la nécessité
de faire un effort accru pour augmenter leur part dans le commerce
international. Pourtant, ils demeurent tributaires de leur manque de
compétitivité et des restrictions imposées par les grandes puissances
commerciales, à commencer par les Etats-Unis.
D’ailleurs, ces derniers ont retardé, en 2002, un accord sur un meilleur
accès des pays les plus pauvres à des médicaments bon marché au sein de
l’Organisation mondiale du commerce (OMC), voulant limiter le projet à des
remèdes pour quelques maladies comme le HIV/sida ou la malaria, sous
prétexte qu’ils redoutent qu’une vaste libéralisation dans ce secteur risque
de décourager l’industrie pharmaceutique dans ses efforts de recherche et de
développement de nouveaux médicaments. Or l’OMC s’était engagée, lors de sa
conférence ministérielle tenue à Doha, en novembre 2001, à favoriser le
développement des pays pauvres.
Ceci dit, l’Organisation a déjà fait des gestes en ce sens, mais somme toute
dérisoires pour les Africains notamment.
Rappelons que l’Afrique subsaharienne ne représente aujourd’hui que 1,8 %
des échanges mondiaux, ce qui constitue, évidemment, un frein pour son développement,
d’autant plus que cela ne suffit pas à lui procurer les ressources nécessaires
pour le financer. D’où sa dépendance à l’aide internationale malgré ses
richesses naturelles et son potentiel peu exploité.
Il faut dire aussi que l’OMC a fait plusieurs tentatives pour la réussite
d’un accord devant faciliter l’accession à l’Organisation des pays les moins
avancés (PMA), qui sont majoritairement africains. Cet accord définit des
lignes directrices concernant l’accession des PMA dans quatre domaines :
accès aux marchés, règles de l’OMC, processus et assistance technique liée
au commerce et au renforcement des capacités.
Une pauvreté généralisée et persistante …
En 2001, à Doha, les pays membres de l’OMC avaient indiqué que l’intégration
des PMA dans le système commercial multilatéral et l’économie mondiale
constituait un objectif essentiel.
Or, selon son dernier rapport sur cette catégorie de pays, intitulé
«Echapper au piège de la pauvreté», la Conférence des Nations unies sur le
commerce et le développement (Cnuced) estime que la pauvreté extrême s’est à
la fois généralisée et persiste dans la plupart des PMA et que son
incidence est la plus forte chez ceux qui sont tributaires de l’exportation
de produits primaires (de base).
Alors que dans ces pays les stratégies nationales mettent en avant les
réformes, la bonne gestion et le commerce, les experts de l’organisme
onusien considèrent qu’il existe une autre possibilité importante, mais pour
l’instant sous-estimée, de réduire rapidement la pauvreté extrême par une
croissance économique soutenue.
On note cependant la participation de la Cnuced, aux côtés de l’OMC, à
plusieurs manifestations destinées à mieux préparer les Africains à faire
face à la concurrence internationale. C’est ainsi qu’un atelier spécial
avait réuni, début décembre 2004 à Genève, au siège de l’OMC, les
représentants de 21 pays africains qui ont planché sur les liens entre
commerce et investissements et sur l’examen d’une coopération multilatérale
plus étroite pour favoriser les objectifs de développement.
Pendant une semaine, les pays qui n’ont pas les moyens de siéger
de façon permanente à Genève ont été invités pour être informés sur les
secteurs faisant l’objet de négociations dans le cadre du Programme de Doha
pour le développement, notamment l’accès aux marchés, les petites économies
et l’examen des politiques commerciales.
A souligner également que plusieurs pays donateurs, dont la France, le Japon
et la Norvège, se sont engagés à encourager financièrement l’assistance
technique à quelque 16 pays africains représentant aussi bien toutes les
régions du continent que tous les degrés de développement des économies –
PMA mais aussi pays à revenus intermédiaires –, qu’ils soient francophones,
lusophones, arabophones ou anglophones.
Par ailleurs, considère-t-on aujourd’hui que les subventions aux
agriculteurs européens et américains notamment constituent le véritable
handicap pour le développement des pays du tiers monde. Mais il est
difficile voire impossible d’effacer ces aides. Ce que confirme d’ailleurs
le Nigérian Chiedu Osakwe, directeur de la division de coopération technique
de l’OMC : «Il ne faut pas uniquement réclamer l’accès aux marchés et la fin
des subventions agricoles des grands pays exportateurs comme ceux de l’Union
européenne ou les Etats-Unis, mais aussi avoir des produits compétitifs… Les
Africains ont commencé à exercer leur influence au sein de l’OMC et essayent
de définir des positions communes». Le Nigérian estime que bonne gouvernance
et bonne gestion font aussi partie des facteurs susceptibles d’accroître la
capacité commerciale de l’Afrique, aux côtés de l’amélioration des
infrastructures et de la productivité.
Quant à l’Union européenne, elle a pris la décision de voler au secours de
ses partenaires d’Afrique/Caraïbes/Pacifique (ACP) pour se préparer à intégrer
davantage le commerce international selon les règles définies par l’OMC,
quand les dérogations obtenues à la conférence de Doha arriveront à leur fin
en 2008, dans des négociations qui s’annoncent cependant aussi longues que
difficiles.
Mais dans cette kyrielle de difficultés que rencontrent les pays africains,
le Conseil des ministres des ACP, réuni en décembre à Bruxelles, avait déjà
insisté, avant la lettre, sur le fardeau de la dette qui continue d’être
insupportable et constitue une entrave majeure aux réformes, à la croissance
et au développement des pays pauvres.
Comme on le voit, l’Afrique est entrée dans une phase cruciale
d’apprentissage de l’OMC, dont l’issue est loin d’être certaine. Mais il est
clair que le continent se doit de mobiliser toute son énergie pour engranger
une part de marché dans le commerce international plus importante qu’elle
n’est aujourd’hui. De ce fait nous estimons impérative la réalisation des
intégrations économiques régionales, sans lesquelles l’Afrique risque de
demeurer au bord du commerce mondial, et donc du développement.
Tallel BAHOURY
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