Aides à l’agriculture
La promesse de George W. Bush
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Par
Tallel
BAHOURY
A
l’occasion du Sommet des Nations unies, le président américain George W.
Bush a réaffirmé, mercredi dernier, sa détermination d’abolir les
subventions agricoles et les barrières douanières aux Etats-Unis pour aider
les pays pauvres à être compétitifs sur le marché international.
Toutefois, le président a lié cette abolition à une condition : que les
autres pays développés, notamment européens, fassent de même : «Je relance
aujourd’hui un défi que j’ai déjà lancé. Il nous faut travailler ensemble
lors (du cycle de négociations commerciales multilatérales) de Doha pour
éliminer les subventions agricoles qui perturbent les relations commerciales
et ralentissent le développement», a-t-il déclaré à la tribune de l’Onu.
Et d’ajouter : «Aujourd’hui, j’élargis un peu plus ce défi en faisant cette
promesse: les Etats-Unis sont prêts à éliminer toutes les barrières
douanières, les subventions et autres obstacles pour libérer le flux des
biens et services au fur et à mesure que d’autres pays en feront de même».
Les spécialistes s’accordent à dire que la suppression des barrières
commerciales est à même de sortir des centaines de millions de personnes de
la pauvreté dans les quinze prochaines années, a souligne en substance le
président américain.
Rappelons que Washington et ses 147 pays partenaires au sein de
l’Organisation mondiale du commerce (qui en compte 148 membres) tentent
depuis fin 2001 de s’entendre sur des mesures drastiques pour libéraliser
davantage les échanges commerciaux dans le monde en espérant ainsi
contribuer à la lutte contre la pauvreté qu’ils voudraient voir réduite de
moitié d’ici 2015, selon le programme des Nations unies, communément appelé
les Objectifs du Millénaire.
Ces négociations appelées cycle de Doha (lancées au Qatar fin 2001)
éprouvent toutes les difficultés à avancer, achoppant notamment sur les
concessions attendues des pays riches en matière de subventions accordées à
leurs producteurs agricoles ; aides accusées à raison de perturbent les
échanges au détriment des producteurs des pays en développement.
Il faut dire qu’il ne s’agit pas d’une mince affaire, d’autant que les pays
industrialisés sont dans une mésentente totale sur les sacrifices qu’ils
seraient prêts à concéder.
En tout cas, les ministres de l’OMC se sont donné rendez-vous à la
mi-décembre à Hongkong pour tenter de redonner une nouvelle impulsion à ces
négociations.
En attendant, le Commissaire européen au Commerce, Peter Mandelson,
multiplie les déplacements pour tenter d’approcher les points de vue. C’est
ainsi qu’il s’est rendu à Washington la semaine dernière pour rencontre son
homologue américain Rob Portman et le secrétaire à l’agriculture Mike
Johanns. A l’issue de leur rencontre, et lors d’une conférence de presse
conjointe, MM. Portman et Mandelson «ont promis d’unir leurs efforts pour
mener ce cycle de négociations à un succès. Chacun des deux exigent
cependant de l’autre qu’il procède chez lui à des réductions des aides aux
agriculteurs».
A l’instar de MM. Portman et Mandelson, le président Bush a appelé à mener
«ces négociations de Doha jusqu’au succès». Cependant, aucun détail n’a
filtré sur le calendrier ou l’ampleur de la suppression promise des aides
aux agriculteurs américains, le chef de l’Exécutif américain se contentant
d’appeler «à abolir les murs qui séparent le monde développé de celui en
développement (…) pour que les citoyens des nations les plus pauvres
puissent offrir leurs biens et talents sur le marché mondial au même titre
que n’importe qui d’autre».
Par ailleurs, et puisque les négociations commerciales constituent un tout
–difficilement séparable- on voit mal comment le Cycle de Doha pourrait être
couronné de succès. Pour l’heure, le bras de fer continue entre Américains
et Chinois sur les produits textiles sur lesquels les Etats-Unis ont
récemment pris une série de mesures de sauvegarde contre le flux des
importations de vêtements made in China, et s’opposent aussi à leurs
partenaires européens devant l’instance onusienne de commerce dans une série
de litiges, dont celui sur les subventions à leurs constructeurs
aéronautiques respectifs Boeing et Airbus.
On se rappellera également que le président Bush n’avait pas hésité à
frapper de lourdes taxes douanières les importations d’acier quand il
s’agissait d’aider les sidérurgistes américains.
Voilà des éléments qui n’augurent pas une issue heureuse au cycle de Doha et
laissent perplexe plus d’un, à commencer par les pays en développement
victimes expiatoires du commerce international et donc de la mondialisation.
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