Textile : TX7, un consortium sans lendemain ?

Par : Autres

 

Réaction à l’article :

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textil.gifMonsieur
Mahroug,

J’ai lu avec intérêt et attention votre article relatif au consortium TX7,
intitulé ‘’Textile : TX7, un consortium sans lendemain ?’’.

 

Etant un
consultant ONUDI chargé de l’accompagnement du développement des consortiums
en Tunisie, votre article m’a interpellé et m’a inspiré quelques
commentaires et éclaircissements :

1. Votre article s’apparente à une interview du conseiller-export ayant
coordonné des activités communes du groupe à la demande des membres de ce
dernier. Il se trouve que cette coordination a été suscitée et subventionnée
au départ par le FAMEX dans le cadre d’une action d’assistance technique
groupée initiée début 2004 (une expérience d’alliance qui dure depuis 21
mois déjà !). Au passage, je tiens à saluer le FAMEX pour cette initiative
qui vient renforcer les initiatives du BMN (Bureau de Mise à Niveau) et de
l’ONUDI pour la promotion du concept depuis l’an 2000 ! la collaboration
entre les institutions de différents ministères commencent aussi à se
concrétiser en Tunisie !

2. D’après votre article, j’ai compris que la relation contractuelle du
conseiller-export en question avec certains membres de TX7 est très tendue
et que celui-ci relève un problème de cohérence entre les membres du groupe
TX7.

Parallèlement, aucune enquête n’a apparemment été menée par vos soins auprès
des autres protagonistes, les chefs d’entreprise membres et créateurs de ce
consortium, pour comprendre les raisons de leurs éventuels désaccords avec
le conseiller export et avec les agents internationaux qu’il leur a
sélectionnés ou, éventuellement, entre leurs collègues membres du groupe.

3. Un consortium est une alliance qui a la particularité d’être très
flexible et dans laquelle l’entrée et la sortie doivent pouvoir se faire en
douceur, sans difficulté ni tapage. C’est un corps vivant, une entreprise
généralement à durée de vie limitée, un outil pour expérimenter une
collaboration et mener un projet commun entre plusieurs PME. Pour les
consortiums de bureaux d’étude par exemple, la durée de vie d’un consortium
peut être celle d’un unique marché que les membres ont approché, gagné et
piloté ensemble. Pour un consortium de promotion des exportations cela dure
généralement quelques années au cours desquelles toutes les combinaisons
sont possibles :

– Une sortie de membres qui ont tellement réussi et grandi que les services
du consortium ne répondent plus à leurs besoins ;

– Une sortie de membres qui n’arrivent pas à suivre le rythme du groupe et à
réaliser des affaires : qualité du produit inadaptée, non-compétitivité de
prix, difficultés financières, incapacité à accepter le consensus,
non-disponibilité de ressources et de temps, etc.

– L’entrée de nouveaux membres cooptés par les fondateurs ;

– La cessation pure et simple d’existence de tout le consortium par décision
collective des membres ;

– La fusion entre certaines entreprises membres, etc.

Ce sont là des pratiques et des situations courantes qui se rencontrent tous
les jours dans les pays qui nous ont précédé dans le domaine : Italie,
Espagne, pays nordiques et aussi Argentine, Inde… Aussi, si des
difficultés sont rencontrées au sein de tel ou tel consortium, il n’y a pas
de quoi s’alarmer sur «la mentalité» des tunisiens, encore moins de
planifier des «révolutions» –de l’extérieur- dans la culture de nos chefs
d’entreprises.

4. Au contraire, je pense que, par ces temps difficiles, nous devons saluer
l’effort de ces dizaines d’entrepreneurs de PME qui ont essayé et
quelquefois réussi à concrétiser des alliances : c’est toujours au prix de
sacrifices en temps, en réflexions stratégiques communes et en recherche de
consensus… Quand cela réussit, c’est à leur honneur et quand le projet
trébuche, Ils auront eu le mérite d’essayer et la chance d’avoir acquis une
expérience nouvelle. Souvent, en Tunisie comme ailleurs, la mort d’une
alliance est l’occasion d’une ou de plusieurs naissances d’alliances plus
cohérentes et plus fortes.

5. Les conseillers- export qui ont choisi de jouer le rôle d’appuyer
l’éclosion de ce genre d’alliances, se doivent d’analyser les causes des
difficultés et faillites au même titre que les facteurs qui ont été à
l’origine des succès et ce, pour capitaliser sur les erreurs et mieux
conseiller les groupes en construction. L’expérience tunisienne en la
matière est récente mais déjà, nous accumulons des leçons et des
savoir-faire.

La première leçon que nous avons apprise est que l’étape de sélection du
groupe de fondateurs et de formulation de ses objectifs est cruciale :
cohérence de taille, de nature et de qualité de produits, de marché de
destination, de capacités financières et de stratégies d’investissement sont
des facteurs de succès à analyser et à prendre en compte impérativement.

A–t- on effectué cette analyse stratégique au moment de l’initiation du
groupe TX7 ? A–t-on essayé de reconfigurer le groupe après les premières
expériences communes autour d’objectifs clairement formulés et d’un budget
formellement adopté ?

Prenons l’exemple de GET IT, le consortium des technologies de l’information
qui a été initié au départ dans les mêmes conditions que TX7 : les neuf
entreprises qui ont fait le départ ensemble n’ont pas toutes poursuivi le
chemin jusqu’à la constitution du groupement ; il y a eu des départs bien
réfléchis et des critères de sélection des nouveaux membres ont été
convenus. Une réflexion stratégique intense a eu lieu et un règlement
intérieur, spécifiant entre autre les modalités d’administration et de
financement de l’activité a été élaboré et signé avant la signature des
statuts ! Vous conviendrez que ce sont là des gages incontournables de
succès.

S’agissant de TX7, nous ne manquerons pas d’enquêter sur les causes
objectives des éventuelles tensions, comme on l’a fait pour d’autres
groupements. Si vous le souhaitez et sauf objection de la part des membres
de TX7, nous pourrons vous livrer les résultats publiables de notre
investigation.

6. Nous pourrons aussi vous informer sur les autres tentatives, réussites et
difficultés et …. surtout leçons à retenir de la toute petite expérience
tunisienne pour servir au mieux vos lecteurs. Ainsi 10 consortiums
(représentant 60 entreprises) ont été constitués juridiquement et ont
sollicité notre conseil à un moment ou un autre de leur parcours ; les ¾
entre 2004 et courant 2005. Combien en restera t il en 2006 ? Quelle sera la
dynamique de renforcement, recomposition et aléas de ces alliances ?
l’avenir nous le dira.

Mais une chose est certaine, les pays qui nous ont précédé dans ces
processus ont gagné en compétitivité au bout de difficultés similaires aux
nôtres.

Dans cette affaire, et grâce au benchmarking favorisé par l’ONUDI, mes
rencontres avec les experts de pays de tous les continents m’ont appris que
les difficultés de création des alliances entre petites entreprises,
appelées souvent à tord «difficultés culturelles» sont similaires partout et
elles sont plutôt d’origine méthodologique et stratégique, d’adaptation des
produits aux standards des marchés ciblés, de déficience de l’environnement
juridique et institutionnel, etc.

 

 

T.CH