Gazprom hausse le ton face à l’Europe et menace d’exporter son gaz ailleurs

Par : Autres

 

Gazprom hausse le ton face à
l’Europe et menace d’exporter son gaz ailleurs

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Vue extérieure du siège
de Gazprom le 2 janvier 2006 à Moscou

Devant la menace du géant russe semi-public
Gazprom de réorienter ses exportations vers d’autres marchés que l’Europe si
l’UE s’avisait de contrarier ses projets d’expansion, la Commission
européenne a enjoint le groupe jeudi de “respecter ses engagements
commerciaux”.

 

La diversification des marchés “ne doit pas
être utilisée à d’autres fins” qu’économiques, a averti un porte-parole de
la Commission à Bruxelles.

 

“Les tentatives de limiter l’activité de
Gazprom sur le marché européen et de politiser les questions gazières (…)
ne déboucheront pas sur de bons résultats”, avait averti Gazprom dans un
communiqué cinglant publié sur son site internet après une rencontre mardi
du patron du groupe, Alexeï Miller, avec les ambassadeurs des pays de
l’Union européenne.

 

Cette réunion organisée à Moscou par
l’ambassade d’Autriche, qui préside l’UE, a été marquée par un discours de
plus d’une heure du patron de Gazprom, a indiqué une source diplomatique.

 

La pomme de discorde entre l’UE et le groupe
gazier serait le projet du gouvernement britannique, révélé par le Financial
Times, de réviser une loi sur les fusions afin de contrer une éventuelle
acquisition de Centrica, principal distributeur de gaz en Grande-Bretagne,
par Gazprom.

 

“Ces déclarations de Gazprom sont une réponse à
cette tentative de pression politique” de la part de Londres, alors que ce
pays est habituellement le champion de la défense du libéralisme en Europe,
relève Timofeï Bordatchev, analyste de la revue Russie dans la politique
globale.

 

Le groupe a mis en garde ses partenaires
européens contre une réorientation possible de ses exportations de gaz, à un
moment où la “concurrence pour les ressources énergétiques augmente”.

 

Le groupe dispose “des plus grandes réserves
d’hydrocarbures et est capable de répondre de façon fiable à la demande en
hausse en Europe”, mais “il ne faut pas oublier que (Gazprom) explore
activement de nouveaux marchés comme l’Amérique du Nord et la Chine”,
relève-t-il.

 

Un quart des importations de gaz de l’UE
proviennent de Russie, cette dépendance étant encore plus marquée pour
certains pays d’Europe de l’Est, la Finlande ou l’Allemagne.

 

Gazprom, premier producteur mondial de gaz,
veut désormais se développer sur le marché de la distribution et du
transport du gaz en Europe, mais les Européens sont généralement réticents à
céder des actifs clefs pour leur sécurité énergétique.

 

L’UE a pris brutalement conscience des risques
que représente sa dépendance énergétique envers ce géant gazier, véritable
bras énergétique du Kremlin, à l’occasion de la guerre du gaz qui a opposé
la Russie à l’Ukraine début janvier.

 

Face au refus de Kiev d’accepter un relèvement
radical des prix du gaz russe, Gazprom avait suspendu ses livraisons vers ce
pays essentiel au transit du gaz vers l’Europe, provoquant une baisse des
approvisionnements dans certains Etats de l’UE.

 

Gazprom n’a pas la possibilité de réorienter à
court terme ses flux d’exportations puisque presque tout le réseau de
gazoducs russes est dirigé vers l’Europe. Mais les futurs gazoducs que la
Russie s’apprête à construire sont d’ores et déjà destinés à la Chine et à
l’Asie-Pacifique.

 

Les Européens insistent dans leurs discussions
concernant l’énergie avec Moscou sur un principe de réciprocité, proposant
de laisser le géant gazier se renforcer sur leur marché en échange
d’assurances quant à la levée du monopole de Gazprom sur le système de
gazoducs russes, ce qui pourrait permettre aux groupes européens d’extraire
du gaz en Russie.

 

La doctrine de Moscou est différente : il mise
sur des échanges d’actifs entre compagnies, proposant aux Occidentaux
d’exploiter certains gisements russes contre la cession d’actifs en Europe
qui lui permettraient de contrôler toute la chaîne de distribution du gaz
jusqu’au consommateur final.

 

 

© AFP 2006

Photo : Yuri Kadobnov