FMI: les pays émergents vont
avoir davantage voix au chapitre
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Rodrigo Rato, le
directeur général du FMI, à Washington, le 20 avril 2006
Les pays émergents vont avoir plus de pouvoir
au sein du FMI après le lancement d’une réforme qui a dominé les réunions
financières de printemps à Washington, également marquées par des critiques
contre la Chine et une inquiétude croissante face au pétrole cher.
Il y a “nécessité de sauvegarder l’efficacité
et la crédibilité du Fonds monétaire international”, a justifié au cours du
week-end l’organe dirigeant de l’institution de Bretton Woods.
Créé en 1944 pour éviter les erreurs de
l’entre-deux guerre (dévaluations compétitives, protectionnisme) ayant
conduit à la récession, le FMI est contraint de s’adapter à la nouvelle
donne de l’économie mondiale. Sous peine de tomber en désuétude à un moment
où les pays en développement ont moins besoin de ses prêts grâce à la forte
croissance mondiale.
Le directeur général de l’organisation,
l’Espagnol Rodrigo Rato, a donc été mandaté à Washington par les 184 pays
membre pour renforcer l’influence des économies émergentes, asiatiques en
particulier.
Il devra présenter lors de l’assemblée annuelle
de Singapour en septembre des propositions de réforme du calcul des
quote-parts des Etats membres, qui déterminent leurs droits de vote au sein
de l’exécutif.
La quote-part de la Chine est à peine
supérieure (3%) à celle des Pays-Bas, celle de l’Inde même inférieure. La
liste des bénéficiaire comprendra au moins la Chine, le Mexique, la Corée du
sud et la Turquie.
Dans un deuxième temps, le FMI devra proposer
une remise à plat plus large des quotes-parts et de son fonctionnement.
C’est là que les négociations s’annoncent les plus difficiles, surtout entre
Américains et Européens.
Autre chantier mis en route: la mission du FMI
va être élargie. Au lieu de se cantonner à examiner les situations
économiques de chaque pays de manière isolée, il pourra faire de la
“surveillance multilatérale”, c’est à dire concrètement épingler un pays
lorsque la politique qu’il mène a des effets négatifs sur les autres.
Les Etats-Unis risquent d’en pâtir en raison de
l’accumulation de leurs déficits. Mais ils espèrent aussi que cela permettra
au Fonds d’accentuer la pression sur la Chine pour qu’elle cesse de
maintenir sa monnaie à un niveau artificiellement bas.
Sur ce point, les ministres des Finances du G7,
réunis en marge des assemblées, ont d’ailleurs durci le ton en invitant
explicitement Pékin à réévaluer le yuan, dont le taux de change est
considéré comme un avantage indû pour ses exportateurs.
Une réévaluation est désormais “essentielle”,
ont-ils dit, sans impressionner outre-mesure la délégation chinoise.
Il est de même peu probable que les appels
lancés au cours du week-end par le G7-Finances et le FMI aux pays
producteurs de pétrole pour qu’ils augmentent leurs capacités de production,
afin de calmer la flambée des cours, soient plus fructueux.
La hausse des prix, qui ont dépassé 75 dollars
le baril, constituent un “risque” pour la croissance mondiale, selon les
deux forums.
Mais l’Opep a une nouvelle fois plaidé non
coupable ce week-end en estimant que le marché était déjà “bien
approvisionné”.
Les pays pétroliers ont été aussi pointés du
doigt dimanche lors de la réunion de la Banque mondiale. L’Allemagne a
suggéré qu’ils aident avec leurs pétrodollars les pays africains à
développer les énergies renouvelables pour réduire leurs factures
d’hydrocarbures.
Et ce dans le cadre d’un programme d’aide au
financement de la Banque pour promouvoir les énergies propres dans les pays
pauvres. L’institution a aussi annoncé un renforcement de la lutte
anti-corruption, thème cher à son président américain Paul Wolfowitz, en
n’oubliant pas les “corrupteurs” des pays riches.