La planète pétrole
s’interroge, l’Opep va tenter de rassurer
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Cheikh Tamim bin Hamad
al-Thani, prince-héritier du Qatar, état membre de l’Opep, au Forum
international de l’énergie à Doha, le 24 avril 2006
L’Opep, réunie à Doha en marge du Forum
international de l’énergie, est en quête du ton juste pour calmer la flambée
des cours du pétrole, tandis que pays consommateurs et producteurs d’énergie
continuent de dialoguer dans l’espoir de prévenir de futures crises.
Les onze pays membres du cartel “feront ce
qu’ils ont à faire”, le cas échéant via une “déclaration rassurante” pour
calmer le marché, a déclaré peu avant leur réunion le président
l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), le Nigérian Edmund
Daukoru.
Ils devraient notamment examiner une
proposition koweïtienne de réactiver une mesure prise en septembre après
l’ouragan Katrina aux Etats-Unis. Il s’agit de fournir au marché, s’il le
demande, les 2 millions de barils par jour (mbj) supplémentaires qu’elle
peut encore fournir.
En d’autres termes, cela reviendrait à
suspendre le plafond de production, actuellement fixé à 28 millions de
barils par jour (hors Irak).
Le ministre koweïtien cheikh Ahmad Fahd
al-Sabah a assuré lundi avoir reçu un certain soutien parmi ses collègues.
Il n’est cependant pas certain qu’une telle
mesure, si elle est acceptée, suffise à enrayer la spirale des cours qui, de
l’avis général, n’ont rien à voir avec l’approvisionnement physique du
marché, car celui-ci regorge de brut.
“C’est le marché qui détermine le prix”, a
déclaré le ministre saoudien du Pétrole, Ali al-Nouaïmi. “Que voulez-vous
que nous fassions ? Vous savez comme moi que si le cours est là où il est,
ce n’est pas à cause de pénuries d’approvisionnement”, a-t-il ajouté.
Cela ne devrait pas empêcher le secrétaire
américain à l’Energie, Samuel Bodman, d'”encourager” une nouvelle fois lors
du forum les pays producteurs à pomper davantage.
“Clairement, ces prix du pétrole très élevés
causent un grand bouleversement dans le monde, ils sont très douloureux
(…) partout dans le monde. C’est très certainement vrai pour mon pays”,
a-t-il déploré.
Parallèlement, les ministres et responsables de
la soixantaine de pays et d’organisations internationales présentes au forum
poursuivaient lundi leur quête d’une stratégie commune face aux défis
colossaux que tous les experts prédisent au secteur de l’énergie.
“Tout le monde est d’accord sur l’analyse
commune de la production et de la demande. C’est après que cela devient
intéressant”, résume le ministre français délégué à l’industrie, François
Loos.
Bien qu’aucune pénurie n’ait été ressentie, les
cours du brut sont à la fois trop élevés et trop volatiles, et cette
constante incertitude est nuisible aux producteurs comme aux consommateurs,
estiment les ministres.
Mais le consensus s’arrête là. L’Iran et les
Etats-Unis, en plein bras de fer autour du dossier nucléaire iranien, se
renvoient ainsi mutuellement la responsabilité des inquiétudes géopolitiques
qui perturbent les marchés pétroliers et renchérissent les cours.
Et pour le moyen et long terme, les pays
consommateurs et producteurs se réclament mutuellement davantage
d’investissements et l’établissement d’une “feuille de route”.
Chaque camp exige davantage de sécurité, les
premiers pour préserver leurs économies des ravages de cours trop élevés et
les seconds pour s’assurer que les lourds investissements qu’ils devront
consentir pour accroître leur production seront rentabilisés.
Quoiqu’il en soit, les tensions créées par
plusieurs années de sous-investissement risquent de perdurer plusieurs
années, prévient le directeur général de l’Agence internationale de
l’énergie, Claude Mandil: “Le marché va continuer d’être caractérisé par
l’incertitude sur cette période”, a-t-il estimé.