Exportations de gaz russe:
Poutine s’explique lors d’un sommet avec Merkel
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Le président russe
Vladimir Poutine et la chancelière allemande Angela Merkel, le 27
avril 2006 lors d’un sommet à Tomsk en Russie
Le président russe Vladimir Poutine a démenti
jeudi, lors d’un sommet avec la chancelière allemande Angela Merkel, vouloir
réduire les exportations de gaz russe vers l’Europe mais exigé que les
compagnies russes soient traitées comme des partenaires à part entière.
Ce 8e sommet russo-allemand, mercredi et jeudi
à Tomsk, en Sibérie occidentale, a été dominé par les questions énergétiques
même si la crise iranienne a inévitablement figuré au menu des discussions,
à la veille de la date-butoir fixée par l’Onu à Téhéran pour suspendre son
enrichissement d’uranium.
Ce n’est pas la Russie qui menace l’Europe mais
l’inverse, a expliqué M. Poutine, faisant allusion aux difficultés d’accès
des compagnies russes au marché européen de la distribution de gaz.
“Nous le percevons comme une menace et nous
commençons à chercher d’autres débouchés”, a lancé M. Poutine lors d’une
conférence de presse commune avec la chancelière.
“Cela ne veut pas dire que la Russie va limiter
ses livraisons à l’Europe. Pour nous, l’Europe est un partenaire naturel et
le plus proche”, a-t-il toutefois ajouté.
Moscou a suscité une vive inquiétude ces
derniers jours en menaçant de “réorienter” ses exportations de gaz vers
l’Amérique du Nord ou l’Asie si l’Europe contrarie ses projets commerciaux
–dans la distribution de gaz notamment — sur le continent européen.
Mme Merkel a aussi mis la question énergétique
sur la table – “la Russie doit rester un partenaire fiable”, a-t-elle dit,
en notant que cette question faisait l’objet d’une “très vive discussion” en
Europe – mais n’a pas répondu à la charge du président russe sur la “menace”
venue de l’Ouest.
La chancelière avait promis, dès sa première
rencontre avec M. Poutine en janvier, que les relations germano-russes
seraient “franches” et “directes”.
Elle avait alors évoqué les questions qui
fâchent, Tchétchénie et droits de l’Homme en Russie, deux thèmes qui n’ont
pas été cette fois à l’ordre du jour.
Les deux leaders ont affiché leur bonne
entente, évoquant les trois heures passées à table mercredi soir à déguster
cuisine sibérienne et viande d’ours.
Mais le pragmatisme était surtout au
rendez-vous, loin des relations d’amitiés qui liaient M. Poutine à l’ancien
chancelier Gerhard Schroeder.
Sur le nucléaire iranien, M. Poutine et Mme
Merkel ont préconisé la même approche : poursuite des “voies diplomatiques”
et action “coordonnée” de la communauté internationale, rejetant de facto
toute action isolée des Etats-Unis.
Le président russe a rappelé le credo de la
diplomatie russe en estimant que l’Agence internationale de l’énergie
atomique (AIEA) devait garder “le rôle clé” dans le règlement de la crise et
“ne pas s’en décharger sur le Conseil de sécurité de l’Onu”.
Les questions internationales n’ont été
évoquées qu’au deuxième jour du sommet alors que les deux délégations se
sont préoccupées dès le début de l’énergie et que les délégations
bruissaient de rumeurs sur la conclusion d’un important contrat gazier.
De fait, le géant allemand BASF a signé avec le
russe Gazprom un accord hautement symbolique qui va l’associer à
l’exploitation d’un gros gisement gazier en Russie, une première pour une
entreprise étrangère.
En contrepartie, Gazprom a obtenu 15% de plus
au capital de l’allemand Wingas, une filiale de BASF active dans la
distribution de gaz en Europe. Le russe détient désormais 50% de Wingas.
“Un accord modèle”, a commenté le président
russe, trop heureux de citer le contrat en exemple alors que Londres semble
opposé à une éventuelle acquisition de Centrica, principal distributeur de
gaz en Grande-Bretagne, par Gazprom.
M. Poutine a par ailleurs proposé de
“rembourser entièrement” cette année le reste de la dette de Moscou à
l’égard du Club de Paris, en “espérant” que l’Allemagne – plus intéressée
par les intérêts à engranger – accepte cette proposition.