La Bolivie annonce la nationalisation de ses hydrocarbures

Par : Autres

 

La Bolivie annonce la
nationalisation de ses hydrocarbures

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Des soldats boliviens
prennent le contrôle de l’usine de gaz YPFB Senkata à El Alto, le 1er
mai 2006

Le président de Bolivie, Evo Morales, a annoncé
lundi la nationalisation de tous les hydrocarbures du pays, où l’armée a
pris le contrôle des gisements gaziers et pétroliers.

 

Une vague d’autres nationalisations à venir été
annoncée dans la soirée par le chef de l’Etat, s’adressant à une importante
foule réunie sur la place Murillo à La Paz.

 

“Nous avons commencé à nationaliser les
hydrocarbures, demain ce seront les mines, les forêts et toutes les
ressources naturelles”, a lancé M. Morales du balcon du palais Quemado,
siège du gouvernement.

 

Dans la journée, Evo Morales a expliqué que les
gisements d’hydrocarbures passaient désormais dans le giron de la compagnie
publique nationale YPFB, lors d’une cérémonie à Carapari, dans le sud du
pays.

 

“L’Etat récupère la propriété, la possession et
le contrôle total et absolu de ces ressources”, a déclaré M. Morales,
donnant lecture du décret de nationalisation édicté par son gouvernement en
vertu de la “souveraineté nationale”.

 

Un délai de 180 jours a été donné aux
compagnies pétrolières étrangères opérant dans le pays pour régulariser leur
situation, à travers de nouveaux contrats d’exploitation.

 

“A la fin de ce délai, les compagnies qui
n’auront pas signé leurs nouveaux contrats ne pourront plus continuer à
opérer dans le pays”, a averti M. Morales qui a dit miser sur cette
“véritable nationalisation” pour redresser l’économie bolivienne.

 

La mesure concerne quelque 26 compagnies
étrangères dont Repsol (Espagne), Total (France), Exxon (Etats-Unis),
British Gas (GB), Petrobras (Brésil), implantées dans le pays qui détient
après le Venezuela les deuxièmes réserves de gaz d’Amérique du Sud, estimées
à environ 1.550 milliards de mètres cubes.

 

La Bolivie qui produit en outre 40.000 barils
de pétrole par jour, est la nation la plus pauvre du sous-continent et la
misère y touche 70% de la population. L’exploitation des hydrocarbures
représente 15% de son PIB.

 

Les compagnies étrangères “sont obligées de
remettre la propriété et toute la production des hydrocarbures à YPFB”, a
souligné M. Morales. Le décret impose aussi aux compagnies étrangères une
nouvelle répartition des revenus pétroliers, réservant une part de 82% à
l’Etat.

 

Cet accroissement de la part de l’Etat doit
notamment “couvrir le coût de l’exploitation et les investissement”, a
expliqué le président bolivien.

 

La compagnie nationale YPFB “assume la
commercialisation, définit les conditions, les volumes et les prix, tant
pour le marché intérieur que pour l’exportation”, a poursuivi le chef de
l’Etat.

 

Aussitôt après les déclarations de M. Morales,
le commandement général de l’armée bolivienne a annoncé que des militaires
avaient pris le contrôle des gisements d’hydrocarbures.

 

Cette mesure a pour but d'”assurer le
fonctionnement des structures de production pour garantir
l’approvisionnement”, remplir les engagements internationaux et alimenter le
marché national, précise l’armée qui a salué cette “nationalisation
intelligente”.

 

Le président Morales, qui s’est rendu dans les
principales régions productrices, Santa Cruz, Tarija et Cochabamba, où la
population est venue lui témoigner son soutien, a souligné qu’il “ferait
respecter par la force” cette décision, précisant que les militaires
contrôlaient 56 gisements d’hydrocarbures.

 

Ancien dirigeant du Mouvement vers le
socialisme (MAS) et chef des producteurs de coca, Evo Morales, premier
indien élu à la tête de la Bolivie, a souvent annoncé son intention de
nationaliser les hydrocarbures, une exigence exprimée à maintes reprises par
la population indigène.

 

Le président bolivien n’avait jusqu’ici pas
précisé les modalités de cette mesure. Elle se situe dans le droit fil de la
loi sur les hydrocarbures adoptée –bien avant son arrivée au pouvoir– en
mai 2005 par le parlement bolivien, qui avait relevé à 50% les impôts et
royalties à verser par les compagnies étrangères et avait restitué à l’Etat
le contrôle de la production de ces ressources.

 

Le ministre brésilien des Mines et de
l’Energie, Silas Rondeau, a qualifié de “geste inamical” la nationalisation
de tous les hydrocarbures boliviens.

 

Le gouvernement espagnol a quant à lui exprimé
sa “profonde préoccupation”.

 

A New York, les prix du pétrole ont nettement
monté lundi, repassant au-dessus de 73 dollars le baril, accentuant leur
progression après l’annonce par la Bolivie de la nationalisation de ses
champs d’hydrocarbures.

 

 

 

© AFP 2006

Photo : Javier Mamani