La Bolivie soumise à la
pression internationale pour ses hydrocarbures
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Le président bolivien
Evo Morales (c) après l’annonce de la nationalisation des
hydrocarbures, à Carapari dans le sud du pays, le 1er mai 2006
La Bolivie continuait mercredi à répondre à la
pression internationale exercée après la nationalisation de ses
hydrocarbures, une mesure soutenue par la population qui suscite une forte
préoccupation à l’étranger malgré des tentatives d’apaisement.
Le président bolivien Evo Morales a tenté de
rassurer l’opinion, assurant que le décret n’entraînait “aucune
confiscation, ni expropriation des biens des entreprises pétrolières”, lors
d’une interview mardi soir à la chaîne internationale Telesur de Caracas.
Dans un entretien à CNN, il a aussi réaffirmé
qu’il s’agissait d’une “décision souveraine”, niant avoir été conseillé par
le président vénézuélien Hugo Chavez, dont la venue a été annoncée mercredi
à La Paz.
Le chef d’Etat bolivien se réunira jeudi à
Puerto Iguazu (Argentine) avec ses homologues brésilien, argentin et
vénézuélien, pour parvenir à un accord préservant les intérêts de ses
partenaires régionaux.
Quelque 26 multinationales dont Repsol
(Espagne), Total (France), Exxon (Etats-Unis), British Gas (GB), Petrobras
(Brésil), sont visées par le décret du gouvernement bolivien qui leur impose
de remettre la propriété des gisements et l’exploitation à la compagnie
publique bolivienne YPFB.
Le président de YPFB Alvarado Rivas a demandé
mercredi à l’Argentine et au Brésil, dont il a garanti l’approvisionnement
en gaz, de faire preuve de “compréhension”, admettant la “préoccupation
logique” suscitée par cette mesure “patriotique”.
Le président brésilien Luiz Inacio Lula da
Silva, dont le pays dépend de la Bolivie pour la moitié de sa consommation
de gaz, a déjà exclu mercredi une “crise Brésil-Bolivie”.
La compagnie brésilienne Petrobras a annoncé la
suspension de ses investissements en Bolivie, annulant le projet d’augmenter
de 15 millions de m3 par jour la quantité de gaz importée du pays.
“Nous suspendons toute possibilité de nouveaux
investissements en Bolivie”, a déclaré le président de la compagnie Sergio
Gabrielli, soulignant que le Brésil n’accepterait pas de modification des
prix hors des normes en vigueur dans les contrats.
La Chambre bolivienne des hydrocarbures, qui
regroupe les compagnies étrangères opérant dans le pays, a appelé à un
“dialogue productif”, tout en déplorant une nationalisation qui “altère de
manière unilatérale, négative et substantielle les conditions des
entreprises”. Les compagnies étrangères “sont en train d’analyser les
impacts et conséquences de la mesure”, précise l’organisme patronal,
déplorant que la Bolivie n’ait “pas pris en compte la stabilité juridique et
la promotion de l’investissement”.
L’UE a aussi exprimé mercredi son “inquiétude”,
invitant La Paz à “une collaboration durable avec les entreprises concernées
à travers un dialogue actif et efficace”.
Le ministre autrichien de l’Economie Martin
Bartenstein, dont le pays assure la présidence de l’UE, et le commissaire
européen à l’Energie, Andris Piebalgs, ont espéré que la Bolivie agisse “de
manière à maintenir la confiance des investisseurs”.
L’Espagne s’apprête à envoyer “dans les
prochains jours” une délégation politico-technique en Bolivie pour obtenir
des éclaircissements sur cette nationalisation, qui concerne notamment le
pétrolier espagnol Repsol YPF.
Le secrétaire d’Etat espagnol aux Affaires
étrangères, Bernardino Léon, a stigmatisé mercredi “une certaine confusion”
et déploré “des messages qui ne sont pas les meilleurs pour la communauté
internationale”.
Le chef du gouvernement espagnol José Luis
Rodriguez Zapatero, qui avait toujours apporté son soutien au président
Morales, a toutefois évoqué un “conflit ponctuel”, affirmant que le “peuple
bolivien aurait toujours l’Espagne à ses côtés”.
Même s’il a admis que la nationalisation
pouvait “poser des problèmes”, il a écarté tout changement dans la politique
d’aide au développement de Madrid, qui s’est engagé en janvier à éliminer
une grande partie de la dette de la Bolivie.
Sur la scène internationale, les Etats-Unis se
sont montrés plus attentistes, rappelant toutefois dès mardi à la Bolivie
ses “obligations contractuelles” et l’avertissant de “l’impact éventuel sur
l’environnement général des investissements dans le pays”.