Gaz bolivien: apaisement
entre les 4, renégociation des prix en vue
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Un soldat bolivien
monte la garde devant une station-service à Santa Cruz, en Bolivie, le
3 mai 2006
Le sommet convoqué en urgence jeudi à Puerto
Iguazu (Argentine) a permis d’apaiser les tensions entre Bolivie, Brésil et
Argentine, la Paz ayant promis de garantir les livraisons de gaz à ses
voisins tout en obtenant une renégociation inespérée des tarifs actuellement
très favorables à ses clients.
“La fourniture de gaz est garantie”, s’est
réjoui le président argentin Nestor Kirchner, au terme de cinq heures de
discussions avec ses homologues bolivien Evo Morales, brésilien Luis Inacio
Lula da Silva et vénézuélien Hugo Chavez.
Il avait organisé cette réunion de crise à la
demande expresse de Lula, très inquiet après l’annonce lundi par La Paz de
la “nationalisation” du gaz bolivien, dont le Brésil dépend pour 50% de ses
besoins.
Lula s’est également félicité que “les
livraisons de gaz soient assurées” tout en annonçant des négociations
bilatérales (Argentine-Bolivie et Brésil-Bolivie) sur les tarifs.
“Les nouveaux prix seront discutés de la
manière la plus démocratique possible”, a dit Lula, reconnaissant “la
situation difficile de la Bolivie et du président Evo Morales”.
Ce pays possède la deuxième plus grande réserve
de gaz d’Amérique du Sud derrière le Venezuela mais c’est aussi le plus
pauvre de la région avec 70% de nécessiteux. M. Morales était soumis à de
fortes pressions internes pour “nationaliser” le gaz, sa principale promesse
électorale.
Le déploiement de l’armée dans les 56 gisements
et infrastructures de Bolivie lundi a pris de court le Brésil qui l’a
qualifié de “geste inamical” et mercredi, la compagnie d’Etat Petrobras a
annoncé l’annulation d’investissements prévus pour accroître les
importations de gaz (de 15 millions de mètres cubes).
Lula était arrivé à Puerto Iguazu avec
l’intention de défendre fermement les intérêts brésiliens. La renégociation
des tarifs du gaz contredit cependant la position du patron de Petrobras
Sergio Gabrielli qui avait exclu toute modification des prix. Pour le
contrat expirant en 2019, le Brésil verse 3,80 dollars pour mille mètres
cubes de gaz alors qu’aux Etats-Unis, les tarifs sont au moins quatre fois
supérieurs.
Petrobras espérait obtenir un “traitement
différencié” en Bolivie parce qu’il y a investi 1,5 milliard de dollars. Le
Brésil reçoit quotidiennement 30 millions de mètres cubes de gaz bolivien,
qui alimente à 70% le poumon économique de Sao Paulo et à 100% le sud du
pays.
Dans la déclaration finale de Puerto Iguazu,
les quatre présidents affirment que les nouveaux tarifs devront chercher “un
développement équilibré entre pays producteurs et consommateurs”, tout en
admettant que “la discussion doit s’inscrire dans un cadre rationnel et
équitable qui viabilise les investissements”.
Le président vénézuélien Hugo Chavez, arrivé
avec M. Morales à Puerto Iguazu, a défendu la “nationalisation” du gaz
bolivien, affirmant qu’elle aura “un effet positif sur les intérêts de la
région”. M. Morales a accepté sa proposition de participer au colossal
projet de gazoduc sud-américain (20 milliards de dollars).
Pendant la réunion, l’Argentine a joué les
médiateurs mais elle est également concernée par la renégociation des tarifs
car elle importe 3 à 4 millions de mètres cubes de gaz bolivien par jour, à
travers la compagnie espagnole Repsol-YPF. Cette compagnie a semblé
assouplir son attitude jeudi, en acceptant de “collaborer avec le
gouvernement bolivien” pour discuter du décret de “nationalisation” tout en
précisant qu’elle défendra “ses droits”.
La Paz a donné le 1er mai un délai de 180 jours
aux firmes étrangères pour transformer leurs concessions en nouveaux
contrats dans lesquels elles seront contraintes de s’associer à la compagnie
publique bolivienne YPFB en lui réservant la majorité du capital.