Le procès Enron entre dans
sa dernière ligne droite
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Jeff Skilling, son
avocat Daniel Petrocelli et l’ancien PDG d’Enron, Kenneth Lay à
Houston, le 12 avril 2006
Le procès des ex-dirigeants d’Enron, Kenneth
Lay et Jeffrey Skilling, est entré dans sa dernière ligne droite avec les
ultimes témoignages lundi, précédant les dernières plaidoiries la semaine
prochaine.
L’audience a été suspendue pour quelques jours
au tribunal de Houston (Texas, sud) après l’audition pendant 14 semaines des
témoins et des principaux acteurs d’une des plus grosses faillites de
l’histoire américaine en décembre 2001.
Les dernières plaidoiries auront lieu à partir
du 15 mai avant que les jurés – huit femmes et quatre hommes – ne se
retirent pour délibérer afin de savoir si Kenneth Lay, 64 ans, et Jeffrey
Skilling, 52 ans, qui ont tous deux dirigé le groupe de courtage en énergie,
sont ou non coupables de fraudes.
Les avocats de la défense ont affirmé que
plusieurs témoins qui auraient pu disculper les deux hommes ont refusé de
témoigner de peur d’être eux-mêmes poursuivis. “Nous n’avons pas pu appeler
tous les témoins et exposer tous les faits”, a déploré Daniel Petrocelli,
l’avocat de Jeffrey Skilling.
Tant Kenneth Lay, le fondateur du groupe, que
Jeffrey Skilling, qui lui avait brièvement succédé au poste de PDG, ont
rejeté la responsabilité de la faillite sur Andrew Fastow, l’ancien
directeur comptable, et ses complexes montages financiers.
Ce dernier, qui a accepté de collaborer avec la
justice, a pour sa part chargé ses anciens patrons. Il a notamment affirmé
que Jeffrey Skilling lui avait demandé de “presser” les comptes d’Enron pour
qu’ils soient les plus séduisants possibles aux yeux des actionnaires et des
marchés financiers.
Lors de leurs propres témoignages, MM. Lay et
Skilling n’ont pas manifesté beaucoup de compassion pour les milliers
d’employés et d’actionnaires ruinés par la faillite du groupe. Ils ont
affirmé que la situation d’Enron était solide, Kenneth Lay imputant la
faillite à des “vautours” spéculant sur la baisse du titre et à une campagne
de presse “vicieuse” des médias, notamment du Wall Street Journal.
Le procureur fédéral John Hueston avait
toutefois révélé que le propre fils de Kenneth Lay, Mark Lay, avait fait
partie de ces spéculateurs. “Il n’était pas un vautour, n’est-ce pas?”,
a-t-il demandé à l’ex-PDG déchu. “Non, je ne le pense pas”, a répondu
celui-ci, ajoutant qu’il n’était pas au courant des agissements de son fils.
La journée de lundi a été marquée par le retour
à la barre de l’avocat principal de Kenneth Lay, Mike Ramsey, éloigné après
une opération du coeur et remplacé au pied levé par l’un de ses associés,
George ‘Mac’ Secrest.
L’ex-PDG s’était montré vindicatif pendant sa
déposition, se prenant de bec tant avec le procureur fédéral qu’avec son
propre avocat.
C’était pourtant Jeffrey Skilling, connu pour
son tempérament parfois bouillant, qui était attendu au tournant. Il a
toutefois gardé son calme alors que Kenneth Lay est apparu hautain et
cassant.
“Il s’est montré le parfait exemple de ce que
l’accusation voulait mettre en exergue pour expliquer ce qui se passait à
Enron”, a affirmé David Berg, un avocat de Houston, spécialiste des procès
de dirigeants d’entreprises. “Vous décapez le vernis montré pour le public
et on découvre alors des choses vraiment pas belles”, a-t-il estimé.
L’accusation a ainsi montré que Kenneth Lay
avait dépensé 200.000 dollars quelques jours après la faillite pour
l’anniversaire de sa femme, célébré à bord d’un yach appelé “Amnesia”
(Amnésie).
S’ils sont reconnus coupables, les deux hommes
risquent de passer plus de 30 années en prison.