Tunisie-Libye : La complémentarité à petites doses

 

Tunisie-Libye

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Par
Moncef
MAHROUG

 


tun-lib1.jpgLes gouvernements tunisien
et libyen continuent à mettre en place un environnement favorable au
développement du commerce et des investissements tuniso-libyens. Trop
lentement au goût des hommes d’affaires des deux pays. On en a parlé pour la
première fois en 2000, mais on n’en voit pas encore la concrétisation : il
s’agit de «l’investissement tuniso-libyen en Afrique», objet de tant de
rencontres au cours des cinq dernières années, y compris le deuxième forum
organisé au cours de la semaine écoulée (11-12 mai 2006) par la Chambre de
Commerce et d’Industrie de Tunisie.

Une rencontre au cours de laquelle il est clairement apparu que, dans les
relations économiques tuniso-libyennes, la ligne de démarcation passe de
moins en moins entre Tunisiens et Libyens et, de plus en plus, entre
gouvernements d’un côté et hommes d’affaires des deux pays, de l’autre.

Durant la rencontre de Tunis, les représentants des deux gouvernements ont
essayé d’accorder leurs partitions, alors que les chefs d’entreprise des
deux pays tenaient le même langage. Confrontés depuis plus de cinq ans à une
forte demande de levée de tous les obstacles à la libre circulation des
produits et des capitaux entre la Tunisie et la Libye, les deux
gouvernements ont laissé entrevoir des prédispositions à faire un pas de
plus sur cette voie.

Les discours des quatre ministres durant ce deuxième forum -un libyen et
trois tunisiens- en attestent. «Nous n’avons pas discuté de coopération
classique, mais de mise en place de la base d’une complémentarité économique
; ce qui implique que nous réfléchissions comme une seule équipe», a affirmé
M. Taieb Safi, secrétaire du Comité Populaire de l’Economie, du Commerce et
de l’Investissement.

Mais alors que ce forum -pour lequel M. Safi a retardé son départ de Tunis
afin d’assister à la séance inaugurale, a révélé M. Mondher Zenaidi,
ministre du Commerce et de l’Artisanat-, est placé sous le thème de
l’investissement tuniso-libyen en Afrique. Le responsable libyen a
recommandé de commencer par «mettre de l’ordre dans notre maison en nous
développant et en améliorant le niveau de nos ressources humaines».

Invitant les hommes d’affaires tunisiens à ne pas hésiter à venir en Libye
et à y saisir les opportunités d’investissement, le secrétaire du Comité
Populaire de l’Economie, du Commerce et de l’Investissement a annoncé une
bonne nouvelle qui pourrait doper l’appétit des businessmen tunisiens pour
ce pays : dorénavant, les investisseurs tunisiens en Libye vont pouvoir
contracter des crédits auprès de banques libyennes, à hauteur de 50% de leur
investissement et «sans plafond». Mais M. Taieb Safi ne manque pas non plus
d’idées quant à la manière d’intensifier davantage les relations économiques
tuniso-libyennes.

Mettant en exergue les «3000 km de côte, les 18 ports et 30 aéroports» dont
disposent les deux pays, le responsable libyen a proposé de «réfléchir
ensemble à la création de zones franches permettant d’attirer le commerce
international».

Auparavant, M. Mondher Zenaidi, ministre du Commerce et de l’Artisanat,
s’est dit très satisfait du «rythme de développement de la Coopération dans
les différents domaines avec la Jamahiriya qui constitue le premier
partenaire économique de la Tunisie dans le Monde arabe et le cinquième sur
le plan international. Une position qu’illustre le bond spectaculaire de
près de 30% des échanges commerciaux, passés de 960 millions de dinars en
2004 à 1270 MDT en 2005.

Toutefois, les deux pays sont déterminés à aller plus loin dans ce domaine;
en l’occurrence vers «des horizons plus larges», clame M. Mondher Zenaidi
que les réunions de cette semaine devraient rapprocher.

En effet, cette rencontre a permis l’expression d’une «détermination à lever
tous les obstacles devant la circulation des biens, mieux valoriser l’accord
de libre-échange qui nous lie et consacrer le traitement national des
produits de deux pays». Intervenu lors de l’atelier dédié à l’investissement
dans le tourisme, M. Tijani Haddad, ministre du Tourisme , a suggéré
d’envisager la possibilité de «commercialiser des produits touristiques
mixtes» tuniso-libyens. A la fin de son intervention, le ministre du
Tourisme a lui aussi tenu à annoncer une «bonne nouvelle» : la décision de
faire construire un relais au poste frontalier de Ras-Jedir, afin de rendre
moins pénible l’attente pour les citoyens des deux pays -et les hommes
d’affaires en particulier- effectuant les formalités en vue de se rendre en
Tunisie et en Libye.

Bien que les relations tuniso-libyennes soient devenues «exemplaires» et que
les échanges commerciaux entre les deux pays aient franchi la barre du
milliard de dinars, M. Mohamed Nouri Jouini, ministre du Développement et de
la Coopération internationale, a appelé, à «améliorer ce chiffre» et,
surtout, à «réaliser une plus grande valeur ajoutée dans les échanges
commerciaux». Cela en saisissant les «opportunités offertes dans les deux
pays dans les secteurs de l’agriculture, de la transformation des produits
agricoles, industriels et des services».

Concernant l’investissement et l’exportation en Afrique, notamment de
services, le ministre du Développement et de la Coopération internationale a
conseillé de «commencer par certains marchés afin d’éviter la dispersion, de
concevoir des programmes communs dans ce domaine et de mettre en place des
facilités financières» en faveur de ces actions ciblant les marchés
africains.

Certes, on ne voit pas encore d’investissements tuniso-libyens en Afrique ;
par contre, certains projets mixtes sont clairement orientés -en partie du
moins- vers le marché africain. C’est le cas notamment de la société de
céramique créée en Libye avec des partenaires libyens par le groupe
Poulina, à travers sa filiale Carthago Ceramics. Ce projet va entrer en
production début 2007 et écoulera sa production sur les marchés libyen et
africain.