Gaz: l’Egypte remporte la
mise avec Israël et les Palestiniens
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Des officiers
palestiniens regardent une plateforme de gaz au large de Gaza, le 27
septembre 2000
Les Egyptiens sortent grands gagnants d’une
partie politico-financière autour du gaz, ressource stratégique, qui s’est
jouée avec les Israéliens, les Palestiniens et un acteur clef, British Gas.
Après des années de négociations, et quelques
éclats politiques, c’est l’Egypte, récemment devenu le 6ème exportateur
mondial de gaz, qui achètera, au détriment d’Israël, du gaz trouvé au large
de la bande de Gaza.
“Les Palestiniens ont du gaz que nous pensons
utile en Egypte, et ils ont besoin d’argent, nous travaillons avec eux”, a
déclaré à l’AFP le ministre égyptien du Pétrole, Sameh Fahmi.
L’Egypte, retenue in fine par l’opérateur
britannique du gaz palestinien, British Gas (BG), gagnera sur les deux
tableaux, en vendant aussi à partir de 2008 son gaz à Israël, qui n’est
parvenu à signer aucun autre contrat.
Provoquant la consternation en Israël, BG a
annoncé lundi qu’il rompait de longues et tortueuses négociations avec le
gouvernement israélien sur la fourniture du gaz offshore de Gaza, grande
manne pour les Palestiniens à l’horizon 2010.
Le “surplus de gaz ira en Egypte, où il sera
traité et liquéfié à Idku, au nord du Delta, avant d’être exporté”, a
déclaré à l’AFP Oscar Prieto, président de BG en Egypte, estimant que “faire
affaire avec Israël était impossible”.
Officiellement, ces contrats ne relèvent pas du
politique. Mais la réalité est souvent autre, compte tenu de leur nature
stratégique.
Sur le contrat pour la vente de gaz par
l’Egypte à Israël, critiqué au Caire par l’opposition, M. Fahmi répond :
“C’est un marché entre compagnies. Tous les contrats sont commerciaux, et
doivent le rester, c’est tout”.
Objet d’âpres négociations, interrompues par la
seconde Intifada palestinienne, il a pourtant fait l’objet d’un mémorandum
signé en 2005 par M. Fahmi et le ministre israélien des Infrastructures,
Binyamin Ben Eliezer.
Ce contrat de 2,5 mds de dollars porte sur la
vente annuelle pendant 15 ans de 1,7 md de m3 de gaz naturel à la compagnie
électrique israélienne (CEI) par un consortium israélo-égyptien, East
Mediterraneen Gas (EMG).
Le gaz doit être exporté par un gazoduc
sous-marin de 100 km en Méditerranée. “Ce pipeline sera achevé fin 2007,” a
dit M. Fahmi.
Parallèlement, BG et l’Autorité palestinienne
avaient engagé des discussions avec Israël pour lui revendre du gaz, après
la découverte surprise en 2000 d’un vaste gisement au large de la bande de
Gaza.
Mais l’ex-Premier ministre israélien Ariel
Sharon avait mis son veto, arguant que les Palestiniens utiliseraient cette
manne pour financer le terrorisme. Il avait tout misé sur le gaz égyptien,
sans se rendre compte qu’il serait insuffisant.
Car des opérateurs privés israéliens, refusant
de dépendre de CEI, une compagnie publique, ont aussi cherché à obtenir d’EMG
un approvisionnement au même prix (2,75 dollars le millier de BTU- unité
utilisée pour le gaz) que CEI.
Devant l’échec de ces négociations, le
gouvernement israélien a fait volte-face, tentant d’arracher un contrat à BG
et la partie palestinienne pour l’achat annuel de 1,5 md de m3 de gaz
palestinien.
“Impossible de s’entendre, Israel n’était pas
prêt à payer les prix du marché. Economiquement et techniquement, son offre
n’était pas mature, et en plus politiquement délicate”, a estimé M. Prieto.
BG, géant mondial très implanté en Egypte, a
obtenu une concession de 20 ans pour les champs de “Gaza Maritime”, en
partenariat avec CCC, compagnie de la puissante famille palestinienne Khoury
(90% – 10 %).
CCC et l’Autorité ont une option pour augmenter
leur part à terme à 40%. Un pipeline sous-marin de 40 kms sera construit
vers les côtes égyptiennes.
Ce gaz devrait d’abord permettre aux
Palestiniens de se dégager de l’emprise israélienne en matière énergétique,
en approvisionnant la centrale électrique de Gaza, aujourd’hui alimentée en
diesel.
L’exportation de son surplus vers l’Egypte à
l’horizon 2010 rapportera 100 millions de dollars par an en taxes et
royalties, théoriquement à l’Autorité Palestinienne et non au gouvernement
Hamas, s’il est encore au pouvoir.