Un cahier des charges, cela se respecte combien de temps ?

 

___________________________________

 

agenda_2812.jpgAprès une éclipse de quelques
semaines, me voilà de retour. Il me fallait un peu de temps pour me
ressourcer en ce début d’été. Avec cette
chaleur qui commence à être suffocante, c’est bel et bien l’été qui
s’installe à Tunis (au sud d’où je rentre après une petite mission, c’est
pire). Et avec l’été qui s’installe, nos bonnes et vieilles habitudes de
prendre un café sur la terrasse reprennent leurs droits.

Ah, que c’est agréable de siroter son café ou son thé sur l’une des nos
avenues ! Que ce soit celle de Tunis, de La Marsa, de Sidi Bou, d’El Manar
ou de la Cité Ennasr,… c’est toujours agréable. Consommer sa boisson en
regardant les voitures défiler et les filles (ou les mecs) trimballer, c’est
un plaisir sans prix. Surtout si l’on est seul avec ses anges (c’est une
expression dialectale que seuls les Tunisiens connaissent) où l’on peut
penser sa journée, programmer son lendemain, réfléchir aux petites choses de
la vie, rédiger son prochain papier dans la tête (l’étape la plus difficile
et la plus délicate d’un article).

Et en sirotant mon café, j’ai constaté une chose extraordinaire. C’était à
la Cité Ennasr dans cette avenue principale qu’est l’avenue Hédi Nouira où
l’on pourrait recenser le plus grand nombre de cafés au kilomètre carré du
pays. C’est fou le nombre de cafés qu’il y a sur cette avenue et c’est fou
le nombre de clients qu’il y a ! Mais où ses clients allaient avant qu’on
crée cette avenue qui n’existait pas il y a à peine 5-6 ans ? Mais là n’est
pas la question du jour.

La question, je l’ai posée en titre «Un cahier des charges, cela se
respecte combien de temps ?». C’est qu’attablé devant mon café, je constate
que les très larges trottoirs mis en place par les promoteurs (ou la mairie)
conformément aux exigences du cahier des charges et de la réglementation en
vigueur, n’existent plus ! J’étais à même le trottoir, juste devant le
pare-choc de ma voiture. Vu que j’étais sous un parasol, je conclus que ma
table et moi-même n’avons pas bougé inconsciemment de quelques mètres pour
nous déplacer depuis la terrasse «officielle» jusqu’à devant le petit
parking. Je me rappelle qu’il y avait des escaliers tout au long des
immeubles de cette avenue. Des escaliers sous de sortes d’arcades (un peu
comme l’avenue de France à Tunis) qui permettaient aux piétons de trimballer
sous l’ombre tout au long de l’avenue. A la place des escaliers, les
cafetiers et autres commerces ont mis de grands bacs à fleurs. Il y en a
même qui ont mis un mur en verre s’appropriant ainsi cette allée publique
prévue par les architectes, approuvée par les autorités de tutelle et payée
par les promoteurs !

Le piéton ? Vous pouvez le vérifier à l’instant même, dans certaines parties
de cette grande avenue Hédi Nouira, il n’a d’autre choix que d’aller sur la
chaussée même ! Imaginez une vieille personne ou une famille avec une
poussette de bébé marchant au beau milieu de la chaussée.

Il y a pire. C’est que cette chaussée était suffisamment large pour faire
passer deux voitures. Comme les pancartes «d’arrêt interdit» (qui sont plus
strictes que celles de stationnement interdit) ne sont respectées par aucun
automobiliste, cette chaussée suffit à peine à laisser passer une voiture.
Mais il y a encore pire ! C’est que les automobilistes de ce quartier sont
généralement des ‘jeunes fils’’ qui ont obtenu fraîchement
leurs permis de conduire et qui ont envie de tester leurs capacités de
conductrices. Un peu pour s’impressionner eux-mêmes, beaucoup pour
impressionner les autres et alimenter le registre du «m’as-tu vu ?».

Que devient alors cette famille désirant faire promener son bébé dans sa
poussette ou encore ces vieilles personnes ? Ils n’ont aucun choix que de
marcher tout au long de cette avenue principale ! Je dis bien aucun choix !
Alors que des villes européennes prévoient des pistes cyclables, des
trottoirs aménagés pour les handicapés et différentes autres commodités pour
encourager les piétons à se délaisser de leur véhicule au profit de la
marche ou du vélo, voilà qu’un quartier tout neuf qui se laisse bouffer par
des gens qui ne respectent pas leur cahier des charges. Déjà que ce cahier
des charges était suffisamment laxiste comparativement aux villes
européennes, mais qu’il soit totalement ignoré par des commerçants qui
viennent d’obtenir leurs autorisations, il y a de quoi se poser des questions
sur la durée de vie d’un cahier de charges.

Pour que les responsables de la mairie de l’Ariana (dont dépend la cité en
question) ne m’accusent pas de ne citer que cet exemple, il sera honnête de
ma part que le même constat s’opère à El Manar (où l’on trouve nettement
plus de chauffards). L’avenue Slimane Ben Slimane (où se trouve la TAP –pour Tunis Afrique Presse) et la
rue qui lui est perpendiculaire (celle où se trouve Bonprix et où il n’y a
même pas de trottoir et ce des deux côtés de la chaussée) au niveau des
centres Al Akwas et Centre Ghazi, c’est l’enfer pour tout piéton à cause
justement des commerces ayant envahi tout le trottoir ! A Tunis, par
certains endroits (la rue de Ghana par exemple), idem !

Si un cahier des charges se respecte uniquement le jour où l’on vient
contrôler les travaux pour donner l’autorisation de fonctionner, j’aimerai
bien qu’on nous le dise !

 

Une chose est sûre, c’est qu’un cahier des charges ne se respecte pas
beaucoup de temps, du moins au vu des exemples cités plus haut !
 


R.B.H