Retenu
aujourd’hui comme une valeur cardinale sur le plan internationale, la
transparence dans la gestion progresse au Maghreb.
«Le manque de transparence dans la gestion est une caractéristique
malheureusement fort répandue dans les entreprises maghrébines…. ». Ce
diagnostic, établi par M.Afif Chelbi, ministre de l’Industrie, de l’Energie
et des PME, ne souffrant aucune contestation, le séminaire sur «La
transparence des Entreprises au Maghreb », organisé mercredi 24 mai par la
Cellule des Jeunes Membres, de l’Institut Arabe des Chefs d’entreprises, en
collaboration avec la Fondation Friedrich Naumann et GTZ, s’est concentré
sur l’analyse des causes, des conséquences et des moyens de remédier aux
faiblesses constatées sur ce plan.
Causes d’abord. La non-transparence tient principalement au fait qu’ «au
Maghreb, comme souvent ailleurs, les entreprises et les PME en particulier
sont, pour la plupart, des entreprises familiales, de faible taille, sous
capitalisées et ne diffusent pas suffisamment de ressources à long terme
pour financer correctement leurs investissements », analyse M.Chelbi. Or,
bon nombre parmi ces entreprises considère «la transparence comme un coût »
parce que l’information donnée est supposée «être utile aux concurrents »,
complète M.Yazid Skandrani, directeur général adjoint de «Groupe des
Assurances de Tunisie » (GAT). Qui décrit une réalité peu reluisante où «le
management repose sur le fondateur », «toutes les décisions sont
centralisées au niveau d’ une personne » qui «en raison de son lien affectif
avec l’entreprise veut tout contrôler ».
Cette situation n’est pas sans conséquence pour l’économie d’une façon
générale et l’entreprise en particulier, car la «non-transparence a un coût
». L’ absence de transparence est source de risques pour les prêteurs et
les investisseurs, estime le ministre de l’Industrie, de l’Energie et des
PME. C’est pour cette raison, explique M.Chelbi, que le système financier se
trouve contraint à limiter son concours.
Mais les investisseurs, notamment étrangers, sont également loin d’être
insensibles à l’absence ou au manque de transparence. Et leur sanction est
très simple et claire : ils vont voir ailleurs.
De fait, «la part des pays maghrébins dans les IDE est encore faible » et
«plafonnent à partir des années 90 à environ 10% de la formation en capital
fixe (FBCF) et ce malgré les nombreux efforts engagés en vue d’ancrer nos
économies à l’économie européenne », se désole le ministre de l’Industrie,
de l’Energie et des PME.
Pourtant, la transparence constitue aujourd’hui «un préalable pour
l’amélioration de la compétitivité de l’entreprise maghrébine » puisque
celle-ci «sont appelées de façon inéluctable à ouvrir leurs capitaux à de
nouveaux actionnaires locaux comme étrangers ». Elle est également «un moyen
de donner de la croissance aux marchés et économies maghrébins » et une
garantie contre «une utilisation non-efficace des ressources de l’entreprise
», plaide M.Yazid Skandrani.
Mais comment faire pour devenir transparent ? Une seule certitude, à ce
sujet : « la transparence ne se décrète pas ; c’est une culture», clame le
dga de GAT. Une culture dont on peut favoriser la diffusion notamment en
mettant en place des «sanctions à la non-transparence» et un cadre
réglementaire en vue de favoriser la mise en place d’«une discipline de
marché ».
Transparence, oui, mais jusqu’à quel point ? La question se pose d’autant
plus que, averti Karim Belkahla, enseignant à la Faculté des Sciences
Economiques et de Gestion de Tunis qu’il y a «des risques de dérives de la
transparence ». Dérive en particulier économique où la transparence peut
représenter «un danger pour l’entreprise » qui peut se trouver exposée
«au fisc et à ses concurrents qui peuvent en profiter ». Mais «la
transparence n’est pas incompatible avec la confidentialité », rassure Chokri Mamoghli, universitaire. A condition de savoir tracer clairement «la
frontière entre ce qui est confidentiel et ce qui ne l’est pas ».
D’ailleurs, les choses commencent à bouger dans ce domaine à l’échelle du
Maghreb. «La qualité de l’information s’est nettement améliorée, au Maroc et
–un peu moins- en Tunisie et en Algérie ».