Deutsche Bank: les
actionnaires s’en prennent à nouveau au patron
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Le patron de la
Deutsche Bank, Josef Ackermann, s’adresse aux actionnaires lors de
l’assemblée générale, le 1er juin 2006 à Francfort
En dépit d’un bilan flatteur, le patron de la
Deutsche Bank, Josef Ackermann, n’a pas réussi à éviter les critiques des
actionnaires jeudi lors de l’assemblée générale, ni à faire oublier qu’il
devra bientôt retourner devant la justice.
Un bénéfice net 2005 au plus haut depuis cinq
ans à 3,5 milliards d’euros, le versement d’un dividende en forte hausse, le
lancement d’un nouveau programme de rachat d’actions et une année 2006 qui a
commencé en fanfare avec un résultat record de 1,71 milliard au premier
trimestre: M. Ackermann n’a pas manqué de vanter son bilan devant les
actionnaires et de leur rappeler qu’ils profitaient de la bonne santé de
l’institut. Mais cela n’a pas suffi à éviter au Suisse une pluie de
critiques.
M. Ackermann a dû justifier une nouvelle fois
la décision prise en décembre de geler le fonds immobilier ouvert “Grundbesitz-Invest”
car il craignait que les actifs en aient été surévalués. Cette mesure, une
première en Allemagne, avait entraîné une crise dans l’ensemble du secteur.
“Il n’y avait pas d’autre alternative”, a-t-il expliqué aux actionnaires
mécontents, ajoutant que ceci avait été fait dans l’intérêt des
investisseurs.
Autre critique, les suppressions d’emplois qui
“laissent des milliers de gens à la rue”, selon les mots d’un actionnaire.
Deutsche Bank a lancé l’an dernier un vaste programme de réduction de coûts
qui doit déboucher au total sur 6.400 réductions de postes.
La première banque allemande n’a pas cessé de
réduire ses effectifs au cours des dernières années. Depuis l’arrivée à sa
tête de Josef Ackermann en mai 2002, elle a perdu environ 20.000 salariés.
Le patron de la
Deutsche Bank Josef Ackermann (d) et le président du conseil de
surveillance Clemens Börsig, le 1er juin 2006 à Francfort
Des actionnaires ont également reproché une
nouvelle fois au patron de négliger l’Allemagne au profit des activités à
l’international malgré ses assurances répétées que les racines de Deutsche
Bank restent dans la première économie de la zone euro. Il a ainsi réitéré
l’intérêt de son établissement pour un rachat de la banque publique Berliner
Bank: “Ce ne serait pas une bonne chose si une banque de la capitale était
rachetée par une banque étrangère”.
Mais ce sont les déboires judiciaires des
dirigeants de la banque qui ont soulevé le plus de questions. La banque est
menacée de poursuites par l’ancien magnat des médias, Leo Kirch, qui lui
reproche d’avoir contribué à la faillite d’une de ses sociétés.
La justice allemande lui a donné raison et a
estimé que Deutsche Bank pourrait devoir payer des dommages-intérêts. Cette
affaire a obligé l’ancien président du conseil de surveillance, Rolf Breuer,
à céder sa place début mai à Clemens Börsig, jusqu’alors directeur financier
de l’institut bancaire.
M. Ackermann est lui-même dans le collimateur
de la justice allemande. Il va devoir retourner devant le tribunal de grande
instance de Düsseldorf (Ouest), probablement à l’automne, dans le cadre d’un
nouveau procès Mannesmann, où il est poursuivi pour abus de confiance.
Il lui est reproché, alors qu’il était membre
du conseil de surveillance du conglomérat allemand Mannesmann, d’avoir
accordé des primes à plusieurs dirigeants du groupe après son rachat en 2000
pour 178 milliards d’euros par Vodafone.
En première instance, il avait bénéficié d’une
relaxe, de même que les cinq autres prévenus.
M. Ackermann a déjà fait savoir qu’il se
maintiendrait à son poste pendant le procès, qui pourrait s’étaler sur six
mois. Il “dispose de la confiance totale du conseil de surveillance” et il
n’est pas question pour l’instant de lui chercher un successeur, a martelé
pour sa part M. Börsig, rappelant que le Suisse avait vu son contrat
prolongé jusqu’en 2010.
Mais en cas de condamnation, il est déjà
annoncé qu’il démissionnera.