Deutsche Börse menacé
d’isolement après le mariage Euronext/Nyse
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Drapeau de Deutsche
Börse à la Bourse de Francfort
L’opérateur de la Bourse de Francfort, Deutsche
Börse, est menacé d’isolement après l’échec de son projet de fusion avec son
concurrent paneuropéen Euronext, un revers qui vient s’ajouter à une longue
série de projets de mariage avortés.
Euronext et la Bourse de New York (Nyse) ont
officialisé vendredi un accord de fusion donnant le jour à une société
valant 20 milliards de dollars, ce qui pourrait enterrer définitivement les
espoirs de rapprochement entre Francfort et la Bourse pan-européenne.
“Deutsche Börse n’a plus de gros partenaires en
Europe pour une fusion. L’Europe est à présent pour ainsi dire aux mains des
Américains”, commente Olaf Kayser, analyste de la banque allemande LRP.
Et pour cause: la Bourse de Londres (London
Stock Exchange) est de son côté en discussion avec le Nasdaq, qui est devenu
son premier actionnaire.
“Il reste bien sûr quelques petites Bourses en
Europe, mais elles sont relativement peu importantes”, poursuit-il. Et même
là, les chances de fusion s’amenuisent pour l’opérateur de la Bourse de
Francfort. En effet, la société gestionnaire de la Bourse de Milan, Borsa
Italiana, a annoncé vendredi qu’elle allait entamer des discussions avec
Euronext en vue d’une éventuelle alliance, renforçant encore le sentiment
d’isolement sur les bords du Main.
Ce n’est pas la première fois que l’allemand
essuie des déconvenues. La Bourse de Francfort a déjà laissé passer il y a
quelques années le premier train de la consolidation des Bourses
européennes.
Son patron de l’époque, le Suisse Werner
Seifert, avait approché la Bourse de Paris, avant d’essuyer un premier
refus.
Il s’est ensuite tourné vers Londres. Les
discussions, très avancées, finissent par capoter à l’automne 2000 à cause
de divergences notamment sur l’emplacement du siège social.
La Bourse de Paris, écartée du processus,
réplique alors en créant le groupe Euronext, alliance des places de Paris,
Bruxelles, Amsterdam, puis Lisbonne.
Après l’échec de l’option londonienne, la
Bourse de Francfort se tourne en 2004 vers la Bourse de Zurich, son
partenaire dans le marché à terme Eurex. Nouvelle gifle: les Suisses
préfèrent rester indépendants plutôt que risquer de se faire absorber par
Deutsche Börse, dont la capitalisation boursière est alors près de huit fois
plus importante.
Fin 2004, Werner Seifert ressort des cartons
son projet de fusion avec Londres. Malgré les concessions de Deutsche Börse
et près de 2 milliards d’euros déposés sur la table, la Bourse de Londres
reste plutôt réticente.
Surtout, le projet déclenche la colère de
plusieurs fonds d’investissements actionnaires de Deutsche Börse, qui
obligent M. Seifert à abandonner son idée, avant de le débarquer purement et
simplement en mai 2005.
Malgré les revers accumulés, l’avenir n’est pas
tout noir pour le groupe allemand. “Deutsche Börse peut continuer à gagner
de l’argent avec ses propres produits”, estime M. Kayser.
“L’entreprise est rentable et possède avec
Eurex un marché à terme qui fait certainement partie de ses principaux
atouts” renchérit Heiko Frantzen, analyste chez Sal Oppenheim.
“Surtout, il n’est pas du tout exclu que
Deutsche Börse joue à l’avenir un rôle important dans la poursuite du
mouvement de consolidation des marchés boursiers. Un partenariat dans le
domaine des marchés dérivés par exemple serait pertinent”, conclut-il.
Les analystes spéculent régulièrement sur une
alliance aux Etats-Unis avec les principaux marchés à terme, le Chicago
Board of Trade (CBOT) et surtout le Chicago Mercantile Exchange (CME), qui
fait figure de candidat idéal en vue d’un rapprochement.