L’Eurogroupe préoccupé par
l’euro appelle la BCE à la modération
___________________________________
Jean Claude Trichet,
président de la BCE (C) avec le Premier ministre du Luxembourg,
Jean-Claude Juncker (G) et le commissaire européen aux Affaires
économiques et monétaires, Joaquim Almunia (D) à Luxembourg, le 6 juin
2006
Les ministres des Finances de la zone euro se
sont montrés mardi préoccupés par le taux de change de l’euro et ont appelé
la Banque centrale européenne à la modération sur les taux d’intérêt,
reconnaissant toutefois que l’inflation devait être surveillée.
Cette session de l’Eurogroupe intervient deux
jours avant celle du conseil des gouverneurs de la BCE à Madrid, qui devrait
décider d’une hausse de ses taux d’intérêt, selon les économistes.
Le taux de change de l’euro, tout près de 1,30
dollar, “nous cause une certaine préoccupation”, a indiqué le Premier
ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker, qui préside l’eurogroupe.
“Il faut être vigilant pour ne pas dépasser” la
valeur actuelle de l’euro, a déclaré de son côté le ministre français
Thierry Breton.
“A un niveau de 1,30 dollar pour un euro, nous
ne sommes pas à l’aise”, a renchéri le ministre espagnol Pedro Solbes.
L’euro a atteint lundi un plus haut depuis mai
2005 face au dollar, proche du seuil de 1,30 USD, en anticipation d’une
nouvelle hausse des taux en zone euro.
Les ministres se sont cependant gardés de
critiquer la BCE, dont la probable décision jeudi d’augmenter ses taux
d’intérêt, pour contrer une menace inflationniste, devrait aussi contribuer
au renchérissement de l’euro.
Jean-Claude Juncker a reconnu que la hausse de
l’inflation dans le secteur des services, qui représente une partie
importante de l’économie européenne, constituait “un réel problème”.
Le commissaire européen aux Affaires
économiques et monétaires, Joaquin Almunia, présent à la réunion, a
cependant estimé que “l’inflation sous-jacente (hors produits volatils comme
l’énergie) demeurait largement sous contrôle”, même si la vigilance
s’imposait.
L’Autrichien Karl-Heinz Grasser, dont le pays
préside l’UE, a appelé à faire davantage de réformes structurelles dans la
zone euro pour soutenir la croissance, tout en rappelant que des taux
d’intérêt bas étaient aussi nécessaires.
“La BCE (a) fait un très, très bon travail mais
néanmoins la croissance doit être soutenue, d’un coté par des réformes
structurelles, de l’autre côté par de bas taux d’intérêt”.
Le patron du
département Europe du FMI Michael Deppler à Luxembourg, le 6 juin 2006
Michael Deppler, le patron du département
Europe du FMI, a lui jugé que l’inflation ne constituait pas une menace et
devrait revenir, dans un délai de 24 à 36 mois, au niveau d’environ 2%
souhaité par la BCE.
“L’inflation sous-jacente a été très modeste,
particulièrement en ce qui concerne les salaires, et cela continue”, a-t-il
expliqué à l’issue d’une rencontre avec les ministres.
De son côté, le ministre néerlandais des
Finances Gerrit Zalm a relativisé la hausse de l’euro face au billet vert,
en ajoutant qu'”en dépit des prix du pétrole, tous les signaux sont
positifs” pour la croissance européenne.
Cependant “il s’agit de la troisième reprise et
les deux premières se sont évanouies”, a mis en garde Michael Deppler.
“Celle-ci semble plus solide mais quand j’observe la consommation et
l’emploi, je ne vois pas la preuve que nous sommes au début d’un fort
rebond”, a-t-il dit.
Cette réunion de l’Eurogroupe a par ailleurs
été l’occasion pour le nouveau ministre italien de l’Economie, Tommaso
Padoa-Schioppa, de montrer à ses homologues sa détermination à maîtriser le
déficit public de son pays, actuellement à la dérive.
L’Italie fait actuellement l’objet d’une
procédure en déficit public excessif pour avoir dépassé le seuil maximum de
3% du PIB prévu par le pacte européen de stabilité et de croissance.
“Nous retenons sa forte détermination à
consolider les finances publiques italiennes”, a déclaré M. Juncker.
M. Almunia, qui a rencontré M. Padoa-Schioppa
en tête à tête, a rappelé que les gouvernements européens ne devaient pas
relâcher leurs efforts budgétaires alors que la croissance repartait.