L’action EADS s’effondre
suite aux retards de livraison de l’A380
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Photo non datée de
l’A380 présenté à Pékin
Le titre du groupe aéronautique EADS
s’effondrait de 29,86% en Bourse mercredi en milieu de journée, à 17,83
euros, perdant ainsi en une matinée pas loin d’un tiers de sa valeur, après
l’annonce la veille d’un nouveau retard de livraisons des A380 de sa filiale
Airbus.
La valorisation boursière d’EADS est passée de
20,9 milliards d’euros mardi soir à 14,3 mds d’euros mercredi en milieu de
journée, soit ainsi 6,66 milliards d’euros partis en fumée en une matinée.
“Très mauvaise nouvelle” pour le courtier
Cheuvreux, “déception importante” pour Deutsche Bank, “fortes turbulences”
en perspective selon Aurel Leven: l’annonce de ces retards a affolé les
investisseurs et provoqué une chute libre du titre EADS.
Le titre accuse désormais une dégringolade de
plus de 45% depuis le 1er janvier.
Face à l’affolement général, l’opérateur de la
Bourse de Paris, Euronext, a suspendu à plusieurs reprises les échanges sur
les actions EADS, pour tenter d’endiguer leur chute, en vain.
Airbus a informé mardi ses clients d'”un
recalage des livraisons prévues de six à sept mois” de son avion géant A380
pour des raisons industrielles, ce qui va limiter à neuf le nombre
d’appareils de ce type livrés en 2007.
Ces retards de livraison ne devraient pas avoir
d’impact sur le bénéfice d’exploitation (Ebit) d’EADS en 2006, mais ils
devraient l’amputer “d’environ 500 millions d’euros par rapport au plan
initial de 2007 à 2010”, a précisé EADS, maison-mère de l’avionneur
européen.
“Ces retards significatifs, qui ne seront pas
comblés avant 2010, ne sont pas de nature à privilégier la signature de
nouvelles commandes et pourraient même entraîner une annulation pure de
commandes”, ont prévenu dans une note les analystes d’Oddo Securities.
L’annonce d’Airbus a provoqué de multiples
abaissements de recommandation des maisons de courtage qui couvrent le
titre.
Photo remise par Boeing le 13 juin 2006 de W. James McNerney, Jr.,
président de Boeing
La compagnie Singapore Airlines (SIA) et Airbus
sont en pourparlers pour d’éventuelles indemnisations au lendemain de
l’annonce par l’avionneur européen d’un nouveau retard des livraisons de
l’A380, a annoncé mercredi un porte-parole de SIA.
“Nous sommes déçus par
l’annonce de délais supplémentaires mais nous travaillerons en lien avec
Airbus pour minimiser les délais et leurs conséquences”, a-t-il indiqué dans
un communiqué.
“Sur la question de
l’indemnisation, nous sommes en discussions à ce sujet avec Airbus”, a-t-il
ajouté.
Airbus assure toutefois
que son avion à double pont, d’une capacité de 555 à 840 sièges, sera
certifié en fin d’année et qu’un premier exemplaire sera livré avant 2007 à
son premier client, Singapore Airlines.
Mais la compagnie de
lancement de l’appareil ne recevra qu’un seul avion à cette échéance au lieu
des deux prévus à l’origine, indique l’avionneur.
C’est la deuxième fois
qu’Airbus retarde le calendrier de livraisons de l’A380, déjà décalé de six
mois par rapport au plan initial l’an dernier.
“Ces nouveaux retards
sont purement dus à des problèmes de production, non par des problèmes de
certification ou de poids. Ils sont essentiellement dus à des difficultés
pour la fabrication et l’installation des systèmes électriques”, a expliqué
à l’AFP le directeur commercial d’Airbus, John Leahy.
Des
avions de Singapore Airlines le 15 mai 2006
Selon M. Leahy, Airbus prévoit désormais de
rattraper progressivement ce retard pour “atteindre une cadence de
production de 4 avions par mois d’ici la fin de la décennie”.
En attendant, “nous paierons des indemnités de
retard aux clients”, a-t-il ajouté, tout en refusant de donner de précisions
chiffrées.
Une façon d’apaiser la colère grandissante de
certains clients impatients de pouvoir exploiter le paquebot des airs, d’une
valeur catalogue de près de 300 millions de dollars.
L’A380 a été commandé juqu’ici à 159
exemplaires par 16 compagnies aériennes.
La nouvelle tombe au plus mal pour Airbus, déjà
occupé depuis plusieurs semaines à redessiner son futur avion long-courrier
A350, critiqué par plusieurs clients. L’appareil, vendu à une centaine
d’exemplaires, subit de plein fouet la concurrence du modèle rival de
l’américain Boeing, le 787, qui connaît un franc succès auprès des
compagnies aériennes.
Le retard de l’Airbus A380 ne devrait pas avoir
d’impact sur le bénéfice d’exploitation (Ebit) d’EADS en 2006, prévu entre
3,2 et 3,4 milliards d’euros, mais devrait diminuer celui-ci “d’environ 500
millions d’euros par an entre 2007 et 2010” par rapport aux prévisions
initiales du groupe européen d’aéronautique et de défense.
“Les éventuelles résiliations contractuelles
n’ont pas été prises en compte dans cette estimation”, ajoute-t-il.
EADS prévoit en outre un impact “inférieur à
300 millions d’euros” sur le flux de trésorerie en 2006 pour s’élever à plus
d’un milliard d’euros en 2008 “avant de décroître fortement par la suite”.
Ce manque à gagner est d’autant plus
problématique que le groupe, qui possède 80% d’Airbus, doit prochainement
racheter la part de 20% du britannique BAE Systems dans l’avionneur, ce qui,
selon les analystes, pourrait lui coûter entre 3,5 et 6,5 milliards d’euros.
Quelques semaines auparavant, le groupe
européen a vu ses deux actionnaires de référence, Lagardère et
DaimlerChrysler, réduire leur participation dans son capital. Juste avant
que les déboires d’EADS ne commencent à s’accumuler.