EADS: Lagardère ignorait les
retards et évoque une crise majeure
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Noël Forgeard et Arnaud
Lagardère le 24 mai 2006 à Matignon
Arnaud Lagardère, co-président du conseil
d’administration d’EADS, maison mère d’Airbus, n’avait pas été informé du
retard pris dans le calendrier de livraisons de l’A380, et parle, dans un
entretien au Monde publié jeudi, d’une “crise majeure” chez le groupe
européen.
“Le conseil d’EADS a appris ces problèmes très
récemment”, affirme-t-il. “En mai (…) nous avons posé la question au
patron d’Airbus Gustav Humbert et à ses équipes sur un retard éventuel du
programme. Sa réponse a été: nous n’avons aucune information qui puisse nous
permettre de conclure qu’il y aura un décalage de livraisons”, a-t-il
ajouté.
Mercredi, l’action EADS s’est effondrée de 26%
en Bourse, avec 5,5 milliards d’euros de capitalisation partis en fumée,
après l’annonce de retards de livraison de l’Airbus A380, qui devraient
amputer les bénéfices d’EADS de 2 milliards d’euros entre 2007 et 2010.
“L’ampleur de la chute nous a surpris”, a souligné M. Lagardère, qui juge
qu’EADS et Airbus sont “face à une crise majeure”.
En vendant massivement les titres d’EADS, les
investisseurs ont d’après lui signifié “leur manque de confiance dans la
capacité d’Airbus à mener à bien des projets très complexes”. M. Lagardère
affirme que sa décision annoncée début avril de vendre une part de 7,5% dans
le géant européen d’aéronautique et de défense avait été prise “à la rentrée
2005” et n’était pas liée aux difficultés d’Airbus. “Aussi surprenant que
cela puisse paraître, nous n’avions pas d’information”, répète-t-il.
“Si nous avions été malhonnêtes ce n’est pas
7,5% du capital que nous aurions vendu, mais la totalité. J’ai le choix de
passer pour quelqu’un de malhonnête ou d’incompétent, qui ne sait pas ce qui
se passe dans ses usines. J’assume cette deuxième version”, poursuit-il.
Lagardère et le groupe germano-américain DaimlerChrysler avaient annoncé
conjointement le 4 avril qu’ils allaient céder chacun une participation de
7,5% dans EADS.
A la suite de cette opération, la participation
de Lagardère dans le groupe européen est passée à 7,5%, et celle de
DaimlerChrysler à 22,5%. L’Etat français est actionnaire d’EADS à hauteur de
15%. Concernant les responsabilités de chacun dans cette crise, “je ne veux
pas surréagir et faire tomber les têtes pour faire plaisir au marché. La
question est de savoir si le patron d’Airbus était au courant de la
situation en interne”, souligne M. Lagardère.
“Il est possible que, vu la complexité du
processus de fabrication, certaines équipes n’aient pas fait état de retard,
espérant le combler”, avance-t-il, ajoutant qu’il n’est “pas question de
faire payer un lampiste”. Interrogé sur son intention de maintenir sa
confiance ou non à Noël Forgeard, le co-président d’EADS qui dirigeait
auparavant Airbus, M. Lagardère a répondu qu’il n’a “pas pour habitude de ne
pas être solidaire de (ses) équipes” et que “c’est une discussion (qu’il)
aura avec Manfred Bischoff, l’autre co-président du conseil d’administration
d’EADS.