France Télécoms : Bruxelles durcit le ton vis-à-vis de Paris

 
 
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Logo de France Télécom (Photo : Damien Meyer)

[19/07/2006 18:28:54] BRUXELLES (AFP) Deux ans après avoir condamné France Télécom à rembourser un avantage fiscal avoisinant le milliard d’euros, la Commission européenne a décidé mercredi de poursuivre Paris devant la justice européenne, afin de l’obliger à récupérer cette aide.

“Nous estimons qu’il est urgent que la France respecte la décision de 2004” car la dérogation fiscale accordée à l’opérateur historique entre 1994 et 2002 continue d’entraîner “des distorsions de concurrence”, a expliqué le porte-parole européen à la Concurrence, Jonathan Todd.

A l’été 2004, la Commission avait jugé que le traitement préférentiel accordé à France Télécom concernant la taxe professionnelle était anticoncurrentiel et avait ordonné à Paris de récupérer cet argent.

Bruxelles avait aussi assimilé à des aides publiques la mise à disposition de France Télécom par l’Etat, en 2002, de 9 milliards d’euros. Ce soutien de la part d’un gouvernement qui détenait encore à l’époque la majorité du capital de France Télécom, était resté uniquement verbal, puisque ces fonds n’ont jamais été utilisés.

Compte-tenu du caractère inédit de cette “aide psychologique”, la Commission avait renoncé à réclamer un remboursement concernant ces derniers éléments et s’était limitée au remboursement de la taxe professionnelle.

Elle définissait le montant à récupérer comme étant la différence entre la taxe professionnelle qui aurait été due si le régime normal avait été appliqué et celle effectivement payée par France Télécom.

Après de savants calculs, les services européens de la Concurrence avaient évalué cette somme “entre 798 millions et 1,14 milliard d’euros”.

Le commissaire à la Concurrence de l’époque, Mario Monti, avait estimé qu’avec les intérêts, la somme à rembourser se situait en réalité entre 1,2 et 1,7 milliard.

Le montant définitif devait être défini dans les trois mois, en collaboration avec les autorités françaises.

Pourtant, a déploré Bruxelles mercredi, “les autorités françaises n’ont encore pris aucune mesure concrète pour récupérer l’aide”. Et malgré de nombreux échanges, elles ont “sous-estimé le montant d’aides”.

La Commission s’est donc résolue à traduire Paris devant la Cour européenne de Justice (CEJ).

Le ministre français délégué à l’Industrie, François Loos, a regretté cette décision, assurant que les autorités françaises avaient “pleinement et loyalement coopéré” avec la Commission.

Chez France Télécom, on estime qu’il existe “une véritable difficulté de chiffrage”. Mais quoi qu’il en soit, cette action en justice ne constitue pour lui qu’un “nouvel élément de procédure” qui “ne change pas la situation pour l’entreprise”.

France Télécom et l’Etat français ont fait appel fin 2004 de la condamnation de Bruxelles et demandé au Tribunal de première instance de la CEJ d’annuler cette décision sur le fond.

Or, estime-t-on chez France Télécom, “il ne se passera rien avant cet arrêt”, attendu courant 2007. Et l’opérateur est plutôt confiant en la force de ses arguments.

Le groupe fait notamment valoir que ce régime fiscal n’a pas été si avantageux que ça et qu’il a au contraire été sur-imposé à hauteur de 1,7 milliard d’euros.

En outre, rappelle-t-il, ce régime a été adopté par le Parlement en 1990. Or la Commission n’a commencé à s’y intéresser qu’en 2001, alors qu’il y avait prescription depuis un an.

Enfin, la loi incriminée avait déjà été examinée par la Commission dans le cadre d’un dossier concernant La Poste française. L’exécutif européen avait alors jugé ces dispositions tout à fait légales. “Qu’en est-il donc de la sécurité juridique?”, s’interroge aujourd’hui France Télécom.

L’affaire est d’autant moins close qu’une troisième procédure est en cours à Luxembourg. Jugeant la Commission trop clémente, les concurrents de France Télécom réclament que l’opérateur français rembourse également “l’aide psychologique” fournie par l’Etat français.

 19/07/2006 18:28:54 – © 2006 AFP