[14/08/2006 14:25:30] PARIS (AFP) Pour la première fois depuis 2002 et le début de la forte hausse des prix, la consommation de tabac a recommencé à augmenter en France, un retournement de tendance qui intervient alors que les pouvoirs publics hésitent à décréter une interdiction de fumer dans les lieux publics. “Tous les indicateurs, comme la diminution du nombre de personnes dans les consultations médicales pour s’arrêter de fumer, démontrent une rechute dans la lutte contre le tabagisme”, a affirmé à l’AFP le professeur Bertrand Dautzenberg, président de l’Office français de prévention contre le tabagisme (OFPT). Les ventes de tabac ont augmenté de 2,8% en France sur les cinq premiers mois de 2006, alors que ce marché avait reculé de 0,4% en volume en 2005 par rapport à 2004 et de 32% entre début 2003 et fin 2004, selon des chiffres publiés par la Confédération des débitants de tabac de France (CDTF). Le marché du tabac a représenté près de 27 milliards d’unités vendues de janvier à mai, soit une progression de 2,8% par rapport à la même période de 2005, pour un chiffre d’affaires de 6,12 mds d’euros (+3,4%), indique le numéro d’été de la revue spécialisée de la confédération, “Le Losange”. Les ventes des cigarettes (22,85 mds d’unités) ont augmenté de 3,2% en volume (+5,8% pour les blondes, -10,5% pour les brunes) et de 5,45% en valeur. Plus de la moitié des départements métropolitains (49) ont enregistré une hausse supérieure à 5% pour les cigarettes sur les 5 premiers mois de 2006 par rapport à la même période de 2004. En revanche, 15 départements, notamment dans le grand Sud-Ouest et dans le Nord de la France, souvent victimes d’achats transfrontaliers en Espagne et en Belgique, ont encore enregistré un recul des ventes pour les périodes considérées.
Cette reprise de la consommation s’explique par “des raisons économiques, politiques et sociologiques”, souligne Robert Rochefort, directeur général du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc). Economiques car “les augmentations de prix ne sont efficaces que si elles sont continues, sinon elles s’émoussent”, note Yves Martinet, président du Comité national contre le tabagisme (CNCT). Politiques ensuite car le “gouvernement hésite, contrairement à ce qu’il avait promis, à faire voter l’interdiction de fumer dans tous les lieux publics, y compris les bars, ce qui entraînerait une nouvelle diminution comme en Italie et en Irlande où la consommation a baissé respectivement de 8% et 6%”, relève M. Dautzenberg. Sociologiques enfin car “les jeunes reconnaissent le tabac comme dangereux mais pensent qu’il leur est possible de s’arrêter avant qu’il ne leur fasse du mal”, estime Robert Rochefort. Pour leur part, les buralistes sont bien décidés à s’opposer aux “ayatollahs de la lutte anti-tabac”, assène René Le Pape, président de la CDTF. “Votre organisation professionnelle va travailler (…) pour contrecarrer les mesures les plus radicales”, promet-il même à ses adhérents dans l’éditorial du “Losange” Les conclusions de la mission parlementaire, constituée en avril pour débattre du projet d’interdiction de fumer dans les lieux publics, devraient être connues en octobre. “Il est nécessaire de renforcer le dispositif actuel”, qui n’est pas “satisfaisant”, avait indiqué, en juin, Claude Evin (PS), le président de la mission, lors de la première table ronde confrontant organismes anti-tabac, professionnels (fabricants, restaurateurs, buralistes) et représentants de l’administration, pour discuter de la “loi Evin”. Cette loi, visant à protéger les non-fumeurs, avait été adoptée en 1991, alors que M. Evin était ministre de la Santé. |
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