Même après Enron, la fraude reste endémique dans les entreprises américaines

 
 
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Le siège d’Enron (g), à Houston, et celui de Boeing, à Chicago

[04/09/2006 09:01:08] WASHINGTON (AFP) Malgré les assurances données à la suite de la faillite retentissante de la maison de courtage en énergie Enron il y a bientôt cinq ans, le monde de l’entreprise américain est toujours secoué par des scandales à répétition qui touchent les plus grands noms.

ATT, Boeing, Comverse Technology, Prudential Financial, Medtronic, Schering-Plough et Tenet Healthcare ont ainsi fait ces derniers mois l’objet d’accusations de conduite frauduleuse de la part du département de la Justice et de procureurs fédéraux.

Ces accusations vont de transactions boursières irrégulières à de fausses facturations en passant par la manipulation des prix des médicaments, des dessous-de-table versés aux docteurs et des malversations dans l’octroi de stock-options.

Le coût total en terme d’amendes infligées à ces groupes s’élève à la coquette somme de 2,6 milliards de dollars.

Mis en place après le scandale Enron, un groupe spécial du ministère de la Justice est désormais chargé de la lutte contre la fraude dans les entreprises (Corporate Fraud Task Force – CFTF). Il a obtenu des condamnations, notamment celles des deux plus importants dirigeants d’Enron, mais certains juristes estiment que le montant des amendes devrait être considérablement augmenté pour décourager les entreprises américaines de continuer à frauder.

Jacob Zamansky, un avocat de New York dont le cabinet Zamansky and Associates a déposé de nombreuses plaintes contre des maisons de courtage, estime que “si le ministère de la Justice est vraiment sérieux dans son intention de faire respecter la loi et de décourager la fraude, davantage de chefs d’entreprises doivent être condamnés”.

Un responsable du ministre de la Justice, s’exprimant sous le couvert de l’anonymat, souligne toutefois que “de juillet 2002 à mars 2006, nous avons obtenu plus de 1.000 admissions de culpabilité et, sur ce total, plus de 160 émanaient de PDG et de présidents d’entreprises”.

Prudential Financial, l’une des plus importantes compagnies d’assurance-vie aux Etats-Unis avec un chiffre d’affaires dépassant les 7 milliards de dollars, a accepté récemment de payer une amende de 600 millions de dollars pour avoir manipulé des transactions sur des fonds communs de placement.

Mais aucun dirigeant de Prudential n’a été inculpé même si plusieurs courtiers sont poursuivis.

Walter Ricciardi, directeur-adjoint chargé de la régulation à la Commission des opérations en Bourse américaine (SEC), rappelle toutefois que l’enquête continue.

“L’enquête se poursuit, pas sur la société mais sur des personnes”, indique-t-il.

“Les bénéfices peuvent être si importants que les gens espèrent qu’ils ne seront pas repérés s’ils se laissent tenter par la fraude”, explique M. Ricciardi, affirmant que les régulations en vigueur doivent être appliquées avec fermeté.

Charlie Cray, un dirigeant du Center for Corporate Policy (Centre pour l’étude des politiques d’entreprise) à Washington, estime que les groupes qui se livrent à des opérations frauduleuses devraient être mis “sous surveillance” et soumis au contrôle d’un “représentant de l’intérêt public”.

“Je pense que montrer des dirigeants d’entreprise menottés envoie un message très clair, si les faits montrent que ce sont des personnes qui sont à l’origine du problème”, affirme-t-il.

Mais Jacob Zamansky se montre sceptique: “On pourrait croire que Wall Street et le monde de l’entreprise ont retenu la leçon, mais cela ne semble pas le cas”, déplore-t-il.

 04/09/2006 09:01:08 – © 2006 AFP