La colère des Libanais gronde face aux pertes accumulées par le blocus

 
 
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Travaux de reconstruction d’installations détruites par des frappes israéliennes à Sidon, le 1er septembre 2006 (Photo : Mahmoud Zayyat)

[05/09/2006 08:53:13] BEYROUTH (AFP) La colère gronde chez les chefs d’entreprise libanais face aux énormes pertes occasionnées par le blocus aérien et maritime qu’Israël continue d’imposer au Liban trois semaines après la fin de la guerre.

“Je n’arrive pas à comprendre le but de ce blocus”, affirme à l’AFP Elias Sfeir, propriétaire de l’entreprise Tools and Building Materials, reflétant un sentiment général de révolte parmi les chefs d’entreprise.

“Ce blocus ne vise plus le Hezbollah mais tout le peuple libanais”, ajoute M. Sfeir.

Il a précisé que 15 de ses containeurs remplis de biens estimés à 500.000 dollars étaient bloqués dans des ports étrangers depuis le début du blocus israélien le 13 juillet au lendemain du déclenchement des hostilités entre Israël et le puissant mouvement chiite libanais du Hezbollah.

“Si le blocus dure encore un mois, je devrai mettre la clef sous la porte et demander à mes 40 employés de rentrer chez eux”, souligne-t-il.

Pour Israël, le blocus vise à empêcher l’approvisionnement du Hezbollah chiite en armes et il ne sera levé qu’après un déploiement conséquent au Liban de forces internationales.

Les autorités libanaises estiment à 3,6 milliards de dollars les seuls dégâts matériels infligés au Liban durant le conflit qui a duré 34 jours (12 juillet-14 août) et que les pertes à long terme pour l’économie coûteraient des milliards supplémentaires au pays.

Le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) a récemment indiqué que les efforts de reconstruction entrepris par le Liban depuis 15 ans pour se relever de la guerre civile (1975-1990) avaient été anéantis par les récents bombardements israéliens.

Il évalue à “au moins à 15 milliards de dollars, sinon plus” l’ensemble des pertes économiques résultant pour le Liban de la dernière guerre.

Pour Mohammed Ali Abla, qui gère une entreprise important du lait en poudre d’Europe et d’Argentine, si le blocus persiste, des pénuries en tous genres frapperont le pays.

“J’avais un grand stock, mais il est à présent épuisé et les 150 tonnes de lait en poudre qui devaient arriver cet été sont bloqués à Anvers, Malte et d’autres ports”, indique M. Abla, qui estime ses pertes à 150.000 dollars.

Le blocus se fait déjà sentir dans certains magasins dont les étagères se vident davantage de jour en jour.

“Si le blocus continue, ce sera une catastrophe pour tout le secteur économique et tous les Libanais”, souligne Antoine Bou Samra, co-propriétaire de La Cigale, un traiteur de luxe. “Les affaires sont en chute libre, nous perdons 10.000 à 12.000 dollars par jour”.

Même son de cloche chez Sami Salman, directeur général de Trans Med, qui met en bouteilles des boissons gazeuses et de l’eau et importe des produits de consommation comme du détergent et du chocolat.

“Nous avons eu sans exagération 25 millions de dollars de pertes”, dit-il, précisant qu’il avait été contraint de licencier 10% de ses 800 employés.

“Nous aurons besoin de 5 à 7 ans pour surmonter les effets de ce blocus s’il est levé aujourd’hui”, assure M. Salman. “Mais s’il est maintenu, nous aurons besoin de bien plus de temps”.

Tous les chefs d’entreprise interrogés rejettent les justifications israéliennes du blocus, affirmant que les avions et les navires qui transportent les marchandises sont fouillés par leurs pays d’origine.

“J’importe des produits des Etats-Unis, d’Angleterre et d’Italie et ces pays ne peuvent être la source d’armement du Hezbollah”, s’insurge Sami Khouri, directeur de Teeba Holding, qui importe des huiles végétales, des surgelés, du sucre et des boites de conserve.

“Tout cela n’a aucun sens et sert à punir tous les Libanais”, dit-il.

 05/09/2006 08:53:13 – © 2006 AFP