Réforme du FMI : le plus dur reste à faire

 
 
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Le directeur général du FMI, Rodrigo Rato (2e G), aux côtés d’autres dirigeants du FMI et du président de la Banque Mondiale, Paul Wolfowitz (2e D), le 20 septembre 2006 à Singapour (Photo : Stephen Jaffe)

[20/09/2006 10:31:59] SINGAPOUR (AFP) Le Fonds monétaire international espère avoir regagné un peu de légitimité en commençant à donner plus de poids en son sein aux économie émergentes, mais l’essentiel de sa réforme interne reste à faire si l’institution de Bretton Woods veut rester crédible au 21ème siècle.

Le toilettage réalisé lors de l’assemblée annuelle qui s’est achevée mercredi à Singapour est encore cosmétique: les droits de vote (quote-part) de quatre pays, et donc leur influence sur les prises de décision, ont été légèrement relevés pour tenir compte de leur essor économique.

Il s’agit de la Chine, de la Corée du Sud, du Mexique et de la Turquie, choisie par ailleurs pour accueillir la prochaine réunion annuelle à l’étranger, à Istanbul, à l’automone de 2009.

Les autres grandes économies émergentes, comme l’Inde, le Brésil ou l’Argentine, devront attendre la deuxième étape du chantier de réforme ouvert à Singapour, au cours de laquelle seront redéfinis les critères retenus pour calculer le poids des 184 Etats membres.

Censée être bouclée dans deux ans, elle s’annonce difficile, car l’Europe et les Etats-Unis, qui dominent l’institution créée il y a 61 ans, vont s’efforcer de limiter au maximum leur perte d’influence.

“Il en va ici de la crédibilité et de la légitimité du FMI”, les a prévenus à Singapour le ministre indien des Finances Palaniappam Chidambaram.

New-Delhi a toujours une quote-part inférieure à des petits pays européens comme la Belgique ou les Pays-Bas et juge “totalement faussé” le système actuel, encore largement hérité de la donne de l’immédiat après Deuxième guerre mondiale: les pays riches du G7 détiennent à eux seuls près de la moitié des droits de vote du Fonds.

Le FMI n’a pourtant pas d’autre choix que de s’adapter à la mondialisation galopante s’il veut rester utile aux yeux de ses membres.

En cette période de forte croissance mondiale, il n’a aucune crise financière à gérer. Et les pays d’Asie et d’Amérique latine, jadis sous sa tutelle, ont largement remboursé leur dette, ce qui du reste pèse sur ses finances internes puisque celles-ci sont en partie alimentées par les intérêts sur les prêts accordés.

Le Fonds aura fort à faire pour se réconcilier avec ces deux continents, qui ont gardé un souvenir souvent amer des cures d’austérité imposées lors des crises financières ayant secoué ces régions.

“La mondialisation financière et le fait que les pays asiatiques détiennent l’essentiel des réserves de change dans le monde ont réduit la dépendance à l’égard du FMI”, souligne Mukul Asher, ancien responsable économiste à la National University de Singapore.

Les pays d’Asie ont également critiqué à Singapour une autre réforme en cours qui vise à renforcer le contrôle du Fonds sur les politiques économiques des Etats membres, notamment les questions de change. La Chine, accusée de maintenir artificiellement sa monnaie à un bas niveau pour soutenir ses exportations, redoute d’être placée sur la sellette.

Autre contentieux: la question de la présidence tant du FMI que de son institution soeur, la Banque mondiale, risque de revenir sur le tapis. En vertu d’un accord informel en vigueur depuis l’origine, les Européens se réservent la première et les Etats-Unis la deuxième. Washington jouit en outre de facto d’un droit de veto.

“Les Asiatiques ont le sentiment que le FMI ne peut pas s’opposer aux Etats-Unis”, estime Eisuke Sakakibara, qui enseigne la finance à l’Université Waseda de Tokyo.

Les pays émergents aiment à mettre en exemple l’Organisation des Nations Unies, avec son système de rotation par région pour le poste de secrétaire général. Le successeur de Kofi Annan sera un Asiatique.

La nouvelle répartition des poids des pays au sein du FMI, après le rééquilibrage opéré lors de la réunion de Singapour au profit de quatre grandes économies émergentes, Chine, Corée du Sud, Turquie et Mexique. Ils sont exprimés en pourcentage du total des droits de vote:

Ancien décompte Nouveau décompte
Etats-Unis 17,08% 16,79%
Japon 6,13% 6,02%
Allemagne 5,99% 5,89%
France 4,95% 4,86%
Grande-Bretagne 4,95% 4,86%
Chine 2,94% 3,67%
Italie 3,25% 3,20%
Canada 2,94% 2,89%
Russie 2,74% 2,70%
Pays-Bas 2,38% 2,34%
Belgique 2,13% 2,09%
Inde 1,92% 1,89%
Espagne 1,41% 1,39%
Brésil 1,41% 1,38%
Mexique 1,20% 1,44%
Corée du Sud 0,76% 1,33%
Turquie 0,45% 0,55%

 20/09/2006 10:31:59 – © 2006 AFP