[04/10/2006 12:12:21] BRUXELLES (AFP) Les services européens de la Concurrence ont porté un nouveau coup à La Poste mercredi en demandant à la France de supprimer la garantie financière dont elle bénéficie, après s’être déjà attaqués début juin à la distribution du Livret A par sa filiale la Banque postale. La Commission européenne “a adressé aujourd’hui à la France une recommandation proposant de mettre fin à la garantie illimitée dont bénéficie La Poste en tant que personne morale de droit public avant la fin de l’année 2008”, écrit-elle dans un communiqué. Une “recommandation” n’est pas contraignante, mais si Paris refusait d’obtempérer, la Commission pourrait ouvrir une enquête formelle, qui elle-même pourrait aboutir à une décision juridiquement contraignante. Contactée par l’AFP, La Poste n’a pas souhaité faire de commentaires. La garantie publique dont bénéficie La Poste lui permet de ne pas être soumise aux procédures d’insolvabilité et de faillite de droit commun. Et en cas de défaillance financière, c’est l’Etat qui serait tenu, en dernier ressort, de respecter ses engagements. En outre, cette disposition assure à l’établissement public une excellente notation financière, qui lui permet de se financer à des coûts très avantageux. Selon l’exécutif européen, “la nature illimitée de cette garantie permet à La Poste de se financer à des conditions plus favorables, ce qui place l’entreprise dans une position avantageuse par rapport à ses concurrents et crée ainsi une distorsion de concurrence sur un marché en voie de libéralisation”.
Les autorités françaises ont un mois désormais pour répondre à la Commission. Mais, étant donné qu’il s’agit d’aides d’Etat ayant été mises en place avant l’instauration de règles européennes en la matière, La Poste ne pourra en aucun cas être condamnée à rembourser les aides perçues jusqu’ici. Loin d’être inédite, cette affaire présente un air de déjà-vu. Le 16 décembre 2003, la Commission avait en effet déjà obtenu de l’Etat français la suppression d’une garantie publique similaire, concernant cette fois EDF. Paris s’était alors engagé à mettre fin pour le 31 décembre 2004 à cette garantie, qui permettait à l’électricien français de se financer à meilleur compte que ses concurrents sur les marchés des capitaux. La recommandation adoptée mercredi n’est en outre pas une grande surprise car le 21 décembre 2005, lorsqu’elle avait autorisé la création de la Banque postale, la commissaire à la Concurrence Neelie Kroes avait bien précisé que la garantie illimitée de La Poste ferait l’objet d’un examen séparé. Dès sa création, la France s’étant engagée à ce que la filiale bancaire de La Poste ne bénéficie “d’aucune garantie d’une quelconque nature que ce soit, directe ou indirecte, de la part de l’Etat”. La Banque Postale n’en était pour autant pas quitte avec Bruxelles, qui s’intéresse de près à deux autres points cruciaux: “le droit spécial de distribuer le Livret A” (un compte d’épargne où les intérêts sont exonérés d’impôts et pour lequel La Poste bénéficie d’un droit spécial de distribution depuis 1881) et “les régimes sociaux des personnels de La Poste mis à disposition de la Banque Postale”. Pour ce qui est du Livret A, les services de Neelie Kroes ont déjà commencé à sévir. Le 7 juin, ils ont engagé une procédure d’infraction et demandé à Paris de justifier l’exclusivité octroyée à la Banque postale. La procédure engagée mercredi constitue une victoire de taille pour les banques françaises qui contestent depuis des années la garantie illimitée de La Poste. En mai, elles avaient même déposé plainte à Bruxelles à ce sujet. |
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