Comme
réaction à cet article, je souhaite citer ci-dessous la position officielle
de l’Internet Society (ISOC) sur la transition de la coordination et de la
gestion technique du système des noms de domaine et d’adressage d’Internet
au secteur privé. Extrait du mot de Lynn St. Amour, Présidente de l’ISOC
lors de la réunion publique du département du commerce des USA –
Télécommunications et administration nationales de l’information (NTIA) :
” Washington, D.C.,
26 juillet 2006.
Fondée en 1992,
l’Internet Society (ISOC) est une association à but non lucratif qui fournit
des directions stratégiques sur les questions qui confrontent le futur de
l’Internet, grâce au soutien de ces piliers de travail : standards ouverts,
éducation et politique. Avec des bureaux à Washington, D.C. (USA) et à
Genève, (Suisse), nous nous consacrons au développement ouvert, à
l’évolution et à l’utilisation de l’Internet au profit de toutes les
personnes dans le monde entier.
L’ISOC a
approximativement 100 organisations, 80 chapitres internationaux et plus de
24.000 adhérents dans plus de 180 pays.
L’ISOC est
l’organisation qui héberge les groupes responsables des standards de
l’infrastructure de l’Internet, y compris l’Internet Engineering Task Force
(Groupement sur l’ingénierie de l’Internet – IETF), de l’Internet
Architecture Board (Comité sur l’architecture de l’Internet – IAB) et de
l’Internet Research Task Force (Groupement de recherche Internet – IRTF).
Ces organisations
jouent ensemble un rôle critique en assurant le développement de l’Internet
d’une façon stable et ouverte. Pendant plus de 14 années, l’ISOC a fait des
programmes internationaux de formation sur les réseaux pour les pays en voie
de développement et ces programmes ont joué un rôle essentiel dans
l’établissement de raccordements et de réseaux Internet autour du globe.
Pour être complet
et transparent, en 2002 la gestion de l’enregistrement des noms de domaine
en .ORG a été attribuée à l’ISOC à la suite d’un appel d’offre ouvert et
concurrentiel conduit par ICANN ; et une société avec un unique membre,
appelée Public Interest Registry (Registre d’intérêt publique – PIR), a été
établie à cette fin.
Mes commentaires
d’aujourd’hui sont construits sur la base de la position que nous avons
soumis au NTIA il y a plusieurs semaines (http://www.isoc.org
– en anglais). Nous espérons que la position de l’ISOC sera prise en
considération car il y a des points qui nous semblent très importants (comme
les commentaires sur l’IAB IANA, et les serveurs racines) mais que je
n’aurais pas le temps d’évoquer aujourd’hui en raison des contraintes de
temps.
L’ISOC croit que le
succès de l’Internet se situe dans le fait que c’est un «réseau des réseaux»
caractérisé par une gestion distribuée et un minimum de régulation. Les
mécanismes opérationnels et de gouvernance sont mis en application, autant
que possible, au niveau local sur la base de processus de bas en haut par
les communautés, ils sont construits sur des principes publiquement
développés. Ces principes et processus ont également permis à l’Internet de
se développer rapidement, de s’adapter à de nouvelles demandes et
opportunités (et en tant que tel c’est un modèle organique de
développement), et c’est là où la force et la stabilité du modèle d’Internet
se trouvent.
Cela signifie
également qu’aucune entité ou même aucun gouvernement ne peut «posséder» ou
«contrôler» l’Internet, et c’est encore vrai aujourd’hui. L’ISOC a toujours
soutenu le modèle d’autorégulation de l’Internet, et soutient fortement l’ICANN
et le rôle qu’il joue dans la coordination de certains aspects du modèle de
gestion «collaboratif» de l’Internet.
Le Département du
commerce des USA déclare que les étapes importantes du 6ème amendement au
Mémorandum, MOU (contrat), «sont prévues pour assurer que l’ICANN est une
organisation de gestion suffisamment stable, transparente, représentative,
efficace et durable, capable de prendre en charge les tâches du DNS dans le
futur».
L’ISOC croit que l’ICANN
a accompli de louables progrès au regard de ces étapes importantes et que
ses opérations sont suffisantes vis-à-vis du 6ème amendement. Bien qu’il y
ait toujours place pour des améliorations, nous croyons que l’ICANN, ses
organisations sœurs et leurs processus de support sont prêts à prendre en
charge la prochaine étape dans le mouvement de soutien à la gestion et au
développement de l’Internet dans le cadre d’un modèle du secteur privé,
comme envisagé par le gouvernement des USA en 1998.
Nous croyons qu’il
est temps d’aller vers un Mémorandum minimal et transitoire où le
gouvernement des USA joue un rôle de «butée» qui n’entrerait en jeu qu’en
cas d’échec organisationnel sérieux. De plus, étant donné que le principe du
MOU était la transition des responsabilités du gouvernement américain vers
le secteur privé, nous ne croyons pas que le Département du Commerce (USA)
doive constamment évaluer et diriger la performance de l’ICANN.
Plus cela durera,
plus il sera difficile de s’affranchir de ce modèle de supervision, comme
l’Internet et les organisations impliquées dans le nommage sont en
perpétuelle mouvance, il y aura toujours une «tâche» de plus à accomplir.
L’ISOC croit que ce
Mémorandum, comme il est construit, n’est ni nécessaire ni approprié à ce
niveau de développement de l’Internet et de l’ICANN. Le MOU d’aujourd’hui
place le Département du Commerce (USA) dans une position active, et dans une
certaine mesure dans une position où il se sent obliger d’inscrire certaines
activités dans l’agenda de l’ICANN.
De plus, le
principe d’une liste de «tâches» aujourd’hui employée risque de limiter les
approches et de contraindre la communauté de l’Internet en créant des
réponses aux problèmes complexes et changeant. Au fur et à mesure
qu’apparaissent de nouvelles avancées technologiques, soit dans
l’infrastructure sous-jacente, soit dans le développement de nouvelles façon
de naviguer sur l’Internet, soit dans des méthodes encore inconnues, le rôle
du Système des Noms de Domaines (DNS) sera évolutif. Nous devons nous
assurer que l’ICANN et les autres organisations impliquées dans le nommage
aient suffisamment d’autonomie pour pouvoir y répondre convenablement et ce
en suivant les modèles de développement et de direction qui ont été employés
ces 30 dernières années.
Ces modèles, qui
ont bien servit l’Internet jusqu’à ce jour, permettent à toutes les parties
(gouvernements inclus) d’avoir la chance de participer dans le développement
et la direction de l’Internet. Pour répéter, ces «taches» sont importantes
mais elles vont évoluer et ne devraient pas être inscrites spécifiquement
dans le Mémorandum même si elles seront prises en compte dans la cadre de
travail de l’ICANN. L’ICANN a besoin de libertés pour développer des
fonctions qui répondent à l’évolution continuelle de l’Internet, il est
grand temps de prendre cette étape suivante.
Finalement comme ce
Mémorandum est devenu dans les yeux de la communauté internationale un
symbole de l’autorité des USA sur le DNS, on peut se demander si ce
Mémorandum, qui a été fait originellement pour soutenir et démarrer l’ICANN,
n’est pas en fait, pour beaucoup, en train de nuire au développement de l’ICANN
et à sa raison d’être.
En résumé, bien que
nous reconnaissions et applaudissions l’approche légère que le gouvernement
américain a toujours tenu en relation avec l’Internet, il est temps que le
Département du commerce aille au bout de son approche et passe à une
gouvernance encore plus légère dans un rôle de «butée» uniquement. Cela
permettra au Département du commerce de s’intéresser à des enjeux plus
appropriés tels que la stabilité à long terme de l’ICANN, qui est aussi un
intérêt légitime de la communauté internationale.
L’ISOC croit qu’un
signal très clair doit être lancé au niveau international que nous entrons
dans une nouvelle phase et prenons les dispositions nécessaires pour un
transfert vers le secteur privé en suivant la vision originelle du
gouvernement américain. Nous ne croyons pas qu’il est nécessaire de
continuer le Mémorandum comme il est aujourd’hui structuré, et nous croyons
que l’ICANN est prête à prendre cette nouvelle étape dans sa transition, en
considération que le gouvernement américain jouera un rôle uniquement de
«butée» et non pas de supervision”.