Le Brésil se prépare à vivre un nouveau cycle du caoutchouc

 
 
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Un ouvrier fait une incision sur un plant d’hévéa dans une exploitation de caoutchouc de l’état brésilien de Bahia

[06/10/2006 07:51:53] SAO PAULO (AFP) Roi du latex autrefois, le Brésil va renouer avec son passé en multipliant par quatre sa production de caoutchouc dans les vingt prochaines années.

Avec le développement des plantations d’hévéas, la production de caoutchouc naturel devrait passer de 100.000 tonnes par an actuellement à 446.000 tonnes en 20 ans, selon le ministère de l’Agriculture. Un montant suffisant pour couvrir la consommation, alors que le Brésil importe 200.000 tonnes par an qui lui coûtent un milliard de dollars.

Mais contrairement au cycle du caoutchouc qui avait fait la fortune de l’Amazonie entre 1850 et 1910, le latex n’est plus extrait d’hévéas natifs dans la forêt amazonienne et provient de plantations, qui occupent actuellement 120.000 hectares. Leur superficie au cours des deux prochaines décennies devrait passer à 340.000 hectares.

Le fabricant français de pneumatiques Michelin a été l’un des principaux artisans de la renaissance du caoutchouc au Brésil.

“Il était traditionnellement impossible de faire de grandes plantations d’hévéas à cause de la maladie du microcyclus”, un champignon parasite qui attaque les feuilles, a expliqué par téléphone à l’AFP Bertrand Vigne, responsable du département caoutchouc naturel de Michelin.

Dans les années 80, des chercheurs ont découvert que dans le sud-est ou le centre-ouest du Brésil au climat plus sec, “le champignon qui a décimé les plantations amazoniennes n’attaquait pas”, a indiqué Joao Sampaio, responsable de la filière caoutchouc au ministère de l’Agriculture.

Michelin a d’abord planté des hévéas dans une zone non infectée par le microcyclus, le Mato Grosso (centre-ouest). “Parallèlement on a racheté des plantations à Bahia, zone traditionnellement attaquée par la maladie”, selon M. Vigne.

En partenariat avec des instituts de recherche, Michelin a sélectionné des variétés plus résistantes qu’il développe dans le Mato Grosso et dont il teste ensuite la résistance dans la région tropicale de Bahia.

Grâce à ces recherches, “l’avenir de l’hévéaculture au Brésil passera également par les zones tropicales humides”, assure Bertrand Vigne.

Michelin est aujourd’hui le premier producteur privé et transforme un quart de la production brésilienne de latex pour ses propres besoins.

Le premier pôle de plantations d’hévéas, devant le Mato Grosso, est toutefois une autre région non traditionnelle, l’Etat de Sao Paulo (sud-est) dont les cultures devraient passer de 60.000 à 250.000 hectares d’ici 2020, selon le ministère.

“Il y a trois ans, l’Etat de Sao Paulo en s’appuyant sur l’initiative privée a démarré un projet de développement des plantations”, a indiqué à l’AFP Joao Sampaio. “Nous sommes arrivés à la conclusion que le caoutchouc était un bon investissement”, souligne-t-il.

“Les prix internationaux du caoutchouc étaient au-dessus de la moyenne historique et notre productivité moyenne est supérieure à celle du sud-est asiatique”, affirme M. Sampaio. A savoir 1.400 kg par hectare et par an, contre 900 à 1000 kg/ha chez les principaux producteurs (Malaisie, Indonésie, Thaïlande).

De son côté Michelin soutient un projet de petites hévéacultures familiales dans la région de Bahia. “Nous n’avons pas aujourd’hui d’intention affichée de créer de grandes surfaces de plantation” du groupe, indique M. Vigne.

Selon Joao Sampaio, le Brésil pourrait même redevenir à terme exportateur de latex, avec un coup de pouce des pouvoirs publics. “Le caoutchouc est une culture de longue haleine qui demande des investissements élevés”, remarque-t-il.

Au tournant du XIXe siècle, le Brésil a connu un boum du caoutchouc, dont témoigne la construction de la ville de Manaus et de son célèbre opéra en pleine Amazonie.

Mais le développement de plantations dans le sud-est asiatique a sonné le glas de l’exploitation d’hévéas sauvages en Amazonie après 1910.

L’industrie pneumatique absorbe encore plus des deux tiers de la production mondiale de caoutchouc naturel, qui représente entre 20 et 40% du poids d’un pneu.

 06/10/2006 07:51:53 – © 2006 AFP