[06/10/2006 15:46:35] PARIS (AFP) Airbus a révélé une crise globale, sans précédent chez le constructeur aéronautique, en annonçant cette semaine de nouveaux retards de livraison d’un an de l’avion géant A380 et un plan d’économies drastique de 2 milliards d’euros par an. Ce plan se traduira par des suppressions d’emplois, à chiffrer d’ici la fin de l’année, sauf à la production dans cette société européenne de 57.000 salariés, pour économiser 30% sur le fonctionnement. Partie du fiasco de l’industrialisation de l’A380, la crise a conduit Airbus et sa maison mère EADS à un examen de conscience tous azimuts sur la responsabilité des anciens dirigeants comme sur la difficulté de l’ancien consortium à devenir une vraie société européenne intégrée. Son coût est tel, – 4,8 milliards d’euros de manque à gagner d’ici 2010 -, qu’EADS et Airbus s’interrogent sur leurs capacités financières et humaines à mener de front le redressement du programme A380 et le lancement de nouveaux programmes fondamentaux pour l’avenir.
Les nouveaux retards de livraison de l’avion de 555 à 840 places annoncés mardi, les troisièmes en 18 mois, sont pires que prévu par les analystes. Aucun avion livré en 2006, un seul en 2007 et 13 en 2008 selon le président d’Airbus Christian Streiff. Le précédent plan, à l’origine d’un effondrement boursier de 26% le 14 juin, prévoyait encore une livraison à Singapore Airlines fin 2006, 9 en 2007 et une trentaine en 2008. Le retard cumulé atteint deux ans et le titre a rechuté de plus de 10% en trois jours à ses niveaux de fin juin autour de 20 euros. Coupable, l’intégration des harnais électriques aux fonctions sophistiquées et variées demandées par les clients. Des difficultés “sous-estimées” en juin selon M. Streiff, qui a changé les hommes et mis en place les “outils informatiques communs” pour permettre aux équipes françaises et allemandes de redresser la barre.
Arrivé à la tête d’Airbus le 2 juillet pour remplacer Gustav Humbert balayé par la tourmente avec le co-président français d’EADS et ancien patron d’Airbus (1998-2005) Noël Forgeard, M. Streiff n’épargne pas ses prédécesseurs et veut rompre avec une culture de l’autosatisfaction. Le conseil d’administration d’EADS, désormais co-présidé par le Français Louis Gallois, et l’Allemand Thomas Enders a annoncé mardi “une analyse indépendante sur les responsabilités individuelles”, jusqu'”au niveau de la direction”. M. Streiff a confié au journal Le Monde “qu’Airbus n’est pas encore une société intégrée”, jugeant cependant avoir mis fin à certaines “subsistances de l’organisation du passé”. Les dirigeants d’Airbus et d’EADS tentent de surmonter la rivalité franco-allemande et de rassurer les politiques des deux côtés du Rhin sur les conséquences de la restructuration pour les grands sites de Toulouse et Hambourg. Face à un éventuel regroupement des activités A380 à Toulouse, M. Enders a réaffirmé jeudi “qu’Hambourg reste le deuxième site de production d’importance après Toulouse” et a insisté sur “l’équilibre” des pouvoirs et de la répartition des tâches. M. Streiff a assuré que les suppressions d’emploi, qui pourraient toucher d’abord les 4.500 salariés du siège toulousain, feraient l’objet d’une concertation avec les syndicats “d’ici novembre”, tandis que le gouvernement français envisage d’aider les sous-traitants en difficulté. Airbus doit maintenant relever les défis d’avenir: achèvement de l’avion de transport militaire A400M au calendrier “tendu”, lancement du long courrier A350XWB et relève de la famille A320, gagne-pain du groupe. La question A350 va être cruciale. M. Enders s’interrogeait jeudi sur la possibilité de lancer maintenant cet investissement de 9 milliards d’euros, alors que M. Streiff insistait sur la logique industrielle d’un programme “fondamental” face au futur 787 de Boeing. |
||||||
|