OPA, Poste, PMU : la Commission européenne braque ses projecteurs sur la France

 
 
SGE.BES59.121006090310.photo00.quicklook.default-202x245.jpg
Photomontage des enseignes du PMU et de la Poste

[12/10/2006 09:13:15] BRUXELLES (AFP) Après avoir été déjà malmenée au premier semestre, la France va de nouveau essuyer jeudi le courroux de la Commission européenne avec trois avertissements en une seule et même journée, sur les personnels de La Poste, le décret anti-OPA et enfin le monopole du PMU.

“Il est très improbable qu’il y ait une stratégie délibérée de la Commission contre la France”, relativise Me Antoine Gosset-Grainville, avocat français spécialisé dans les questions de concurrence. “Il s’agit plutôt de cas qui s’inscrivent dans des démarches globales de la Commission”.

En outre, souligne-t-il, “à la différence de l’Espagne ou de l’Italie, la France n’a pas été prise en situation d’infraction flagrante”.

Si la coïncidence jeudi des trois procédures tient du hasard, elle n’en fera pas moins à Paris l’effet d’une douche froide, car les trois dossiers concernés sont d’une grande importance pour la France.

La claque la plus forte devrait concerner les prérogatives françaises en matière de contrôle des fusions. Rebaptisé “décret anti-OPA” par ses détracteurs, le texte incriminé a déjà fait couler beaucoup d’encre.

Paru fin 2005 au journal officiel de la République française, il vise à protéger les entreprises contre des prises de contrôle étrangères dans onze secteurs qualifiés de “stratégiques”, allant des casinos à la cryptologie, en passant par la production d’antidotes.

Après plusieurs mois de virulentes mises en garde, tant de la commissaire à la Concurrence Neelie Kroes que de son collègue au Marché intérieur, Charlie McCreevy, la Commission a finalement sévi le 4 avril, en ouvrant la première étape d’une procédure d’infraction.

Charlie McCreevy craignait alors que certaines dispositions du décret ne soient “disproportionnées” et “discriminatoires” et “ne dissuadent les investissements provenant d’autres Etats”.

Insatisfaite des aménagements proposés par Paris, la Commission devrait passer jeudi à la vitesse supérieure et adopter un avis motivé, dernière étape avant une saisine de la Cour européenne de Justice.

Mais Charlie McCreevy ne s’arrêtera pas là. Dans une seconde procédure, l’Irlandais devrait également clouer au pilori le monopole du Pari mutuel urbain (PMU) dans le secteur des paris sportifs.

Bruxelles soupçonne que les privilèges accordés par l’Etat français au PMU constituent une discrimination vis-à-vis des opérateurs privés qui souhaitent pénétrer sur ce marché.

Selon une source européenne, l’Autriche et l’Italie devraient également être épinglés. Le 4 avril, la Commission avait déjà lancé des procédures de ce type à l’encontre de 7 Etats membres.

Dans ses assauts contre Paris, Charlie McCreevy sera accompagné jeudi par la commissaire Kroes, qui devrait s’attaquer une nouvelle fois au statut de La Poste.

Alors que la France aurait pu en décembre se considérer comme épargnée, après la bénédiction communautaire à la création de la Banque postale, le retour de bâton ne s’est pas fait attendre.

D’ailleurs, le 21 décembre, la commissaire avait bien prévenu qu’elle autorisait la Banque postale mais qu’elle se gardait trois dossiers sous le coude: la distribution exclusive par la Banque postale du Livret A, la garantie financière illimitée dont bénéficie La Poste et enfin les régimes sociaux de certains de ses personnels.

Après avoir ouvert le feu en juin sur le volet Livret A, puis avoir demandé il y a une semaine la suppression d’ici 2008 de la garantie publique, c’est le système de financement des fonctionnaires retraités de La Poste que la Commission ciblera jeudi.

Alors qu’aujourd’hui c’est la Poste qui finance elle-même les retraites de ses fonctionnaires, l’Etat français prévoit de reprendre ces charges sociales à son compte, en échange d’une compensation de l’établissement public.

La Commission ouvrira jeudi une enquête approfondie sur ce projet de réforme car elle craint que cette compensation ne soit insuffisante et que l’allègement accordé par Paris ne constitue une aide d’Etat déguisée.

 12/10/2006 09:13:15 – © 2006 AFP