[13/10/2006 17:46:26] PARIS (AFP) L’UFC-Que Choisir a déposé vendredi en justice 12.521 demandes d’indemnisation de consommateurs, motivées par la condamnation des opérateurs mobiles pour entente illicite: le “parfait exemple”, selon elle, de la nécessité d’introduire en France les actions collectives. “Nous avons vingt millions de victimes, mais seules 0,06% d’entre elles seront peut-être indemnisées”, a déclaré à la presse Alain Bazot, président de l’association de défense des consommateurs. “Le droit existant ne permet qu’une juxtaposition d’actions individuelles: l’opération +Cartelmobile+ en est le parfait exemple”, a ajouté Charlotte Dekeyser, juriste à l’UFC-Que Choisir. Le dépôt de ces plaintes a donné lieu à un coup médiatique de l’association, avec le départ, devant les caméras des journalistes, des 120 cartons contenant les dossiers, dans quatre camionnettes, vers le tribunal de commerce de Paris. Sur ces 12.521 demandes, 4.728 concernent Orange, 4.187 SFR et 3.606 Bouygues Telecom, pour un préjudice moyen de 65 euros. Les clients réclament 820.000 euros aux opérateurs et l’association 410.000 euros pour dommages et intérêts et le remboursement des frais d’avocat. Elle espère une décision à l’été ou la rentrée 2007. Le tribunal rendra un seul jugement pour tous les dossiers mais devra examiner, une par une, chacune des demandes pour déterminer les préjudices, d’où le risque d’un embouteillage juridique.
Le choix de la téléphonie mobile comme exemple de l’inadaptation du système français aux demandes des consommateurs n’est pas anodin: populaire, elle est utilisée par quatre Français sur cinq; critiquée sur ses tarifs, elle a été condamnée pour entente en novembre 2005 par le Conseil de la concurrence. Ce dernier a infligé une amende record de 534 millions d’euros aux opérateurs, estimant qu’ils se sont entendus entre 2000 et 2002 pour geler leurs parts de marché, maintenant ainsi leurs prix à un niveau artificiellement élevé. Le jugement en appel est prévu le 12 décembre. Dès la condamnation, l’UFC-Que Choisir avait souligné le fait que l’Etat récupérait le montant de l’amende mais pas les clients, pourtant premières victimes de cette entente. Elle estimait alors leur préjudice à 1,2 milliard. Dix mois plus tard, la somme réclamée est plus de mille fois inférieure: l’association a mobilisé seize juristes et déboursé 500.000 euros en frais de gestion, sa plus grosse dépense depuis plus de trente ans. Mais elle n’a pas pu accueillir tous les plaignants. Ces derniers ont été rebutés par la nécessité de constituer un dossier complet: sur les 220.000 qui se sont inscrits sur le site Cartelmobile, seuls 35.000 dossiers ont été déposés, mais un tiers seulement était complet. “Avec une véritable action de groupe, la quasi-totalité des victimes aurait été indemnisée, sans que l’association n’engage des frais exceptionnels et sans encombrement des tribunaux”, a estimé M. Bazot. Ce dernier a profité de l’opération médiatique pour faire pression sur les pouvoirs publics. Il plaide pour une “véritable action de groupe”, différente de celle du projet de loi sur la consommation qui “engendre une ré-individualisation au moment de la réparation”, chaque victime devant se retourner vers le professionnel si ce dernier est condamné. Mais il a estimé que “le pire serait de ne pas avoir de loi” et exigé “du courage politique”. |
||||
|