Nucléaire : alliance “historique” entre Français et Japonais pour construire un réacteur

 
 
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La présidente d’Areva Anne Lauvergeon (g) et le président de Mitsubishi Heavy Industries Kazuo Tsukuda lors d’une conférence de presse, le 19 octobre 2006 à Tokyo (Photo : Yoshikazu Tsuno)

[19/10/2006 10:16:12] TOKYO (AFP) Le groupe nucléaire français Areva et le japonais Mitsubishi Heavy Industries (MHI) ont conclu jeudi un accord pour mettre au point un réacteur de 3e génération, le premier pacte de ce type jamais signé au Japon par un acteur non américain et qui vise le marché des Etats-Unis.

C’est la première fois qu’Areva pose un pied dans le monde très fermé de la construction de réacteurs nucléaires japonais, chasse gardée des géants locaux Toshiba, Hitachi et Mitsubishi Heavy, lesquels utilisent exclusivement, sous licence, des technologies des américains Westinghouse ou General Electric.

“Cet accord est historique, car on sort d’un système nippo-américain pour entrer dans un système ouvert”, s’est félicité la présidente d’Areva, Anne Lauvergeon, devant les journalistes.

Signé jeudi à Tokyo, l’accord prévoit la mise au point en commun d’un réacteur de troisième génération de 1.000 mégawatts (MW), avec l’ambition affichée de conquérir une partie du marché nord-américain.

S’il n’est pas le plus puissant sur le marché, ce type de réacteur répond à une demande croissante des compagnies électriques partout dans le monde, car il permet un bon équilibre entre l’investissement initial et le rendement futur.

Les réacteurs les plus gros, et donc les plus chers à construire, sont en effet ceux qui coûtent le moins cher une fois en service.

Un réacteur moyen-de-gamme de 1.000 KW “correspond tout à fait au marché américain”, mais aussi à celui des pays dont les réseaux électriques ne sont pas assez solides pour supporter des réacteurs de grande taille (Asie du Sud-Est, Europe orientale, etc.), a précisé la présidente d’Areva.

Le futur réacteur sera également un des plus sûrs, capable de résister à l’impact d’un avion s’écrasant dessus.

Il générera, en outre, 15% moins de déchets nucléaires que l’actuel réacteur de 3e génération EPR.

Le mettre au point devrait prendre trois ans, et le premier exemplaire pourrait entrer en service d’ici une dizaine d’années au plus tard.

Areva et MHI travaillent sur un réacteur de ce type depuis plusieurs années, jusqu’à présent chacun de leur côté.

“Nous allons rapprocher ce que nous avons déjà fait, prendre le meilleur de chaque côté et développer un marketing commun pour le vendre”, a expliqué Mme Lauvergeon, selon qui “en partant de l’état d’avancement où nous en sommes de part et d’autre, nous irons beaucoup plus vite que si nous partions de zéro”.

Areva était déjà présent dans toutes les étapes de la chaîne nucléaire civile au Japon, sauf dans la construction de réacteurs.

Négociée au pas de charge (les pourparlers ont démarré pendant l’été), l’alliance tombe également à pic pour Mitsubishi Heavy, qui a récemment vu son allié américain Westinghouse tomber entre les mains de son concurrent Toshiba, le privant de partenaire international sur lequel s’adosser.

“L’achat de Westinghouse a amorcé la restructuration nucléaire mondiale, c’est sûr”, a reconnu le président de MHI, Kazuo Tsukuda.

Il a expliqué qu’après s’être fait coiffer au poteau par Toshiba pour l’achat de Westinghouse, son groupe avait examiné plusieurs ripostes, dont une alliance avec l’américain General Electric.

Mais Areva “était le meilleur choix, en raison de la proximité de nos deux cultures industrielles et de sa présence sur les marchés mondiaux”, et parce que “les synergies avec General Electric sont moins importantes que celles que l’on peut attendre d’Areva”, a expliqué M. Tsukuda.

MHI est déjà très internationalisé, sauf pour la construction de réacteurs, où il se cantonne au Japon. “Nous ne pouvons pas travailler uniquement le marché japonais, il faut viser le marché mondial”, a affirmé le patron du groupe nippon.

L’accord prévoit également une collaboration dans les domaines de l’approvisionnement en grands composants pour centrales nucléaires, et dans les recherches concernant les futurs réacteurs à gaz de quatrième génération.

 19/10/2006 10:16:12 – © 2006 AFP