Les acteurs de l’économie informelle cherchent une place côté syndical

 
 
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Des vendeurs de rue à Abidjan, le 28 septembre 2004 (Photo : Issouf Sanogo )

[01/11/2006 14:08:46] VIENNE (AFP) Les acteurs de l’économie informelle, présents au lancement de la Confédération syndicale internationale (CSI) à Vienne, cherchent à se faire une place auprès des syndicats qui commencent peu à peu à reconnaître cette population hétérogène et fragile.

Vendeuses de rue en Inde ou menuisiers métalliques au Sénégal, les centaines de millions de travailleurs de ce secteur économique représenteraient plus de 50% de la population active en Afrique et en Amérique latine, et plus de 60% en Asie, dont 90% en Inde — avec une majorité de femmes, sans compter des dizaines de millions d’enfants, selon le Bureau international du travail.

Mais les contours flous du secteur informel – en plein essor avec la mondialisation – a pendant longtemps rebuté les syndicats établis.

“Les syndicats traditionnels ne nous ont pas considérés comme de +vrais travailleurs+ pendant longtemps”, explique Renena Jhabwala, du syndicat indien Self-employed women’s association (SEWA, association des travailleuses non salariées), créé en 1972 et qui compte 800.000 membres.

Ce syndicat prend en charge des situations professionnelles très diverses: vendeuses dans les rues, couturières à domicile, journalières dans l’agriculture, productrices à petite échelle, etc.

A la différence des salariés du secteur formel employés par un patron unique, ces femmes ont souvent plusieurs employeurs. “Nos revendications partent des besoins des femmes et d’eux seuls”, souligne Mme Jhabwala.

Confrontés à leur propre affaiblissement, les syndicats traditionnels reconnaissent peu à peu la nécessité de soutenir ces travailleurs de l’ombre.

Dans son projet de programme, la CSI propose ainsi “d’élargir l’opportunité d’une affiliation syndicale à la main-d’oeuvre non organisée”. Il stipule aussi que “les syndicats doivent organiser toutes les travailleuses et tous les travailleurs dans leurs différentes sphères d’activité, et notamment les centaines de millions de personnes qui travaillent dans l’économie informelle”.

“Nous travaillons de plus en plus avec les syndicats, au niveau international comme national, et sommes désormais reconnus comme interlocuteurs à part entière, ce qui n’était pas le cas il y a encore dix ans”, se réjouit Pat Horn, coordinatrice de la fédération StreetNet International, un réseau de soutien aux vendeurs de rue, installé à Durban (Afrique du Sud) et invité à Vienne comme observateur.

Mme Horn attend désormais de la CSI “une solidarité internationale” qui permette de conquérir de nouveaux droits pour les travailleurs informels.

Président du Réseau intercontinental de promotion de l’économie sociale et solidaire, une association, dont le siège est à Dakar et qui est venue à Vienne en observateur, Abdou Salam Fall estime néanmoins que la CSI doit encore “reconnaître le rôle de l’économie sociale et solidaire dans un environnement économique changeant”.

M. Fall prend l’exemple des nombreux salariés de l’économie publique en Afrique “qui se sont retrouvés au chômage à cause des plans d’ajustements structurels du Fonds monétaire international” menés depuis les années 80.

“Nous aidons les salariés qui ont perdu leur emploi à cause des plans d’ajustements structurels du FMI à se lancer comme petits entrepreneurs”, raconte-t-il, prenant l’exemple d'”ex-salariés de la métallurgie devenus menuisiers métalliques pour la fabrication d’outils”.

Ces travailleurs, seuls ou à plusieurs dans de petites structures de type coopératives, “ont besoin de nouvelles formes d’organisations collectives”, comme des mutuelles pour leur octroyer une protection sociale.

Le salariat n’est plus la norme “et les syndicats doivent s’y adapter”, conclut M. Fall.

 01/11/2006 14:08:46 – © 2006 AFP