Chine : les réserves de change franchissent un cap symbolique

 
 
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Une femme compte des liasses de billets de 100 yuans dans une banque de Nanjing

[06/11/2006 14:08:12] PEKIN (AFP) Portées par un commerce extérieur florissant, les réserves de change de la Chine, les premières au monde depuis février, ont dépassé le chiffre symbolique des mille milliards de dollars, un record susceptible de nourrir les inquiétudes.

Cette annonce faite lundi par la télévision citant l’Administration du contrôle des changes était attendue.

En effet, les réserves de change, qui ont augmenté de près de 19 milliards en moyenne chaque mois depuis janvier, atteignaient déjà fin septembre 987,9 milliards de dollars, l’équivalent record de quelque 55% du produit intérieur brut de la Chine (1.790 milliards de dollars fin septembre).

Reflet de la puissance économique du pays, représentant plus de 15 mois d’importations, elles apportent au pays le confort de savoir où puiser en cas de crise.

Mais elle signifient beaucoup de pression sur le yuan et entraînent une forte stimulation de l’économie que le gouvernement peine à freiner.

“Plus vous en avez, plus stable vous serez si une crise éclate. Mais une croissance trop rapide revient à une injection de cocaïne dans les veines de l’économie”, explique Stephen Green, économiste de Standard Chartered.

S’inquiétant de leur progression, le vice-président chinois Zeng Qinghong affirmait l’été dernier que l’ampleur des réserves “avait accru les risques sur le taux de change et mis davantage de pression à la hausse sur le yuan”.

Les analystes s’inquiètent aussi parce qu’elle sont le fruit d’une croissance “déséquilibrée”, principalement fondée sur les investissements étrangers dans le pays et surtout sur les exportations, dont le volume atteignait 691,2 milliards de dollars fin septembre.

“La croissance rapide de ces réserves résulte de déséquilibres à long terme”, souligne Zhang Taowei, professeur à Pékin.

“La Chine n’a pas besoin de tant de réserves, qui (…) affectent la politique de la banque centrale”, estime de son côté Sun Lijian, universitaire shanghaïen.

L’institution qui lutte contre l’excès de liquidités est ainsi prise entre deux feux lorsqu’elle rachète les devises entrant dans le pays, injectant, du coup, des yuans dans l’économie.

Pareillement, sa détermination à laisser le yuan s’apprécier progressivement diminue la valeur de ses avoirs en dollars.

Par ailleurs, la nature de ces réserves, majoritairement en dollars, est une question très débattue en Chine. Certains prônent leur diversification, voire leur utilisation pour acquérir des ressources stratégiques ou investir dans le système social défaillant.

Le vice-gouverneur de la Banque, Mme Wu Xiaoling, souhaitait ainsi en juin que les réserves de change des pays et le commerce international soient moins “dépendants de la monnaie d’un seul pays”, visant implicitement le dollar.

Un mois plus tard, le Bureau National des statistiques se prononçait pour “l’accélération de leur diversification, pour réduire le risque de pertes des avoirs en dollars”.

“La Chine veut améliorer la gestion de ses réserves à cause des prévisions selon lesquelles le dollar à long terme va chuter”, indique Ding Zhijie, un universitaire de Pékin.

Mais c’est aussi précisément pour réduire ces risques de pertes que la Chine, selon les experts, ne tentera pas une diversification brutale.

“Vendre de larges montants en dollars reviendrait à provoquer un effondrement de cette monnaie et donc à s’auto-infliger des pertes”, souligne Callum Henderson, de Standard Chartered à Singapour.

“La solution sera de freiner progressivement la croissance des réserves, mais cela prend du temps”, estime Ha Jiming, un économiste de Hong Kong.

Et d’accélérer le mouvement entamé ces derniers mois pour permettre davantage de sorties de capitaux du pays.

 06/11/2006 14:08:12 – © 2006 AFP