[12/11/2006 10:09:35] BEYROUTH (AFP) Inquiets d’une crise politique qui mine le Liban, menace de ralentir la reconstruction et l’arrivée de l’aide internationale, les acteurs économiques appellent les dirigeants du pays à faire taire des divisions potentiellement désastreuses. “Vous n’avez pas le droit d’entraîner le pays dans l’abîme pour satisfaire vos objectifs politiques”, proclame un appel publié samedi dans la presse, co-signé par les chefs du patronat libanais et des syndicats. Au nom de la “société civile”, ce cri d’alarme se veut une réponse à la crise politique, latente depuis les élections du printemps 2005 qui avaient marqué l’arrivée au pouvoir des forces anti-syriennes, plus aiguë de jour en jour depuis la guerre qui a opposé en juillet-août Israël aux combattants du Hezbollah chiite. Dans le prolongement de cette guerre, le Hezbollah, puissante organisation politique et militaire, exige pour lui et ses alliés une influence accrue au sein du gouvernement. Samedi, les cinq ministres chiites ont annoncé leur démission, rejetée par le Premier ministre Fouad Siniora. “Au lendemain de la guerre de l’été, tout se préparait pour que nous amorcions la reconstruction et la remise en selle de l’économie. Toutes les occasions nous sont offertes: le monde arabe, l’Europe, le Japon, même les Etats-Unis sont prêts à aider le Liban”, souligne Adnane Kassar, le président du patronat libanais. “Mais nous avons été déçus par la classe politique. Qui va nous aider dans ces conditions? Il en va de l’avenir de notre pays”, ajoute M. Kassar, qui s’est tourné vers la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL) et son président, Ghassan Ghosn, pour lancer cet appel commun inédit. Pour l’économiste Kamal Hamdane, les risques si la crise s’éternise “sont énormes”, de surcroît après la guerre qui a lourdement frappé les infrastructures et entraîné 3,6 milliards de dollars de dégâts. “Après une croissance nulle en 2005, les prévisions donnent désormais une croissance négative de 2 à 8 pour cent du PIB pour 2006, alors qu’un croissance positive de 5 à 6 pour cent était attendue pour 2005 et 2006”, explique M. Hamdane. Très lourde déjà avant la guerre, la dette publique devrait atteindre 41 milliards de dollars fin 2006 soit quelque 185 % du PIB.. “A cela, poursuit l’économiste, s’ajoutent les conséquences de la guerre sur le plan social où une grande partie des indicateurs sont à la baisse, surtout dans les régions touchées” par le conflit. Une enquête auprès de petites et moyennes entreprises de la région de Beyrouth en octobre a par exemple mis en exergue “une baisse du nombre des employés de 7 %” par rapport à mai, indique Kamal Hamdane. Alors que le gouvernement a déjà encaissé plusieurs centaines de milliers de dollars d’aide étrangère et que se prépare pour fin janvier à Paris une conférence internationale de soutien à l’économie libanaise, “les divisions et le chaos risquent de nuire sensiblement à l’arrivée de l’aide”, estime M. Hamdane. Jean-Paul Depecker, chef de la mission économique française pour le Proche-Orient, souligne cependant qu’il n’existe aucune “conditionnalité politique à l’attribution de l’aide”, mais un “dialogue permanent sur la nécessité de mettre en place des réformes et de réduire la dette”. Tous les interlocuteurs étrangers du Liban, assure pourtant Kamal Hamdane, “comprennent bien qu’en l’absence de normalisation politique, l’acheminement de l’aide va être affecté de manière négative”. Le démarrage de la reconstruction, relève-t-il, “prendra quoi qu’il en soit du temps. Mais il est évident que l’aministration publique ne parviendra pas à accélérer le processus tant que les grands dossiers politiques ne seront pas réglés”. |
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