Les critiques françaises contre l’euro fort sans conséquences sur le marché

 
 
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Le siège de la Banque centrale européenne à Francfort en 2005 (Photo : John MacDougall)

[15/11/2006 18:21:26] LONDRES (AFP) Les critiques de la France contre l’euro fort et la Banque centrale européenne, accusés de pénaliser la croissance, n’ont guère ému le marché des changes qui juge très limitée l’influence des hommes politiques dans ce domaine sensible.

L’euro continuait à évoluer aux alentours de 1,28 dollar mercredi, au lendemain de la mise en cause de la politique monétaire européenne, les cambistes se montrant peu impressionnés par la charge. La monnaie unique a pris environ 8,5% depuis janvier par rapport au dollar.

Le Premier ministre français Dominique de Villepin a proposé mardi que l’Union européenne se dote d’une “véritable stratégie de change” intégrant des objectifs de croissance, de protection de l’industrie et d’emploi, appel en filigrane à un euro plus faible. Le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy et des responsables de l’opposition socialiste ont tenu des propos similaires.

“Je ne vois vraiment pas comment on peut dire des Etats-Unis qu’ils manipulent le dollar”, s’étonne Steven Saywell, économiste à la Citibank à Londres. Au contraire, le pouvoir d’achat relativement élevé du dollar est souvent tenu pour responsable des déséquilibres de l’économie américaine, dont les consommateurs sont avides de produits importés à vil prix.

Quant au yen, sa faiblesse est due aux taux d’intérêt très bas au Japon, et la Banque du Japon (BoJ) n’a pas été prise en flagrant délit d’interventionnisme depuis longtemps.

“On comprend que les politiques européens s’inquiètent de voir l’euro pénaliser les exportations – encore qu’elles ne se portent pas si mal que ça – mais Villepin se trompe de cible en dénonçant des manipulations de taux de change”, estiment pour leur part les économistes d’ABN Amro.

Derrière les commentaires des hommes politiques, c’est la Banque centrale européenne (BCE), accusée d’être obsédée par la lutte contre l’inflation et la défense d’une monnaie forte, qui est visée. Son taux d’intérêt directeur, établi à 2% en décembre 2005, devrait atteindre 3,50% le mois prochain, peut-être plus en 2007, ce qui entretient la dynamique haussière de l’euro.

Depuis le lancement de la monnaie unique en 1999, la politique de change est source de tensions entre la BCE et des gouvernements impuissants à peser sur la procédure de décision.

Ces conflits récurrents sont en partie alimentés par l’ambiguité du traité de Maastricht, qui a donné naissance à l’euro, sur la question des changes. S’il donne le soin à la BCE dans son article 105 de “conduire les opérations de change”, il souligne dans le même temps que les gouvernements peuvent “formuler les orientations générales de politique de change”.

L’Allemagne, grande puissance exportatrice, ou encore l’Italie, ont aussi critiqué l’euro fort dans le passé. En outre, les relations entre le président de l’Eurogroupe (forum des ministres des Finances de la zone euro), le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker et celui de la BCE, Jean-Claude Trichet, sont de notoriété publique plutôt tendues.

L’Eurogroupe aimerait avoir davantage son mot à dire dans la conduite de la politique de la BCE, qui refuse toute intrusion.

 15/11/2006 18:21:26 – © 2006 AFP