[20/11/2006 12:10:42] PARIS (AFP) La partie de poker menteur qui se joue depuis des semaines entre le gouvernement, Gaz de France et Suez autour de la fusion entre les deux groupes énergétiques atteint son paroxysme, au début d’une semaine décisive qui verra les conseils d’administration valider le projet. Le ministre de l’Economie Thierry Breton a carrément menacé lundi que l’Etat, actionnaire de Gaz de France à 80%, dise “non” à ce mariage si les actionnaires du groupe privé étaient “trop gourmands”. “Ce n’est pas parce que l’Etat est l’un des actionnaires qu’il faut estimer qu’on est en mesure de lui demander plus que l’équité, et donc je ne paierai pas un sou de plus que ce qu’il faut payer”, a-t-il insisté sur Europe 1. Cette éventualité n’avait jusqu’ici jamais été affirmée publiquement. L’Etat déclare pour la première fois qu’il est prêt à assumer un échec d’un projet de fusion qu’il porte à bout de bras depuis près de neuf mois, contre les syndicats, la gauche et une partie de sa propre majorité, si les conditions financières du mariage lui paraissent exorbitantes. Lors de l’annonce du mariage, en février, les deux groupes et l’Etat s’étaient mis d’accord pour qu’une action Suez donne droit à une action Gaz de France, après versement d’un dividende exceptionnel de 1 euro au profit des actionnaires de Suez.
Les deux PDG employaient alors une formule sibylline, affirmant que “la parité était équitable au début de l’année” et devrait “l’être à la fin de l’année”, lorsque la fusion aurait effectivement lieu. Depuis, les deux groupes ont publié des résultats financiers, et surtout le cours des actions a évolué à la Bourse, celle de Suez prenant une avance presque constante de trois euros sur celle de GDF. Les petits actionnaires du groupe privé ont été les premiers à réclamer un relèvement du dividende, et nombre d’observateurs du marché s’accordent pour le juger inévitable. Raymond James Euro Equities tablait lundi matin sur un relèvement à “2-3 euros”, tandis qu’une source proche des syndicats de Gaz de France affirmait que la question était déjà tranchée, à 3 euros. GDF a refusé de commenter cette affirmation. Samedi, le PDG de Suez Gérard Mestrallet a choisi le cadre d’un salon de petits actionnaires à Paris pour affirmer que son groupe pèserait pour verser un plus gros dividende à ses actionnaires. “C’est bien notre intention”, a-t-il dit.
Pour sa part, Gaz de France renvoie la balle dans le camp de son actionnaire principal, l’Etat. Le juste prix sera celui “qui pourrait être accepté par nos actionnaires, tous nos actionnaires”, a déclaré la semaine dernière son PDG, Jean-François Cirelli. Le fond du problème est que chaque euro de dividende supplémentaire vide les caisses de Suez de 1,2 milliard d’euros, rendant donc le projet pour Gaz de France moins intéressant puisqu’il absorbe une entreprise aux caisses allégées. “Il y a un moment où l’Etat doit se préoccuper de la valeur de ses actifs”, selon une source proche du gouvernement. Toutefois, la décision pourrait déjà être prise puisque les conseils d’administration des groupes sont convoqués mercredi matin pour valider les conditions de la fusion. Lundi, comme chaque semaine depuis le lancement du projet, se tenait une réunion des équipes dirigeantes ultra resserrées des deux groupes, baptisée “G10”. “On ne peut pas être plus dans la dernière ligne droite”, a déclaré lundi un porte-parole de Suez. |
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