[21/11/2006 09:13:56] PARIS (AFP) Ils ne portent pas d’arme, ne tendent pas d’embuscades aux GI’s en Irak ou en Afghanistan mais, derrière le clavier de leurs ordinateurs, ils sont des milliers dans le monde à mener le “Jihad électronique”. Au cours des dernières années, des sites islamistes se sont spécialisés dans l’organisation et la coordination de cybercampagnes offensives visant des sites web israéliens, américains, catholiques ou danois. Dans l’anonymat du cybermonde, il suffit d’une adresse enregistrée en Irak ou dans les zones tribales du Pakistan et de connaissances informatiques de base pour mener des attaques concertées, auxquelles participent des internautes des quatre coins du globe. “Ce sont eux qui ont visé le site du journal (danois) Jyllands-Posten” qui avait publié les caricatures controversées de Mahomet et “qui avaient relayé la campagne anti-produits danois” explique Anne Giudicelli, spécialiste française, au sein de son cabinet de conseil parisien “Terrorisk”, de la surveillance des sites islamistes. “C’est la version internet du jihad : on peut y télécharger des virus, qui seront activés à la date prévue… J’en ai chargé un qui s’appelait +jihad reminder+: j’arrive plus à m’en débarrasser”. Un rapport récent de la Jamestown Foundation américaine signale le site web “Electronic Jihad” (http://www.al-jinan.org) sur lequel on peut se procurer par exemple le virus “Electronic Jihad Program 1.5, silver edition”. Il propose aussi d’installer sur votre PC une barre d’outil qui se connecte ensuite automatiquement et récupère les dates, horaires et cibles des attaques. “Dans les forums islamistes, on trouve des sections jihad électronique, au même titre que comment fabriquer des bombes”, poursuit Anne Giudicelli. “Comment cyber-attaquer. Cela fait partie de la formation du jihadiste de base, désormais”. Pour Jean-Pierre Filiu, professeur à Sciences-Po et auteur du livre Les frontières du jihad, “nous assistons à une impressionnante jihadisation de la toile islamique”. “Il y a dix ans, on regardait entre potes des vidéos tournées en Tchétchénie ou en Algérie, généralement assez gore. Aujourd’hui, on trouve sur le net des documents au moins aussi obscènes en termes de violence mais qui ont une diffusion majeure : le forum islamiste médiatique mondial, créé en 2003, propose en ligne environ 500 films à télécharger…” “Il y a sans doute un deuxième rideau, accessible qu’aux initiés avec des mots de passe sophistiqués, mais ce premier cercle, totalement ouvert sur la toile, permet d’éveiller des vocations, de les alimenter et de faire circuler une propagande dont on mesure mal en Occident le côté dévastateur”, poursuit-il. De nombreux forums, ouvertement islamistes ou gérés par des médias arabes comme Al Jazira, évoquent ces cyber-attaques et comptent les points. Lors de la polémique créée, en septembre, par les propos du pape Benoît XVI à propos de l’islam, une offensive de pirates a visé le site internet du Vatican, qui, bien protégé, n’a été que peu affecté. Il ne faut toutefois pas exagérer le péril que constitue le jihad électronique, estime Thomas Hegghammer, expert au sein de l’Institut norvégien de recherches de défense. “Provoquer la fermeture d’un site web n’est pas difficile. Pour l’instant, il n’y a pas d’exemple de cyberattaque qui ait provoqué des dommages physiques”. “Il n’y a aucune raison que les radicaux islamistes soient plus compétents que par exemple les pirates professionnels d’Europe de l’Est. Ce n’est pas parce qu’ils sont jihadistes qu’ils sont plus dangereux : en définitive, tout dépend de leur expertise technique, et il n’y a rien dans leur idéologie qui les rende plus compétents en la matière que qui que ce soit d’autre”. |
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